
E. LOHMANN,
Département de Neurologie, Faculté de Médecine, Université d’Istanbul (Turquie)
La prise en charge du syndrome des jambes sans repos
(SJSR) passe par plusieurs étapes. La première est celle du
diagnostic : celui-ci est essentiellement clinique et l’anamnèse,
en particulier l’histoire des symptômes, est d’une grande
importance lors de la première consultation.
Un interrogatoire précis permet en général d’éliminer les
diagnostics différentiels. La deuxième est d’individualiser les
sujets les plus sévèrement touchés nécessitant une prise en charge
médicamenteuse. En parallèle, il reste indispensable de rechercher
une étiologie sous-jacente au SJSR, dont le traitement spécifique
entraînerait une amélioration de la symptomatologie. Ainsi, la
recherche d’une déplétion ferrique doit être systématiquement
réalisée avant de proposer un traitement adapté reposant sur des
études scientifiques, tout en connaissant les principaux effets
secondaires de ces thérapeutiques.
Le syndrome des jambes sans repos (SJRS) est un syndrome
neurologique sensitivo-moteur défini par le besoin irrésistible de
bouger ses jambes, survenant surtout au repos avec au moins un
soulagement partiel et temporaire durant l’activité. Ce besoin naît
d’un inconfort dans les membres inférieurs – fourmillements,
picotements, sensations de brûlures –, dont l’intensité varie
beaucoup d’une personne à l’autre. La première description en a été
faite en 1685 par le neurologue Thomas Willis, mais le syndrome a
été publié sous le nom « restless legs » par K.A. Ekbom en 19441.
Cette maladie touche environ 8,5 % de la population française (26),
8 % de la population américaine et 12 % de la population canadienne
(27). Elle est par contre rare dans d'autres populations, en
particulier asiatiques (2). La prévalence augmente avec l’âge, avec
une nette aggravation après 50 ans. Dans certaines études
rétrospectives, 40 % des adultes concernés indiquent que leurs
troubles ont débuté avant leur 20e anniversaire et 12 % même avant
le 10e anniversaire. Une étude allemande a constaté une prévalence
du SJSR chez l’enfant de 1 % (15). Dans l’étude de R.D. Chervin et
coll. (2002), 25 % des enfants souffrant d’un trouble de
l’attention avec hyperactivité (TDA-H) présentaient aussi un SJSR
(16). Le syndrome des jambes sans repos est deux fois plus fréquent
chez les femmes que chez les hommes (3).
La prévalence augmente avec l’âge, avec une nette aggravation après 50 ans.
Le syndrome des jambes sans repos est idiopathique dans la
majorité des cas. Bien que l’on souligne depuis longtemps
l’influence de l’hérédité dans
le SJSR (4,5), il existe très peu d’études de génétique moléculaire
qui se sont attelées à la recherche de gènes prédisposant au SJRS.
Chez les jumeaux monozygotes, on note une concordance de 85 % (6).
Dans le cadre des études concernant l’ensemble du génome, la
première liaison a été établie au sein d’une famille de 25
Canadiens français7. Le mécanisme de transmission est autosomique
récessif et, dans la région concernée, on trouve le gène codant
pour la neurotensine qui agit comme neuromodulateur de la
transmission dopaminergique. Plus récemment, l’équipe de Milan a
montré qu’il existait une liaison significative au niveau du
chromosome 14q13-218 avec une transmission de type autosomique
dominant. Ces auteurs suggèrent une grande hétérogénéité génétique
dans le SJSR. Enfin, S. Chen et coll. (2004) ont découvert un locus
de susceptibilité au SJRS au niveau du chromosome 9 chez une
famille nord-américaine (9). Un variant du gène BTBD (9), situé sur
le chromosome 6 a également été trouvé, significativement associé
avec cette maladie (10).
Un syndrome défini par l’interrogatoire
La clinique du SJSR est évocatrice et repose sur des données cliniques obtenues lors de l’interrogatoire du patient. En effet, la présentation clinique peut prendre des aspects très différents d’un patient à l’autre et changer d’expression au cours du temps chez un même patient. Les critères actuellement utilisés sur le plan international pour le SJSR sont indiqués par le tableau 1.
