
Reims, le mardi 23 mai 2023 – Une infirmière a été tuée à coup de couteaux ce lundi au CHU de Reims par un individu atteint de troubles psychiatriques.
La terrible nouvelle est tombée ce mardi tôt dans la matinée : l’infirmière de 38 ans qui avait été agressée la veille à coups de couteau au CHU de Reims a succombée à ses blessures durant la nuit. « Je viens d’apprendre avec une immense tristesse le décès de Carène, infirmière de 38 ans violemment agressée hier au CHU de Reims. Mes pensées vont à ses proches, à ses collègues, ainsi qu’à toutes les équipes de l’hôpital endeuillées ce matin » a réagit sur Twitter François Braun. Le ministre de la Santé s’était rendu la veille à Reims où il avait dénoncé une agression « inqualifiable et inadmissible » et avait promis qu’une réunion serait organisé avec les représentants des soignants pour « mettre en œuvre très rapidement l’ensemble des mesures qui seront utiles pour préserver la sécurité et la vie des soignants ».
Le drame est survenu ce lundi dans l’après-midi dans le service de médecine du travail du CHU de Reims, lorsqu’un individu de 59 ans a attaqué à coups de couteau une infirmière ainsi qu’une secrétaire médicale de 56 ans (qui a pu être opérée avec succès). Le meurtrier a ensuite été rapidement interpellé après avoir tenté de prendre la fuite et placé en garde à vue. Une enquête pour assassinat a été ouverte.
Le meurtrier souffrait de troubles psychiatriques
Selon les premiers éléments des investigations, divulgués par le procureur de la République de Reims, Mathieu Bourette, le meurtrier présumé souffrait de troubles psychiatriques « sévères » et était placé sous curatelle renforcée. Il a d’ailleurs bénéficié en juin dernier d’un non-lieu « pour irresponsabilité pénale » après avoir été mis en examen « pour des faits de violences aggravées », une décision qui devait très prochainement être jugée en appel. Le meurtrier « semble avoir agi sans mobile apparent, d’autant qu’il n’avait pas de rendez-vous dans ce service » a expliqué le magistrat. Selon plusieurs témoins, l’individu a tenu des propos incohérents au moment de l’attaque.
La mort tragique de cette infirmière a provoqué un grand nombre de réactions de la part de représentants des soignants et de responsables politiques. A la fois maire de Reims et président de la Fédération Hospitalière de France (FHF), Arnaud Robinet a fait part de sa « profonde émotion » et de son « soutien à la communauté hospitalière ». La FHF a souligné dans un communiqué que ce meurtre s’inscrivait « dans un contexte plus général marqué ces dernières années par plusieurs faits de violence physique ou verbale dans les hôpitaux publics ».
Lamine Gharbi, président de la Fédération de l’hospitalisation privée, a lui aussi fait état d’une augmentation des agressions contre les soignants et a dénoncé « une violence en milieu de santé absolument intolérable ». Porte-parole du gouvernement et ancien ministre de la Santé, Olivier Véran a parlé de « l’un des drames les plus intenses et éprouvants qui peuvent toucher notre nation ». « On parle de quelqu’un qui a dévoué sa vie à protéger et à sauver celle des autres et qui trouve la mort de manière violente, de manière complétement incompréhensible » a commenté l’ancien neurologue.
Les agressions contre les médecins en augmentation (en apparence)
Hasard funeste du calendrier, c’est également ce mardi que le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) a publié son état des lieux annuels des incidents (violences physiques et verbales, incivilités, vol…) déclarés par les médecins. Au total, ce sont 1 244 incidents qui ont été déclarés par des médecins en 2022, un record depuis le début de ce recensement en 2003 et une augmentation de 23 % par rapport à 2021. Difficile cependant de dire si cette augmentation est réellement due à une hausse de la violence vis-à-vis des médecins, où si cela est le fruit de l’incitation faite aux médecins de signaler toutes les agressions dont ils sont victimes, même mineures.
Dans le détail, les chiffres du CNOM indiquent que les généralistes sont de loin les plus victimes d’incidents : ils constituent 71 % des victimes, alors qu’ils ne représentent que 43 % du corps médical. Parmi les spécialistes, ce sont sans surprise les psychiatres qui sont le plus souvent agressés, suivis des cardiologues, des gynécologues-obstétriciens et des médecins du travail.
Fort heureusement, les deux tiers de ces agressions sont des violences verbales (injures, menaces…) et la majorité des agressions physiques sont sans trop grande gravité. On recense tout de même 74 agressions ayant donné lieu à une interruption de travail, dont neuf qui ont causé un arrêt supérieur à une semaine. Dans un tiers des cas, l’agression est motivée par un reproche relatif à la prise en charge, un cas sur 5 par le refus du médecin de délivrer une ordonnance ou un arrêt de travail et dans 10 % des cas par un temps d’attente jugé excessif, signe d’une intolérance à la frustration chez certains de nos concitoyens. A noter que, selon les déclarations des médecins, seul 2 % des agressions sont le fait de patients souffrants de troubles psychiatriques.
Enfin, les statistiques du CNOM montrent que seulement 31 % des médecins victimes d’agressions ou de vol portent plainte et 8 % déposent une main courante. Le CNOM rappelle que les praticiens sont invités à porter plainte systématiquement lorsqu’une infraction est constituée afin d’éviter que de tels actes restent impunis.
Quentin Haroche