
La prise en compte de la douleur induite par les soins est une
priorité pour les équipes qui soignent des nouveau-nés. Cette
question est d’autant plus prégnante aujourd’hui que le nombre
d’enfants prématurés passant le cap des premières semaines de vie
extra-utero a bondi, de concert avec les progrès réalisés dans la
prise en charge des prématurés et grands prématurés. Or la
stratégie de soins pour ces enfants inclut de façon systématique
des examens douloureux. En partant de ce constat, une équipe de
recherche chinoise a procédé à une étude concernant le traitement
de la douleur du prématuré lors des prélèvements sanguins
capillaires.
Cette étude incluait 86 enfants, recrutés au sein d’une unité
de soins intensifs de néonatalogie de niveau 3 d’un centre
hospitalier universitaire chinois. Ces nouveau-nés étaient en
majorité de sexe masculin (60 %) avaient un âge gestationnel moyen
de 31,7 ± 0,9 semaines et étaient nés par césarienne dans 71 % des
cas. Leur poids moyen était de 1 732,0 ± 267,9 g et le score Apgar
moyen était de 8,8 ± 0,7 à 5 minutes. Tous étaient issus de
grossesse simple.
Ils étaient placés en couveuse, avaient déjà subi des
prélèvements capillaires depuis leur naissance et avaient un
réflexe de succion efficace.
Aucun enfant n’avait bénéficié de l’administration de
myorelaxants, analgésiques ou sédatifs dans les 24 heures
précédant le recueil de données nécessaires à l’étude.
Les 86 enfants ont été randomisés en 4 groupes distincts :
groupe contrôle (n = 21), succion (n = 22), sucrose (0,2ml/kg ;
n=21) et succion/sucrose (n =22).
Dans chaque groupe, les enfants subissaient 3 piqûres au talon
selon une procédure standardisée (pas de stimuli pendant 1 m30 ;
recueil de l’échantillon puis repos d’une minute).
L’efficacité des différentes mesures d’analgésie étudiées a
été évaluée par le PIPP *(Premature infant pain profile), la
fréquence cardiaque, l’oxymétrie et les pleurs des petits patients
pendant la procédure et lors de la phase de repos.
Score PIPP plus bas, fréquence cardiaque moindre et temps de pleurs écourté
Au final, les auteurs constatent que l’administration de
sucrose associé à la succion non-nutritive donne de meilleur
résultat dans le contrôle de la douleur chez les nouveau-nés
prématurés par rapport au sucrose seul ou la succion
seule.
Sur les 86 enfants prématurés ayant complété le
protocole, ceux du groupe sucrose et succion avaient des scores
plus favorables que les autres enfants (scores mesurés lors du
geste et lors de la phase de repos). Ainsi, le score PIPP se
situait autour de 4.4 ± 1.5 ; 3.0±0.8 (p < 0,0001), la fréquence
cardiaque était moins élevée (138,6±7,9; 137.4±4.7 ; p=0.080), le
taux de saturation en oxygène plus élevé (95.2±1.6; 96.0±1.2 ;
p=0.024), et le pourcentage de temps de pleurs plus bas (11.5±8.6;
4.6±3.4 ; p<0.0001) comparativement au groupe bénéficiant de la
succion seule (PIPP : 9.3±1.3, 6.8±1.4; FC : 154.2±9.0, 148.0±9.3;
SpO2 : 92.9±2.4,94.1±1.0; Pleurs :
44.2±9.6, 31.2±10.5 (p < 0.0001)) ou de l’administration seule
de sucrose (PIPP : 10.1±2.0, 7.4±1.6; FC : 151.6±9.6,147.9±6.9;
SpO2 : 93.5±1.7, 94.5±1.2; Pleurs :
53.8±16.7, 35.2±13.9 (p<0.0001)). Tandis que les enfants ayant
reçu les soins courants cumulaient les scores suivants : PIPP :
13.3±1.6, 10.6±1.9; FC : 156.8±7.2, 151.7±7.9;
SpO2 : 92.9±2.1, 93.8±1.6; Pleurs :
80.6±7.6, 68.2±9.9 (p < 0.0001)).
*Score obtenu par la cotation de 7 indicateurs notés
chacun de 0 à 4. Score total de 0 à 21, les scores les plus hauts
marquant une plus grande intensité douloureuse (< 6 : pas de
douleur, ≥ 6 douleur, 6-12 : douleur modérée à sévère)
Maxime Sassalle