
La vente de médicaments sur Internet reste interdite en France, malgré une tentative d’évolution amorcée par Roselyne Bachelot au printemps 2010. La possibilité d’autoriser les officines françaises à commercialiser des médicaments en libre accès sur la Toile avait alors provoqué un tollé au sein de la profession. Les arguments de protestation portaient sur la remise en question du rôle de conseil du pharmacien et le risque accru de contrefaçons. Depuis deux ans, quelques pharmaciens ont cependant profité du vide juridique pour tenter l’aventure sur Internet… des initiatives généralement soldées par des condamnations de l’Ordre des pharmaciens.
Un tournant est peut-être en train de s'amorcer : le groupement
pharmaceutique de l’Union européenne (GPUE), qui rassemble les
organisations professionnelles des pharmaciens d’officine de 31
pays, réfléchit actuellement aux moyens d’harmoniser les règles de
la commercialisation des médicaments en ligne au sein des pays
membres de la communauté.
« La majorité d’entre eux a déjà accepté de vendre les
médicaments OTC, voire, pour certains, tous les médicaments sur
Internet », signale Alain Breckler, membre du bureau du
conseil central A de l’Ordre des pharmaciens et chargé de mission
Internet.
En France, la position de l’Ordre est claire : les sites Internet doivent impérativement être rattachés à une pharmacie « de brique et de mortier » et liés à un portail ordinal comme garantie de leur sérieux.
L’organisation rappelle que le code de déontologie exige du pharmacien qu’il assure dans son intégralité l’acte de dispensation du médicament et qu’il mette à disposition du patient des informations et les conseils nécessaires au bon usage du produit. La question est donc de savoir comment l’achat sur Internet pourrait véhiculer des informations sur les contre-indications des médicaments et le risque d’interaction. D’autres problèmes pratiques se posent : « Il n’y a pas de limite de vente sur Internet, alors que si on dépasse deux boîtes d’ibuprofène par exemple, il faut une ordonnance » note, par exemple, Alain Breckler. « Tant qu’Internet n’aura pas été introduit dans le code de la santé publique, la vente en ligne restera illégale » conclut l’expert.
Les discussions au sein du GPUE devraient s’achever dans les prochains mois, avec peut-être à la clef une profonde mutation des pratiques professionnelles. Rappelons toutefois que François Hollande, alors interrogé par le Quotidien du Pharmacien en tant que candidat à l’élection présidentielle, s’est dit opposé à la vente en ligne de médicaments (d’ailleurs tout comme son rival de l’époque, Nicolas Sarkozy).
Outre les contestations émanant du sérail professionnel, l’hostilité pourrait donc aussi être politique…
AC