
Le carcinome canalaire in situ du sein est considéré comme un précurseur direct du cancer mammaire invasif, avec une progression vers les formes invasives semblant plus fréquente et plus rapide pour les carcinomes in situ de haut grade que pour ceux de grade faible. Si avant l’ère du dépistage mammographique, le diagnostic de carcinome canalaire in situ ne représentait que 2 % des diagnostics de cancer mammaire, environ 20 % des cancers du sein sont actuellement diagnostiqués au stade pré-invasif, et la mammographie apparaît comme un examen clé du diagnostic. Cherchant à préciser l’utilité d’autres explorations radiologiques pour le diagnostic de cancer du sein au stade intracanalaire et la prévention du cancer invasif, des auteurs allemands ont comparé les sensibilités respectives de la mammographie et de l’IRM.
Ils ont mené une étude prospective, dans un centre de dépistage assurant aussi la surveillance intensive des femmes à risque de cancer du sein, et ont suivi cinq années durant (entre début janvier 2002 et fin décembre 2006), par mammographie et IRM, 7 319 femmes. Quatre radiologues sénologues expérimentés ont analysé, indépendamment, les clichés.
Au cours de la période d’étude, un diagnostic de carcinome
canalaire préopératoire été porté chez 167 femmes ayant eu une
mammographie et une IRM. Ces femmes, âgées en moyenne de 54,1 ans
(extrêmes : 31-84 ans), ont formé la cohorte d’étude ; 44 femmes
(26 %) avaient été adressées pour dépistage régulier, pour 14 (8 %)
le dépistage était motivé par des antécédents familiaux de cancer
du sein, et 12 (7 %) avaient des symptômes (écoulement, tuméfaction
palpable, rétraction du mamelon, maladie de Paget).
L’IRM est apparue détecter significativement plus de cas, de tous
grades, de carcinome canalaire in situ du sein que la mammographie
: sur les 167 cas, soumis à analyse, la mammographie a permis le
diagnostic dans 93 cas (56 %) et l’IRM dans 153 (92 %) (p <
0,0001), 81 cas (49 %) ayant été reconnus pas les deux méthodes.
Sur les 167 cas, 72 (43 %), muets à la mammographie, ont été
reconnus par la seule IRM.
Les patientes ayant une mammographie positive ne différaient pas de
celles dont la mammographie s’est révélée négative en termes d’âge,
de statut ménopausique, d’antécédents personnels de cancer du sein,
homo- ou controlatéral, d’antécédent de mastopathie bénigne, ou de
risque familial. La distribution de la densité mammaire à la
mammographie était, elle aussi, semblable dans les deux
groupes.
La sensibilité de la mammographie est apparue diminuer avec
l’augmentation du grade du carcinome in situ. La mammographie a
méconnu 43 (48 %) des 89 carcinomes canalaires in situ de haut
grade ; l’IRM a, seule, diagnostiqué tous ces 43 cas.
Après stratification selon la méthode d’imagerie, la valeur
prédictive positive de la mammographie était de 55 %, celle de
l’IRM, de 59 %.
Ces résultats, issus d’une étude menée dans un seul centre, à haut niveau d’expertise, et non représentatifs des dépistages habituellement mis en œuvre, doivent être interprétés avec prudence. Ils imposent, avant de conclure, des études complémentaires, multicentriques, randomisées avec analyse des effets sur les taux de récidive et de mortalité, et l’établissement de standards appropriés pour l’IRM mammaire.
Dr Julie Perrot