
Des auteurs australiens ont recherché dans plusieurs bases de données médicales les articles publiés en anglais depuis l’an 2000 qui rapportent une oxygénothérapie et/ou une alimentation par gavages gastriques à domicile, et/ou un télémonitorage afin d’éviter l’hospitalisation des bronchiolites (1).
Dix études évaluent l’oxygénothérapie à domicile : 2 essais randomisés, 2 études observationnelles prospectives et 6 études de révision de dossiers. Elles incluent 1 257 nourrissons distincts, âgés en général de 2-3 mois à 12 mois, qui vivaient plus souvent en haute altitude (7 études, toutes aux USA) qu’au niveau de la mer (2 études australiennes, une étude canadienne).
Etaient éligibles les patients sans antécédents d’apnées ni d’affection cardio-pulmonaire, recevant de l’oxygène à un débit de 0,5 l/min ou 1 l/min au cours d’une période d’observation de 4 h à 24 h en milieu hospitalier (Urgences, unité d’observation, service de Pédiatrie). Le seuil de la SaO2 justifiant une oxygénothérapie à domicile était < 88-90 % en altitude, < 92% au niveau de la mer. Les enfants traités à domicile ont eu un statut de patient externe aux USA, hospitalisé à domicile en Australie.
Faisable, sûre et économique
Une oxygénothérapie à domicile est faisable et sûre. Dans les études en altitude, le taux d’éligibilité des patients va de 25 % à 50 %, le taux de recours à une oxygénothérapie à domicile s’élève à environ 75 % des patients éligibles (extrêmes : 70 % à 82 %). Le taux de recours est similaire dans les études au niveau de la mer. Globalement, le taux de réadmission dans les 7 jours est de 6,3 % (79 patients sur 1 257 ; extrêmes : 2,4 % à 7,9 %), et le besoin de soins intensifs est < 1 % (3 patients sur 1 254, un seul ventilé mécaniquement). Aucun enfant traité à domicile n’est décédé.
L’oxygénothérapie à domicile paraît acceptable à la majorité des parents dans 2 études en altitude. Les parents expriment souvent des inquiétudes sur la logistique, mais, dans une étude, ils sont 88 % à déclarer qu’ils préfèreraient l’oxygène à domicile à une hospitalisation si c’était à refaire.
L’oxygénothérapie à domicile réduit les coûts hospitaliers. Les économies sont chiffrées par une étude à 1,25 journée d’hospitalisation et 4 181 dollars US par épisode, en tenant compte de l’impact de l’unité d’observation et du protocole d’oxygénothérapie. En revanche, il n’y a pas de données sur le coût des soins à domicile et le manque à gagner pour les parents (journées de travail perdues…).
Il n’a pas été trouvé d’études sur l’alimentation par gavages gastriques à domicile - à part un abstract non retenu - ni sur la télésurveillance. Ceci étant, une bronchiolite qui ne dure que quelques jours justifie-t-elle une formation à la technique des gavages gastriques ?
En conclusion, malgré l’hétérogénéité méthodologique et qualitative des articles qu’elle a analysés cette revue systématique montre que l’oxygénothérapie est faisable et sûre à domicile dans les bronchiolites, et qu’elle peut éviter d’hospitaliser des nourrissons « dans un état limite ». D’autres études sont nécessaires pour préciser la place de l’oxygénothérapie à domicile dans les bronchiolites et estimer ses coûts.
Ne pas être obnubilé par l’oxymétrie de pouls
Une approche alternative est la diminution de la durée du séjour hospitalier par l’achèvement de l’oxygénothérapie à domicile, comme cela est rapporté dans une étude multicentrique parisienne (2).
J. Lewis et coll. suggèrent qu’on peut aussi restreindre dans une certaine mesure la prescription d’oxygène dans les bronchiolites afin de réduire la durée des hospitalisations. Cela suppose de ne pas être obnubilé par l’oxymétrie de pouls. Au niveau de la mer, « un enfant avec des désaturations brèves, par ailleurs convalescent et s’alimentant bien, peut plus bénéficier d’une sortie de l’hôpital et d’un arrêt du monitorage que d’une oxygénothérapie potentiellement excessive dans le cadre d’un programme d’hospitalisation à domicile ».
Dr Jean-Marc Retbi