Tableau 1. Critères diagnostiques du SJSR chez l’adulte 11. |
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• Besoin irrésistible de bouger associé à des
dysesthésies/paresthésies. • Soulagement/diminution transitoire avec le mouvement ou une activité motrice répétitive (motor restless). • Survenue ou aggravation des symptômes avec le repos. • Apparition préférentielle ou exclusive des symptômes dans la soirée, en particulier au moment du coucher. |
Le premier critère est nuancé par le fait que la sensation
déplaisante n’est pas toujours perçue ou qu’elle est très
difficile à décrire. La sensation anormale se situe généralement
entre la cheville et le genou, elle est uni- ou bilatérale et peut
dans 20 % des cas, généralement les plus sévères, toucher aussi les
membres supérieurs ou d’autres parties du corps. Enfin, les
patients précisent que le mouvement est volontaire et que les
sensations peuvent être perçues comme des douleurs, ce qui était un
critère d’exclusion antérieurement.
Le deuxième critère est le soulagement partiel ou total par les
mouvements : par exemple, le fait de se lever, la marche,
l'éveil. Pendant le sommeil, les sensations disparaissent, mais les
mouvements involontaires continuent. Ces mouvements peuvent aller
jusqu'à des contorsions, et de fortes courbatures matinales peuvent
alors se faire ressentir en plus de l'accumulation de la fatigue,
dans le cas où le syndrome est fortement actif. En effet, ces
symptômes dérangent le sommeil, et il n'est pas rare que les
personnes qui en souffrent éprouvent également des troubles de la
concentration et de la mémoire. Il est possible que dans des cas
sévères, le mouvement ne parvienne plus à soulager les troubles,
mais les patients se rappellent presque toujours que la marche les
soulageait dans les phases antérieures de l’évolution du
trouble.
Le troisième critère est la circonstance de survenue ou
d’aggravation exclusive du symptôme par le repos. Ce phénomène
a été étudié en profondeur par le groupe de Montréal à travers la
mise au point de son « test d’immobilisation suggérée », qui montre
que les symptômes s’aggravent tant que le repos forcé est maintenu
(12). Les commentaires mentionnent aussi un fait souvent rapporté
par les patients : l’inactivité ne doit pas être restreinte au
physique, elle intéresse aussi le mental. En effet, une activité
mentale demandant une focalisation intense de l’attention est une
stratégie fréquemment utilisée par les personnes présentant un SJSR
pour lutter contre leurs symptômes. Ce critère de survenue au repos
permet aussi de distinguer cliniquement les impatiences des
sensations liées à l’insuffisance veineuse ou artérielle et aux
phénomènes arthritiques, ces trois derniers s’améliorant au
contraire au repos et s’aggravant à la marche.
Ce critère de survenue au
repos permet de distinguer cliniquement
les impatiences des sensations liées à l’insuffisance veineuse ou
artérielle.
Le quatrième critère est un critère d’horaire : les impatiences
surviennent exclusivement le soir et la nuit si le patient se
réveille. Cette influence circadienne a bien été mise en
évidence montrant un pic des symptômes juste après minuit (13,14).
Certains syndromes très sévères sont cependant présents 24 heures
sur 24, mais ils ont alors débuté quelques années auparavant en
n’occupant que les soirées. Ces symptômes se distinguent cependant
du tic fréquent qui consiste à agiter rythmiquement les jambes ou
les pieds en position assise en journée.
Les critères diagnostiques actuellement utilisés sur le plan
international pour le SJSR chez l’enfant (17) sont résumés dans le
tableau 2.
Tableau 2. Critères diagnostiques du SJSR chez l’enfant 17. |
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• 4 critères essentiels de l’adulte • + au moins 2 des 3 critères suivants : - troubles du sommeil ; - un des apparentés avec SJSR ; - polysomnographie : mise en évidence de plus de 5 mouvements périodiques par heure de sommeil. |
Ils exigent, en plus des quatre critères essentiels du SJSR adulte,
la description de dysesthésies dans les jambes, l’enfant utilisant
ses propres mots. Il ne suffit donc pas que les parents mentionnent
des mouvements fréquents des jambes de leur enfant, ce comportement
étant fréquent à cet âge, par exemple lors d’un TDA-H. Il est
important de vérifier que les douleurs/dysesthésies débutent au
repos, particulièrement au lit. Lorsque le SJSR débute durant
l’enfance, on suppose un fond génétique, l’anamnèse familiale est
donc importante (cf. introduction). Pour asseoir le diagnostic de
SJSR, de l’avis d’un groupe d’experts allemands, les symptômes
devraient être présents depuis au moins 6 mois de façon plus ou
moins constante (18). Les douleurs de croissance, par contre, se
manifestent durant quelques jours à quelques semaines pour
disparaître et éventuellement réapparaître ultérieurement. La
polysomnographie (PSG) est indispensable au diagnostic des
mouvements périodiques des extrémités (appelés PLMS : periodic limb
mouvements in sleep). L’anamnèse et la clinique permettent pourtant
souvent de poser le diagnostic.
