Balance ta fresque

Toulouse, le lundi 15 janvier 2018 – Un petit groupe d’internes et d’étudiants en médecine ont protesté, jeudi dernier, contre un tableau, jugé sexiste, exposé dans la salle de garde de l’hôpital Purpan de Toulouse. Ils y ont apposé une banderole : « ceci est du harcèlement sexuel, qu’en pensez-vous ? ». Bernadette Gorin, secrétaire de l’Internat qui a témoigné auprès du journal La Dépêche et qui est intervenue pour mettre fin à ce happening, a regretté que les autorités compétentes n’aient pas été averti de cette manifestation.

En outre pour elle « la fresque fait partie de la culture carabine (…) Il ne faut pas tout mélanger (…) je trouve que Catherine Deneuve n’a pas tout à fait tort » a-t-elle estimé, faisant allusion à une tribune signée par l’actrice s’interrogeant sur les limites de la campagne « balance ton porc ».

Un symbole du sexisme ?

Deux jeunes femmes, internes dans cet hôpital, ont pour leur part expliqué, sous couvert d’anonymat, la raison de leur colère : « on vient manger tous les midi ici, devant cette fresque qui représente les dirigeants de l’hôpital, dont certains exercent toujours, avec des habits de moine, (…) aux côtés de femmes qui sont, elles, nues et présentées uniquement comme des objets de fantasme, avec des lesbiennes, des positions sexuelles... On prenait tous les jours notre café ici et on en a eu marre. Nous avons donc déployé une banderole, dans le but d’échanger avec les médecins qui déjeunent ici », elles pointent aussi d’autres fresques « représentant (…) des viols ».
Au-delà de l’anecdote elles dénoncent également le sexisme ordinaire des études de médecine, mis en lumière par une récente enquête de l’ISNI « nous sommes exposées pendant toute notre scolarité à des remarques sexistes, avec des chefs de service qui font des blagues à caractère sexuel de façon récurrente ».

Une autre interne renchérit « dans certains services, on nous appelle ma chérie, ma chatte, ou encore ma foufoune, des termes infantilisants et humiliants ».

Le début de la fin ?

Rappelons qu’en janvier 2015, déjà, une fresque d’une salle de garde de Clermont-Ferrand qui représentait Marisol Touraine harcelée par des super héros satyres défrayait la chronique et que plus récemment, le directeur de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris a fait part de son souhait que soient effacées les peintures de salle de garde trop grivoises.

Le JIM, quant à lui, avait tenté de démêler cette problématique en interviewant un interne sur cette question…mais il s’est révélé difficile de recueillir une parole franche, apaisée et à visage découvert sur ce sujet semble-t-il épineux.

Enfin il est intéressant de noter la singulière divergence des commentaires entre ceux publiés sur des sites professionnels (qui voient, pour la plupart, dans cette actualité, une atteinte à la liberté des étudiants de s’amuser) et ceux exprimés sur des sites grands publics (qui pointent, le plus souvent, une dérive à laquelle il est temps de mettre fin).

Quoi qu’on en pense, gageons que nous connaissons les dernières années d’une « tradition » qui ne s’accorde pas avec l’air du temps.

Pour découvrir la fresque litigieuse : https://www.ladepeche.fr/article/2018/01/11/2719638-fresque-sexiste-choque-plusieurs-internes-hopital-purpan.html

Frédéric Haroche

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Vos réactions (10)

  • O Tempora, O Mores

    Le 15 janvier 2018

    Certes, les temps changent, et les contemporains sont parfaitement autorisés à choisir leurs moeurs comme bon leur semble.

    Chacun est libre de préferer vivre une vie ou hommes et femmes se regardent avec suspiscion, les unes s'attendant à être agressées sexuellement, les autres à être "balancés comme des porcs" au moindre faux pas mal interprété.

    Chacun est libre aussi de mettre au mur un décor aseptisé, qui conviendra de meme façon aux étudiants en médecine, aux étudiants en lettres, aux futurs ingénieurs, etc...

    Chacun est libre de vouloir une société aseptisée ou les minorités assènent leur loi comme universelle, au nom du "respect de leur différence".

    Je pense juste qu'on va se faire ch... dans les prochaines années, que chacun sera crispé sur ses privilèges, et que vivre ensemble va être terriblement compliqué si personne ne sait plus regarder son voisin avec empathie.

    Dr EO

  • Le néosexisme victorien fait peur

    Le 21 janvier 2018

    Il faut sortir des salles de garde et ouvrir les yeux sur la réalité de la vraie vie des femmes : 60 000 femmes excisées, femmes violées, mutilées, enfants massacrés. L'égo féminin émasculateur dessert la cause des femmes. Gare au retour de bâton phallique.
    Le néosexisme victorien fait peur. La plainte signe la faiblesse, le moyen de faire perdurer la dépendance à la domination.

    Dr Isabelle Gautier

  • Le temps de la pasteurisation

    Le 21 janvier 2018

    Nous avons été élevés au lait cru, très cru dans les internats. arriverait donc, menaçant le goût du terroir. Un con ça doit sentir le con et pas sentir la violette disait l'auteur des odeurs...

    Dr J G

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