
Des équipes italiennes viennent de publier la mise à jour des données de suivi de la cohorte des épouses de travailleurs employés à l’usine Eternit, de Casale Monferrato, l’une des plus importantes installations de production d’amiante-ciment en Italie, opérationnelle de 1907 à 1986. Cette mise à jour concerne les données de mortalité et l’incidence des mésothéliomes malins chez les femmes exposées, à la maison, à l’amiante transporté par leur mari, notamment via les vêtements de travail, lavés au domicile en l’absence de mise à disposition d’un service de nettoyage à l’usine.
La population de l’étude, constituée de 1 780 femmes, mariées à
un travailleur de l’amiante-ciment pendant la période d’emploi de
ce dernier, mais elles-mêmes non exposées professionnellement à
l’amiante, a été suivie jusqu’en avril 2003.
En fin de suivi, 67 % des femmes étaient en vie, 32,3 % étaient
décédées (la cause du décès étant connue dans 97,1 % des cas) et
0,7 % avaient été perdues de vue ou avaient déménagé ; au total le
suivi, de 1965 à 2003, a porté sur 51 873 sujets-années.
La mortalité par cancer du poumon n’est pas apparue
significativement augmentée (12 cas observés versus 10,3 attendus),
avec un ratio standardisé de mortalité (SMR) de 1,17 (IC à 95 %
0,60-2,04).
En revanche, la mortalité par cancer pleural s’est avérée
significativement accrue (21 cas observés versus 1,2 cas attendus),
avec un SMR de 18,00 (IC à 95 % 11,14-27,52), et une
incidence de mésothéliomes de la plèvre significativement augmentée
(11 cas incidents, ratio standardisé d’incidence : 25,19 ; IC
à 95 % 12,57-45,07).
L’analyse de la mortalité par cancer de la plèvre selon la durée de
l’exposition domestique laisse apparaître, pour toutes les
catégories de durées d’exposition, des SMR significativement
augmentés, plus élevés chez les femmes ayant les durées
d’exposition les plus longues (la durée d’exposition la plus courte
étant de 5 ans).
L’analyse selon la latence montre un accroissement statistiquement
significatif des SMR, observé au moins 30 ans après la première
exposition (le délai de latence le plus court observé étant de 11
ans).
Cette étude, unique par sa taille, par la durée de son suivi et par son lien à une étude de cohorte professionnelle, entièrement fondée sur des données officielles issues des registres professionnels et des archives municipales, met en évidence un risque significativement accru de mésothéliome pleural chez les épouses de travailleurs de l’amiante, risque lié à une exposition exclusivement domestique.
Dr Claudine Goldgewicht