À ces critères essentiels, s’ajoutent des critères d’aide au
diagnostic et des éléments cliniques associés au SJSR (tableau
3).
Tableau 3. Phénotypes SJSR liés à l’âge. |
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L’examen clinique est normal dans la plupart des SJSR primaires. On doit faire un dosage de la ferritine, dont le niveau rend compte des réserves en fer de l’organisme. En dessous de 40-50 mcg/l, les risques de SJSR sont plus élevés.
En général, la maladie débute épisodiquement soit une nuit par semaine, soit par périodes de plusieurs semaines émaillées de rémissions. Les femmes peuvent ressentir les premiers symptômes à l’occasion d’une grossesse. Certains patients voient évoluer leurs symptômes, qui apparaissent de plus en plus précocement, fréquemment et/ou intensément. Cette évolution spontanée peut être lente sur des dizaines d’années ou s’aggraver vite. Quand le début des signes survient après 50 ans, l’évolution est beaucoup plus brutale et plus rapidement sévère (tableau 4). Presque tous les patients montrent au moins une amélioration initiale sous traitement dopaminergique.
Tableau 4. Questionnaire de sévérité du SJSR. |
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Sauf mention particulière, les scores
correspondent à l’échelle suivante :
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Il n’a pas été trouvé de relation entre le SJSR et l’évolution tardive vers une maladie de Parkinson.
Cette réponse ne se maintient pas toujours. Par contre, on peut avoir, dans certains cas, des rémissions spontanées durant plusieurs années. En revanche, bien qu’il y ait un dysfonctionnement dopaminergique central dans les deux cas, il n’a pas été trouvé de relation entre le SJSR et l’évolution tardive vers une maladie de Parkinson.
À quels diagnostics différentiels faut-il encore penser ?
Les patients présentant un SJSR ne viennent que très rarement
consulter pour ce motif. On retrouve deux motifs de consultation
fréquents dans ce contexte : d’une part, des troubles du sommeil,
tels que des difficultés d’endormissement et/ou des éveils
nocturnes prolongés, et, d’autre part, des douleurs des membres
inférieurs souvent difficilement descriptibles. On est donc
confronté à un diagnostic soit de douleurs des membres inférieurs,
soit de troubles du sommeil.
Le diagnostic différentiel du SJSR devant des troubles sensitifs
doit éliminer des douleurs neuropathiques, articulaires et/ou
musculaires, des troubles sensitifs d’origine vasculaire, une
akathisie et le « painful legs and moving toes ». En présence
d’insomnie d’endormissement et/ou d’éveils nocturnes prolongés, un
syndrome anxieux, un trouble obsessionnel compulsif, ainsi que des
troubles de l’hygiène, veille-sommeil doivent être exclus dans un
premier temps.
Un certain nombre de conditions sont plus fréquemment associées au
SJSR : ce sont le diabète, la polyarthrite rhumatoïde, les
dysthyroïdies, l’insuffisance rénale, la carence martiale, avec ou
sans anémie, et la grossesse. Dans ces trois derniers cas, il
semble que ce soit l’hypoferritinémie qui contribue aux symptômes.
En effet, la sévérité du SJRS peut être proportionnelle à la
ferritinémie. Et même si les taux de ferritine sont normaux dans le
sang, ils peuvent s’effondrer dans le liquide céphalorachidien,
traduisant un transfert déficient du fer vers le système nerveux
central. Les patients atteints de la maladie de Parkinson peuvent
souffrir du SJSR et des mouvements périodiques des membres
inférieurs, en particulier s’ils sont insuffisamment traités la
nuit par les médicaments dopaminergiques.
La sévérité du SJRS peut être proportionnelle à la ferritinémie.
Un certain nombre de médicaments peut entraîner ou aggraver le SJSR : ce sont les antidépresseurs, qu’ils soient tricycliques ou sérotoniques, les neuroleptiques et les inhibiteurs calciques. Ils ont en commun la capacité de réduire la transmission dopaminergique. De plus, certains facteurs comme la caféine, l’alcool, la cigarette et/ou le stress et la fatigue déclenchent ou aggravent les symptômes chez plusieurs personnes.
Quelques hypothèses physiopathologiques
Le mécanisme susceptible d'expliquer le phénomène des jambes
sans repos n'est pas connu avec précision. Grâce à l'imagerie
fonctionnelle (PETscan, IRM fonctionnelle), certains chercheurs en
neurologie ont suggéré un dysfonctionnement du système
dopaminergique modulé lui-même par le système opioïde endogène. Il
semble exister des perturbations d'autres neurotransmetteurs
(28,29).
