
Paris, le mardi 11 janvier 2022 – Pierre-Olivier Variot,
président de l’Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine (USPO)
a répondu à nos questions sur la place prépondérante des pharmacies
dans le dépistage de la population. Cette interview a été réalisée
quelques heures avant que Jean Castex annonce que pour les enfants
« cas contact » trois autotests (et non plus un test antigénique ou
PCR et deux autotests) seront désormais
préconisés.
JIM.fr - Les pharmacies disposent-t-elles d’assez
d’autotests pour faire face à la demande créée par les consignes
gouvernementales ?
Pierre-Olivier Variot - Nous venons de faire le point
avec le ministère de la Santé, les approvisionnements suivent, il y
aura ce qu’il faut. Les pénuries qui peuvent survenir sont
temporaires, d’une demi-journée, en attendant le lendemain d’être
livrés.
JIM.fr - Que pensez-vous de la délivrance des autotests
dans les grandes surfaces, en ce qui concerne la délivrance des
conseils (aux parents notamment) et de concurrence
d’approvisionnement ?
Pierre-Olivier Variot - Le problème est que l’autotest
a été positionné par le gouvernement dans une stratégie de suivi de
l’épidémie, mais quelle stratégie de suivi il y a quand c’est un
supermarché qui les vend ? Il n’y en a pas. Les supermarchés
assèchent les stocks, il a donc fallu retrouver des sources
d’approvisionnement pour les pharmacies, cela a été difficile la
semaine dernière, mais les stocks sont en train d’être
reconstitués.
L’autotest n’a qu’un rôle de suivi individuel. Il n’a qu’une
place ponctuelle, par exemple dans le cadre d’une fête où tous les
invités se testent ou pour continuer à travailler, mais en dehors
de cela, ce n’est pas valable. L’inconvénient est qu’il n’est pas
un outil de suivi de l’épidémie, car les individus ne se déclarent
pas.
JIM.fr - Que pensez-vous de la sensibilité des autotests
?
Pierre-Olivier Variot - Dans le cadre des
recommandations, l’autotest n’intervient normalement qu’après un
test antigénique : ils ne sont délivrés gratuitement que sur
présentation d’un test antigénique ou PCR négatif. Le test en
lui-même est très bon en sensibilité, le seul problème est la
qualité du prélèvement. Le prélèvement est fait par le patient
lui-même, pas par un professionnel de santé et le pharmacien ne
peut pas vérifier qu’il a été bien fait. Ce n’est pas le test qui
est à remettre en question.
JIM.fr - Ce dimanche, Gabriel Attal a dit vouloir inciter
les pharmaciens à créer leur propre centre de dépistage. Qu’est ce
que cela changera concrètement pour les pharmaciens ?
Pierre-Olivier Variot - Nous attendons les arrêtés.
Mais à l’heure actuelle, on se rend compte que les tests
antigéniques en ville augmentent et que 90 % de ces tests sont
réalisés en pharmacie. Les patients ont une appétence pour la
pharmacie. Mais en officine, ce n’est pas une machine qui fait les
tests, mais les petites mains. Pour doubler les tests, il faut
doubler les petites mains. Il y a énormément de professionnels de
santé qui peuvent faire des tests (infirmiers, médecins, dentistes,
kinés…) mais dans la pratique ils n’en font pas.
Puisque les patients veulent se faire dépister en pharmacie et
que les professionnels veulent être payés comme dans un centre, le
gouvernement propose : « créons des centres dans les
pharmacies ». Cependant, quand on veut embaucher des personnels
pour réaliser des tests, il est indispensable de fournir un contrat
de travail et de les salarier, c’est beaucoup de paperasse. Avec un
centre de dépistage, le médecin est payé à la vacation, avec
beaucoup moins de contraintes contractuelles.
JIM.fr - Selon la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques
de France (FSPF), il faut tester en priorité les personnes
symptomatiques ou cas contact. Etes-vous favorable à la
priorisation des tests ?
Pierre-Olivier Variot - Oui, il ne faut pas tester les
personnes qui veulent obtenir des passe sanitaire de complaisance
(ce qui devrait prendre fin avec l’entrée en vigueur du passe
vaccinal) : on est là pour la santé publique. Il faut se réserver
pour les personnes symptomatiques et les cas contact.
Pierre-Olivier Variot - Pour le moment les stocks sont
insuffisants, mais les livraisons arrivent.
Interview réalisée par Grégoire Griffard le 10 janvier
2022