Paris, le samedi 22 janvier 2022 – L’urgentiste Gérald Kierzek
et l’épidémiologiste Martin Blachier sont devenus, parfois contre
leur grès, les porte-étendards des « rassuristes », au
risque d’agacer nombreux de leurs collègues.
Pour reprendre une expression chère aux commentateurs
politiques, il semble qu’il y ait désormais deux médecines
irréconciliables concernant la gestion de l’épidémie de Covid-19.
Entre les « rassuristes » et les « alarmistes »,
entre ceux qui fustigent les restrictions de liberté (qu’ils jugent
inutiles) et ceux qui les réclament, les ponts ont été coupés
depuis bien longtemps maintenant. Deux médecins ont pris la tête de
la « fronde » rassuriste et tentent de combattre le discours
alarmiste dominant. L’un, Martin Blachier, est épidémiologiste et
dirigeant de Public Health Services, une entreprise privé qui
fournit des modélisations à différents clients publics comme privés
; l’autre, Gérald Kierzek, est urgentiste à l’Hôtel Dieu et
directeur médical du site Doctissimo.
Les deux hommes ne se connaissaient pas avant la crise, mais
leurs positions iconoclastes communes, qui détonnent dans
l’ambiance pesante que nous connaissons depuis deux ans, les ont
rapprochés. « J’adore Gérald, c’est devenu un ami, il préfère
rassurer les gens que de les alarmer, c’est un point commun qu’on
a » explique le docteur Blachier aux journalistes du Parisien,
arborant fièrement une photo de l’urgentiste lui administrant une
troisième dose du vaccin contre la Covid-19.
Très critiques du gouvernement…mais proches du pouvoir
Sur les réseaux sociaux où ils sont très actifs, dans la
presse mais aussi et surtout sur les plateaux de télévision où ils
sont omniprésents (Gérarld Kierzek est chroniqueur salarié de TF1
et LCI, une chaine sur laquelle Martin Blachier est régulièrement
invité), les deux hommes ne cessent de fustiger les prises de
positions du gouvernement et de nombre de leurs collègues et de
proposer un allégement généralisé des mesures.
Dernièrement, le variant Omicron, dont la létalité est moindre
et qui pourrait contribuer à une immunité collective, donne du
grain à moudre à leurs théories. Pour Kierzek, « le variant
Omicron est une bonne nouvelle » et il est donc temps de «
lever toutes les restrictions sanitaires » affirme-t-il ce jeudi
sur Europe 1. A propos des contaminations qui atteignent des
records (jusqu’à 500 000 par jour), il estime qu’il faut arrêter le
dépistage massif. Même son de cloche du coté de son nouvel ami
Blachier, dont le cheval de bataille est la fin du protocole
sanitaire à l’école. « Quand est-ce qu’on va arrêter cette folie
? » s’insurge-t-il sur Twitter, à propos du dépistage
quasi-systématique des écoliers.
Malgré leurs critiques acerbes contre les autorités, les deux
hommes seraient étonnamment bien vus au sommet de l’Etat. Martin
Blachier n’oublie ainsi jamais d’envoyer ses analyses à l’Elysée,
même s’il dément tout lien plus étroit avec le Président de la
République. Gérald Kierzek lui, serait un proche de Brigitte
Macron. Lors de ses déjeuners avec la première dame, il
n’hésiterait pas à critiquer la politique vaccinale de son
époux.
Rassuristes contre alarmistes, deux médecines
irréconciliables
Ces prises de positions qui dérangent et cette notoriété
agacent chez les alarmistes. Et les critiques fusent. « Il doit
faire deux gardes de 4 heures par semaine dans un vaisseau
fantôme » raille le généraliste Christian Lehmann à propos du
statut d’urgentiste du docteur Kierzek. « Martin Blachier et
Gérald Kierzek sont des gens dont les paroles ont des conséquences
désastreuses, comme décrédibiliser la vaccination » s’inquiète
quant à lui Rémi Salomon. Le président de la CME de l’AP-HP ne
répond plus aux invitations de LCI, ne souhaitant plus croiser ses
deux confrères. Mais les deux hommes (et notamment Martin Blachier)
ne sont pas en reste quand il s’agit de fustiger les alarmistes. «
Si je suis divergent de Jérôme Marty, je suis peut-être aussi
divergent du concierge du coin » tacle Martin Blachier. « Elle
parle des simulations et de modélisations alors qu’elle n’en a
jamais fait » assène-t-il à propos de l’épidémiologiste
DominIque Costagliola. Pour la confraternité, on
repassera.
Pour certains, les prises de position des deux hommes ne sont
plus acceptables. La chaine d’information BFM TV, qui,
contrairement à sa rivale LCI, a choisi le camp des alarmistes,
n’invite plus Martin Blachier. Dans son dernier avis publié ce
jeudi, le Conseil scientifique (dont Costagliola est membre !) a
fustigé ces médias « qui opposent d’un coté des opinions
scientifiquement marginales, douteuses ou erronées et d’un autre
coté des avis largement partagées par les communautés
scientifiques ».
Une volonté de censure quelque peu dérangeante et qui oublie
que, en médecine comme ailleurs, le débat contradictoire est
indispensable pour faire avancer les idées et la recherche de la
vérité. « Le consensus n’est pas le monopole de la ligne
zéro-Covid défendue par les experts, en règle générale, on obtient
un consensus scientifique sur la base d’une confrontation entre
plusieurs avis » nous rappelle avec sagesse l’épidémiologiste
Alice Desbiolles. Mais il est vrai, qu’elle aussi, est une «
rassuriste ».
Tout à fait d'accord avec Martin Blachier et Gérald Kierzek
Le 22 janvier 2022
Je suis tout à fait d'accord avec Martin Blachier et Gérald Kierzek. Je préfère utiliser le terme "optimiste" que "rassuriste" qui a une connotation pour certains de politique. J'ai exprimé mon point de vue plusieurs fois dans des tribunes sur le JIM.fr en accord tout à fait avec ces deux scientifiques. Ce qui me gène le plus actuellement c'est cette folie du dépistage qui a introduit dans la population française une peur, devant des chiffres si élevé des tests +. Au début de la pandémie on nous a fait peur en annonçant le nombre de morts quotidiens (on ne parlait pas de taux d'incidence car il n'y avait pas de tests sauf dans les hôpitaux et cliniques) ; maintenant que le nombre de morts ne "fait plus peur" les médias et les autorités sanitaires nous assomment avec le fameux taux d'incidence qui est en fait un taux d'incidence des tests positifs.
Une question que je pose à Martin Blachier ; comment se fait il qu'on ne fasse pas des sondages réguliers pour le calcul des % de tests positifs ; sachant qu'on est à des chiffres de l'ordre de 20 % il faut des échantillons faibles.
Pr Dominique Baudon, Professeur du Val-De-Grâce (retraité)
Quel débat ?
Le 22 janvier 2022
Peu nous chaut le catalogage "rassuriste" et anti "alarmiste", Ce qu'il nous faut ce sont des débats aussi scientifiques que possible, avec cette note de pragmatisme apanage des médecins "de terrain", le tout orchestré par des journalistes recherchant la réponse aux vraies questions posées et non du "sensationalisme ". Si les prises de position de nos confrères sont à contre courant de la plupart des autres cela ne nous gêne pas, pourvu qu'ils argumentent correctement. Et enfin l'avis de la majorité (des médecins autorisés et s'exprimant, ce qui fait déjà matière à débat) me semble de moins en moins pertinent : on a tellement vu d'avis divergents depuis cette crise sanitaire que le consensus scientifique m'apparaît de plus en plus chimérique.