
Paris, le mardi 9 décembre 2008 – S’il faudra attendre encore quelques mois pour savoir si la loi Hopital patients santé territoire (HPST) portée par Roselyne Bachelot sera un réel moteur du développement des coopérations entre professionnels de santé, une étude menée par l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), publiée en novembre, tend à confirmer l’efficacité de ces collaborations actives entre médecins et infirmières.
Le dispositif ASALEE (Action de Santé Libérale en Equipe) a été mis en place en 2004 dans le département des Deux Sèvres. Il s’agit pour les infirmières salariées de l’association d’intervenir dans deux ou trois cabinets de médecins généralistes, afin d’assurer dans certains cas spécifiques les consultations d’éducation thérapeutique, ou de procéder au dépistage de facteurs de risque ou encore de participer aux campagnes de dépistage collectif. Concernant initialement trois cabinets (associant douze médecins généralistes) dans lesquels intervenaient trois infirmières, ASALEE emploie désormais huit infirmières partagées dans 18 cabinets (soit 41 omnipraticiens).
Les enjeux de l’étude
Afin d’évaluer l’efficacité d’ASALEE, les chercheurs de l’IRDES se sont concentrés sur la question particulière de la prise en charge des patients diabétiques de type 2. Dans ce domaine, les infirmières de l’association assurent d’une part « la gestion des données et la mise en place de rappels informatiques » à destination des praticiens et d’autre part, après proposition du médecin au patient, une consultation d’éducation thérapeutique, qui concerne de fait 44 % des patients. Afin de déterminer les avantages d’un dispositif tel qu’ASALEE par rapport à un suivi classique, les experts de l’IRDES ont non seulement analysé la prise en charge des malades dans le temps (au cours de deux années consécutives) mais l’ont également comparée à celle d’autres patients. Par ailleurs, leurs principaux critères d’évaluation auront été l’équilibre glycémique marqué par le taux d’HbA1c et le nombre d’examens de contrôles réalisés en se référant aux recommandations de la Haute autorité de santé (HAS). L’IRDES aura complété cette analyse d’une évaluation des coûts.
La consultation d’éducation thérapeutique ça paye !
Il apparaît que la consultation d’éducation thérapeutique réalisée par les infirmières a une incidence très nette sur l’état de santé des patients « ASALEE » (838 malades). Ainsi, les auteurs ont tout d’abord pu observer que « la probabilité d’avoir une valeur d’HbA1c maintenue ou ramenée à 8 % ou moins sur un an est 1,8 fois plus importante pour les patients diabétiques de type 2 dans le groupe ASALEE que pour ceux du groupe témoin (1 018 assurés des Deux-Sèvres, ndrl) (…). Néanmoins, si l’on se réfère à un (…) seuil d’Hba1c (…) de 7 %, voire de 6,5 %, nous n’observons plus de différences significatives entre les deux groupes ». La donne change significativement quand on ne s’intéresse qu’aux seuls patients du groupe ASALEE ayant bénéficié d’une consultation d’éducation thérapeutique. « Nous constatons (…) que la plus forte probabilité d’avoir une valeur d’HbA1c maintenue ou ramenée à 8 % au moins sur un an ne concerne significativement que les patients ayant eu au moins une consultation d’éducation thérapeutique » indique l’IRDES qui ajoute : « Le résultat est robuste lorsqu’on se réfère à (…) un seuil d’HbA1c ramené à 7 % ou 6,5 % ».
Pas plus cher
Concernant les examens de contrôle, à l’exception du suivi ophtalmologique, les patients inclus dans le groupe ASALEE étaient plus souvent en adéquation avec les recommandations que les « malades témoins du département des Deux-Sèvres ». A titre d’exemple, la fréquence de contrôle de la micro-albuminurie était 6,8 fois plus satisfaisante chez les malades bénéficiant du dispositif ASALEE par rapport aux autres. Il apparaît une fois encore que l’observation est particulièrement vérifiée chez les malades ayant bénéficié d’une consultation d’éducation thérapeutique. Enfin, les auteurs affirment que « les dépenses des patients ASALEE sont équivalentes à celles des patients du groupe témoin » et ce même après ajustement du « surcoût observé de l’intervention ASALEE, soit 60 euros par patient diabétique de type 2 ». A l’exception de certains biais, liés notamment à l’engagement tout particulier des professionnels de santé inclus dans le dispositif ou encore au fait que l’évaluation des résultats ne concernent pas l’ensemble des « patients ASALEE » (pour des raisons d’appariement au groupe témoin), cette étude semble démontrer les atouts d’une coopération entre professionnels de santé libéraux pour la prise en charge d’affections chroniques. Les auteurs ne disent par ailleurs rien du temps gagné pour les praticiens grâce à la collaboration active des infirmières.
A.H.