Certains ont également soulevé le rôle du fer, cette affection
ayant été observée au cours des anémies ferriprives. Les symptômes
des jambes sans repos régressent après administration de fer. Une
ferritinémie basse pourrait donc être à l'origine de ce type de
syndrome.
Plus récemment, il a été mis en évidence une concentration élevée
d'hypocrétine-1 (orexie-A) dans le liquide céphalo-rachidien des
patients souffrant d'un SJSR. L'hypocrétine semble jouer un rôle
dans le maintien de l'éveil, et ce phénomène est susceptible
d'expliquer un trouble du sommeil, essentiellement une difficulté
d'endormissement indépendamment des symptômes rencontrés au cours
du syndrome des jambes sans repos.
Il a également été démontré la diminution de la captation au niveau
du noyau caudé du putamen, s'associant à une diminution de la
liaison de C-raclopride à l'intérieur du putamen et du noyau
caudé.
Déterminer la sévérité du SJSR
L’inconfort dans les membres et la privation de sommeil sont une source directe de souffrance : le SJSR peut altérer l’humeur des patients, mais surtout leur qualité de vie sociale, familiale et professionnelle. Une des conséquences les plus gênantes du SJSR est l’insomnie : beaucoup de patients éprouvent des difficultés à s’endormir, d’autres se réveillent la nuit et sont empêchés de retrouver le sommeil par les impatiences (figure 1). Curieusement, peu de patients font la relation entre leurs deux plaintes et consultent volontiers initialement pour une insomnie. Il n'est pas rare que les personnes qui en souffrent éprouvent également des troubles de la concentration et de la mémoire.
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Figure 1. |
Cependant, le SJSR ne s’avère très invalidant que chez une
minorité de patients, puisque l’on admet que 1 à 2 % de la
population ressent un handicap suffisamment important pour être
spécifiquement pris en charge.
La sévérité peut être évaluée de manière subjective par un
questionnaire proposé par l’International Restless Legs Study Group
(IRLSSG). Le retentissement du SJSR peut également être évalué sur
le sommeil, la vigilance ou la qualité de vie. L’enregistrement
polysomnographique, l’actigraphie et/ou le test d’immobilisation
forcée permettent également d´apprécier la sévérité des
symptômes.
Prise en charge thérapeutique
Il est logique de commencer de toute manière par essayer d’agir
sur la cause : sevrage si possible des médicaments inducteurs du
SJSR, traitement par fer oral, équilibration du diabète ou de la
dysthyroïdie. Le deuxième élément de la prise en charge
thérapeutique inclut des règles hygiéno-diététiques avec
suppression de l’alcool, du café et des autres facteurs déclenchant
et/ou aggravant les symptômes. Il importe également de veiller à un
rythme de sommeil régulier, nombre d’heures de sommeil suffisant et
éventuellement exercice physique modéré avant le coucher. Un moyen
de prévention est de garder son esprit occupé avec des activités
qui demandent une attention particulière lorsqu’on doit rester
assis longtemps (trajet en voiture...). Lorsque les symptômes sont
présents, les mesures, comme bouger les jambes, les étirer ou plier
les genoux, pratiquer des automassages, prendre un bain chaud,
appliquer de la chaleur et du froid sur les muscles en alternance,
apportent un soulagement immédiat, mais temporaire.
Néanmoins, dans des formes modérées à sévères, un traitement
quotidien est plus efficace.
Les agonistes dopaminergique : la L-Dopa
Ces médicaments agissent soit en mimant l’action de la dopamine, comme le pramipexole (Sifrol ®), le péribidil (forme à liberation prolongée au coucher), le pergolide (Celance®), la bromocriptine et le ropinirole (Adartrel®), soit en augmentant le taux de dopamine comme le lévodopa/carbidopa (Sinemet®, Apo-Levocarb®). Il s’agit, en général, des premiers médicaments que l’on essaie. Ils sont consommés à faibles doses en comparaison aux doses prescrites pour la maladie de Parkinson.
Tous les agonistes dopaminergiques ont montré leur efficacité sur le SJSR.
Tous les agonistes dopaminergiques ont montré leur efficacité
sur le SJSR mais également sur les mouvements périodiques, les
caractéristiques architecturales du sommeil et la qualité de vie.
La dose de L-Dopa efficace peut être atteinte assez rapidement,
même si elle ne doit pas être administrée sur une longue période,
tandis que tous les agonistes de la dopamine doivent être
introduits plus lentement. Si de fortes posologies sont
administrées trop rapidement, ceci peut entraîner des effets
nauséeux. S’ils surviennent, seule la dompéridone peut être
associée : les autres antivomitifs étant des bloqueurs des
récepteurs centraux de la dopamine, ils aggravent le SJSR.
