La pneumonie organisée (PO) correspond a un modèle histologique
où une prolifération fibroblastique polypoïde intraluminale
alvéolaire est associée à des bouchons cellulaires
intrabronchiolaires. Ces lésions sont caractéristiques mais ne sont
pas spécifiques d’une situation clinique particulière. On les
rencontre en association avec des infections, des maladies de
système, des réactions médicamenteuses ou après une
radiothérapie…
Dans certains cas, aucune cause ou lien ne sont retrouvés et cette
pneumonie est qualifiée d’idiopathique, et dans ce contexte, les
lésions sont souvent bilatérales.
La PO unifocale, localisée en un seul site, est une entité rare, et peu d’étude étiologiques ou cliniques à son sujet sont disponibles à ce jour. Nous rapportons ici une série rétrospective de patients chez qui une PO focale a été diagnostiquée par prélèvement chirurgical. En effet parmi 203 sujets ayant bénéficié d’une biopsie chirurgicale montrant une PO entre 1997 et 2004, la lésion était unifocale pour 26 (13 %) d’entre eux.
Toutes les données cliniques, radiologiques, histologiques, microbiologiques ont été réunies pour chacun de ces 26 malades. Ils étaient âgés en moyenne de 66 ans (36 à 86 ans), et 11 étaient des femmes. Sept d’entre eux étaient fumeurs, et le seul ayant exercé une profession potentiellement « exposée » était soudeur. Dix patients (38 %) présentaient des symptômes cliniques : toux et dyspnée dans 6 cas et un seul avait de la fièvre. Chez 6 patients, des râles étaient audibles, non attribuables à priori à une lésion unifocale. Des antécédents de cancer étaient notés pour 6 malades mais avec un seul cas de localisation bronchique opérée. Chez deux d’entre eux le cancer était évolutif traité par polychimiothérapie (non précisée). Un patient était transplanté cardiaque (traitement non précisé). Les tests sanguins biologiques étaient normaux dans tous les cas.
Les résultats des EFR étaient variables, sachant que 3 patients étaient porteurs de BPCO préalablement à la découverte du nodule et qu’un autre avait des bronchectasies. Au total 12 avaient des EFR normales, et 8 un syndrome obstructif (VEMS de 25 à 75 %).
La localisation était variable, visible parfois sur la radio ou sur le scanner, et le diamètre moyen était de 1,9 cm (de 0,6 à 6,75 cm). La lésion était lisse chez 10 malades (38 %), et irrégulière et « spiculée » chez les 16 autres. Sur les 7 scanners avec injection, toutes les lésions incorporaient le produit de contraste, 2 lésions comportaient un bronchogramme aérique, une était excavée. Chez 4 malades, un PET scan a été pratiqué, toujours positif. Dans ces 4 derniers cas, la PO était cryptogénique.
Dans tous les cas, la suspicion d’une maladie cancéreuse a motivé l’intervention chirurgicale. Ceci a permis de trouver trois fois une cause à cette PO : une infection à Pseudomonas aeruginosa, un abcès aseptique (mais préalablement traité par antibiotiques), et une infection à Cytomégalovirus chez un patient immunocompétent. Au total, une cause infectieuse a été prouvée chez ces 3 patients, et chez 4 autres, l’histoire clinique était compatible avec une infection assez récente, sur la base de l’interrogatoire.
Après la chirurgie, deux patients ont reçu des corticoïdes, mais aucun n’a eu de corticothérapie, et au cours du suivi clinique et radiologique moyen de 14 mois (de 1 à 71 mois), il n’y a pas eu de récurrence de PO.
La plupart des études portant sur les PO et citées par les auteurs tendent à démontrer que ces lésions surviennent le plus souvent chez des fumeurs souffrant de BPCO avec des infections itératives, ce qui n’était pas le cas dans cette série. Elles suggèrent également que le traitement requis est une corticothérapie prolongée, stratégie qui n’a pas été suivie chez nos patients. Ils s’agissait plutôt de PO multifocales dans ces références, et les PO unifocales n’ont peut être pas les mêmes caractéristiques physiopathologiques et évolutives.
Dr Isabelle Herry