
T. AKHIATE, M. EL IDRISSI, F.Z. BELGNAOUI, K. SENOUCI, B. HASSAM,
Service de Dermatologie, CHU Ibn Sina, Rabat
Les publications sur l’acné sont rares. Elle est à différencier de l’acné néonatale infantile (1) et de l’acné prépubertaire (2,3). L’intérêt de ce travail est d’insister, à travers notre observation, sur les caractères distinctifs de cette forme clinique d’acné.
Observation
Il s’agit d’un enfant de sexe masculin, âgé de 3 ans et demi,
sans antécédents d’acné familiale ni de prise médicamenteuse
maternelle durant la grossesse. Il présentait une acné mixte depuis
l’âge de 18 mois, faite de lésions rétentionnelles et de rares
pustules sur le front et les pommettes, associées à deux petits
nodules inflammatoires de 5 mm de diamètre.
L’examen clinique ne retrouvait aucun signe d’hypercorticisme ou de
puberté précoce. Les examens complémentaires n’ont pas été
demandés, étant donné l’absence d’hyperandrogénie clinique.
Sur le plan thérapeutique, des macrolides topiques ont été
appliqués sur les lésions pustuleuses et des alphahydroxyacides sur
les lésions rétentionnelles. La non-manipulation des lésions a été
conseillée aux parents pour éviter l’exacerbation de l’éruption.
Une nette amélioration des lésions a été observée après 3 semaines.
L’arrêt du traitement a été décidé après 3 mois, devant la
disparition totale de l’éruption. Aucune récidive n’a été notée
après un suivi de deux autres mois.
Discussion
L’acné infantile est plus rare (4,5) que l’acné néonatale (6) et
prépubertaire (29 cas sur 25 ans) (7,8). Elle apparaît après l’âge
de 3 mois et peut persister jusqu’à l’âge de 5 ans, avec une
prédominance chez les garçons, observée dans 80 % des cas. Des
antécédents d’acné familiale sont souvent retrouvés.
L’interrogatoire doit par ailleurs rechercher la notion d’une
thérapeutique hormonale ou médicamenteuse (9-11) (chez la mère lors
de la grossesse type corticostéroïdes, dérivés halogènes ou
lithium).
Une acné précoce doit faire rechercher des signes cliniques
d’hyperandrogénie associée tels qu’une hyperpilosité du pubis, une
surcharge pondérale ou un développement anormal des organes
génitaux externes. Des perturbations du bilan hormonal doivent
inciter à pousser les investigations à la recherche de tumeurs ou
d’hyperplasie surrénalienne, ovarienne, testiculaire, hypophysaire
ou même hypothalamique. Cependant, l’acné de l’enfant, comme cela
est le cas chez notre patient, est le plus souvent isolée et ne
nécessite donc pas de bilan paraclinique.
Au plan thérapeutique, dans la majorité des cas d’acné de l’enfant,
de simples soins locaux avec des laits dermo-nettoyants sont
suffisants. Devant des lésions rétentionnelles, un traitement par
des alphahydroxyacides est souvent efficace. Pour les lésions
inflammatoires, l’utilisation de lotions à l’érythromycine ou à la
clindamycine et/ou l’emploi de peroxyde de benzoyle à faibles doses
est suffisant. L’antibiothérapie orale prolongée à base
d’érythromycine ou de triméthoprime est efficace en cas d’acné
inflammatoire plus sévère. L’isotrétinoïne orale (12) donnerait de
bons résultats chez l’enfant (13), cependant, en raison de son
retentissement sur la fonction hépatique, le métabolisme lipidique
et la croissance, elle doit rester réservée aux formes graves
nodulo-kystiques(14) et en cas d’échec des autres traitements.
Conclusion
L’acné de l’enfant, bien que rare, doit être connue, car sa
prise en charge précoce permettrait d’éviter la survenue ultérieure
d’une acné pubertaire, qui est alors plus sévère que dans la
population générale.
Un bilan hormonal et radiologique se révèle nécessaire en présence
de signes cliniques de perturbations hormonales, afin de traiter
les facteurs favorisants et éviter la survenue d’une acné
pubertaire grave par la suite.
Références
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