Toutefois, les patients réagissent souvent assez rapidement à la
thérapeutique au début, mais malheureusement une accoutumance peut
s’installer et l’effet peut de nouveau s’atténuer. Dans ces cas-là,
il faut beaucoup de patience et de confiance envers le médecin
traitant jusqu’à ce que l’on trouve un remède plus efficace ou
éventuellement une combinaison médicamenteuse. En général, une
monothérapie par agoniste dopaminergique suffit. La L-Dopa est
déconseillée en traitement de fond, dans la mesure où, du fait de
sa demi-vie trop courte, elle peut induire un rebond du SJSR au
petit matin, et qu’elle provoque dans 80 % des cas à moyen terme
des phénomènes d’augmentation.
Les agonistes de la dopamine sont également les médicaments les
plus fréquemment utilisés chez l’enfant (19). Cependant, les
indications concernant le risque d’une accentuation des symptômes
par ce traitement dans cette population manquent dans la
littérature.
Les opiacés
Chez les patients atteints de formes sévères du syndrome
d’impatience des membres inférieurs à l’éveil et qui ne répondent
pas ou mal au traitement dopaminergique ou ne le tolèrent pas, un
traitement par des opiacés peut supprimer efficacement les
symptômes. Leur mode d’action serait lié à leur impact sur le
système dopaminergique et non les récepteurs opioïdes (19). D’autre
part, on a rapporté, dans des cas isolés, qu’un traitement alterné
par la codéine et la
L-Dopa – chaque médicament étant administré sur plusieurs mois –
était particulièrement efficace. Le risque de narcodépendance
associé au traitement du syndrome d’impatience des membres
inférieurs à l’éveil par des opiacés est extrêmement faible (20).
Selon des études de cas, les traitements des effets de tolérance
minimaux peuvent même visiblement être évités.
Les benzodiazépines
Les benzodiazépines, dont l'emploi n'est plus recommandé de nos
jours, font également partie des médicaments utilisés depuis les
années 1970 dans
le traitement du SJSR. Dans certains cas associé à une forte
insomnie ou à une neuropathie, un traitement par clonazépam
(Rivotril®) peut permettre au patient de passer le cap des
impatiences et de s’endormir, avec cependant un risque
d’accoutumance et de somnolence diurne résiduelle le lendemain. La
posologie doit être initiée à faibles doses, de l’ordre de 0,5 mg,
puis augmentée progressivement en fonction de la réponse clinique
jusqu’à 2 à 3 mg par jour. En revanche, les véritables symptômes du
SJSR, en particulier les mouvements involontaires des membres, ne
sont pas influencés par la benzodiazépine ou peu (21). Les effets
indésirables sont la somnolence et, chez les patients âgés, le
risque accru de chutes pendant la nuit. D’autres benzodiazépines
(diazépam, témazépam, triazolam) ou des hypnotiques (zolpidem) (22)
ont également été étudiés. La persistance de l’effet thérapeutique
à long terme n’a pas été réellement documentée (23).
Les antiépileptiques
Bien que divers anticonvulsifs traditionnels soient connus comme déclencheurs d’un SJSR secondaire, une action positive de la gabapentine a été rapportée à plusieurs reprises (24). Cette efficacité persiste même au bout de 6 mois de traitement25. La dose moyenne utilisée est de 1 855 mg (25). Le gros avantage est la bonne tolérance digestive même chez les patients plus âgés qui doivent prendre beaucoup d’autres médicaments.
Autres traitements
Certains naturopathes recommandent la prise de suppléments de
magnésium avant le coucher, afin de diminuer les mouvements
involontaires des jambes durant la nuit (5). Seulement deux études
(30,31) de faible envergure indiquent que les suppléments de
magnésium peuvent soulager ce symptôme, même en l’absence d’une
carence.
L’acupression, une technique apparentée à l’acupuncture, peut aider
à soulager les symptômes dans les jambes (32). Elle consiste à
appliquer des pressions sur différents points des méridiens, afin
de relâcher la douleur et les tensions musculaires.
À l’heure actuelle, il semble opportun de privilégier, lorsqu’il n’existe pas de carence martiale, les agonistes dopaminergiques et réserver aux formes résistantes les benzodiazépines, les antiépileptiques, la L-Dopa ou les opiacés. Une association thérapeutique peut également être proposée bien qu’aucune étude ne l’ait validé.
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