Chez les patients non hospitalisés, atteints d’une insuffisance cardiaque avec dysfonctionnement systolique, il a été établi que le traitement des apnées obstructives du sommeil (AOS) avait un effet bénéfique sur la fonction ventriculaire. Qu’en est-il quand les mêmes patients sont hospitalisés du fait d’une décompensation de leur insuffisance cardiaque? Le diagnostic et le traitement immédiat des AOS ont-ils un impact favorable sur le pronostic fonctionnel, voire vital? C’est à ces questions que répond un essai randomisé pilote dans lequel ont été inclus 46 patients atteints d’une insuffisance cardiaque décompensée (ICD) justifiant l’hospitalisation en urgence. Une étude du sommeil a été systématiquement réalisée dans les deux jours qui ont suivi l’admission. Dans tous les cas, celle-ci a mis en évidence des ASO, l’index d’apnées et d’hypopnées (IAH) étant en effet ≥ 15 évènements par heure). Deux groupes ont été constitués, avec dans l’un le seul traitement classique de l’ICD (n=23) et dans l’autre, en plus de ce dernier, l’instauration d’une ventilation spontanée en pression positive continue au masque (CPAP, continuous positive airways pressure), en l’occurrence auto-ajustable (n=23). Le seul critère d’efficacité a été la valeur de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) trois nuits après la randomisation.
Une augmentation significative de la FEVG (+ 4,6 % en valeur absolue; p=0,03) a été mise en évidence par rapport à l’état basal, uniquement dans le groupe CPAP. La comparaison intergroupe, pour sa part, a objectivé une élévation de la FEVG de 4,5+/-1,7 % sous l’effet de la CPAP versus - 0,3+/-1,5 % dans l’autre groupe. Cette différence a subsisté même après ajustement en fonction des variables suivantes: type de cardiomyopathie, indice de masse corporelle, IAH et sexe.
Le traitement des AOS, chez les patients hospitalisés du fait d’une insuffisance cardiaque décompensée, serait à même d’améliorer la fonction systolique du VG. Cette intervention thérapeutique qui repose sur la CPAP est tout à fait faisable. Il faut démontrer qu’elle apporte un plus en termes de rapport coût/efficacité, certes au cours du séjour hospitalier, mais aussi par la suite après la sortie de l’hôpital.
Dr Philippe Tellier