
L’épreuve de réintroduction contrôlée est essentielle pour
assurer le diagnostic d’allergie alimentaire et déterminer la dose
seuil qui déclenche des réactions cliniques. Cependant la
réalisation de ce test souffre de l’absence de standardisation. De
surcroît le risque de réactions anaphylactiques ne peut être
négligé soulignant la nécessité d’une surveillance
hospitalière.
Des pédiatres et allergologues japonais ont revu les résultats
d’épreuves de réintroduction du lait conduites entre 2011-2017 chez
111 patients à haut risque qui subissaient la 1ère réintroduction.
Tous sujets étaient sous régime restreint en lait en raison de
réactions apparentes de sensibilité immédiate, ou de taux d’IgE
spécifiques > 0,7 U sous régime d’exclusion depuis au moins 6
mois. Les réintroductions ont été pratiquées en 4 étapes avec des
doses croissantes de lait ou équivalents dans un aliment : 1-19 mL,
20-49 mL, 50-99 mL, 100-200mL. Les doses initiales étaient choisies
en fonction du régime antérieur et du taux des IgE
spécifiques.
Asthme, régime strict et IgE spécifiques élevés seraient des facteurs de risque
Les réactions sévères ont été définies comme étant de plus de
3 dans la classification de Sampson en 5 grades élaborée en
fonction du type de réaction et de la localisation, les plus graves
étant respiratoires, cardiovasculaires, neurologiques. Au total, 28
patients (25 %) ont eu des réactions sévères (sans décès) : 15 de
grade 3 avec des symptômes respiratoires ou digestifs, 13 de grade
4 avec des symptômes respiratoires graves ; la majorité des
réactions étaient immédiates. Les facteurs de risque avant
l’épreuve de réintroduction sont apparus être un régime strictement
sans lait (71 % vs 45 %, p = 0,02), un asthme (61 %
vs 28 %, p = 0,003) et des taux d’IgE spécifiques élevés
(médiane 28,3 vs 7,7 U /mL) mais il existait un
chevauchement important des valeurs entre les 2 groupes et pas de
corrélation avec le taux total des IgE. Les doses de lait
consommées pendant l’épreuve étaient significativement plus basses
en cas de réactions sévères. En analyse à variables multiples, les
IgEs étaient le seul facteur de risque. Cependant, les auteurs ont
établi une formule incluant l’élévation des IgEs (odds ratio :
11,61, p=0,001), le régime sans lait (OR 3,88, p=0,02) et l’asthme
(OR 3,75, p=0,02) pour prédire une réaction sévère. La formule a
une sensibilité de 86 % et une spécificité de 56 % (seuil 0,25)
mais 5 patients avec une probabilité < 25 % ont eu des réactions
sévères grade 3 pour 20 mL de lait.
Ainsi, si le régime sans lait, l’asthme et le taux des IgE
spécifiques sont des facteurs de réactions sévères lors de
l’épreuve de réintroduction, aucun d’entre eux n’est totalement
fiable.
Pr Jean-Jacques Baudon