
La mise au point de vaccins efficaces et bien tolérés contre
le SARS-CoV-2 constitue un élément fondamental pour endiguer la
pandémie Covid-19. Deux vaccins à ARN messager (ARNm), le BNT162b2
de Pfizer BioNTech et le mARN-1273 de Moderna ont été les premiers
autorisés aux USA, démontrant, dans les travaux initiaux, un taux
d’efficacité de plus de 94 % pour les infections symptomatiques,
couplé à une incidence faible d’effets secondaires notables. Mais
les essais de phase 3 ne sont pas le moyen idéal pour identifier
des pathologies iatrogènes rares ou graves. Une surveillance
secondaire s’impose donc pour confirmer la tolérance post
vaccinale, maintenir la confiance envers les vaccins et compléter
les données de santé publique.
23 pathologies ciblées
Parmi les pathologies étudiées figurent les nécroses
myocardiques aiguës, les paralysies faciales de Bell, les
thromboses des sinus veineux cérébraux, les syndromes de
Guillain-Barré, les myocardites-péricardites, les embolies
pulmonaires, les ictus cérébraux, les syndromes
thrombose-thrombocytopénie…Ont été également prises en compte les
observations d’anaphylaxie due au vaccin contre le Covid-19 ayant
nécessité un passage aux Urgences, voire une hospitalisation, selon
les critères de la Brighton Collaboration, après exclusion des
autres étiologies possibles d’allergie grave. Tous les événements
pathologiques survenus dans les 84 jours suivant la vaccination ont
été analysés, le choix d’un délai de surveillance plus prolongé
ayant été exclu, car pouvant majorer la possibilité de biais liés à
des facteurs confondants non mesurés. Plusieurs analyses
stratifiées ont été effectuées, selon les catégories d’âge,
l’origine ethnique, le lieu de vaccination et sa date. Il a aussi
été procédé à une comparaison avec des sujets non vaccinés. Enfin,
des tests séquentiels ont été réalisés toutes les semaines.
Durant les 6 mois de l’étude, il a été administré un total de
11 845 128 doses de vaccin à ARNm (6 175 811 premières doses et 5
669 315 secondes doses) à 6,2 millions d’individus. Leur âge moyen
était de 49 ans ; 54 % étaient des femmes. Globalement, la
vaccination a concerné essentiellement des personnes âgées de 18 à
49 ans (5 124 940) mais elle a couvert prioritairement les sujets
de 75 ans et plus (82,4 % avec une première dose et 79,2 % avec
seconde dose vaccinale). La vaccination a été plus fréquente chez
les Blancs et les Asiatiques.
Le nombre d’événements pathologiques signalés dans une période
de 21 jours va de 0 pour la maladie de Kawasaki à 1 059 (1 612/ 1
000 000 personnes-années) pour les accidents vasculaires cérébraux
ischémiques. Lors du suivi hebdomadaire, aucune de ces pathologies
n’a eu une incidence très différente et n’a rempli, comparativement
entre les 2 groupes étudiés, un critère de signalement avec un p
< 0,0048. Le risque Ratio (RR) ajusté varie de 0,70 (intervalle
de confiance à 95 % IC : 0,39- 1,28) pour la coagulation
intravasculaire disséminée à 2,60 (IC : 0,47- 20,60) pour le
purpura thrombotique thrombocytopénique. Parmi les pathologies les
plus fréquemment rencontrées, le RR à 0,97 (IC : 0,87- 1,08) pour
les accidents vasculaires cérébraux ischémiques, à 0,82 (IC : 0,73-
0,93) pour les appendicites, à 1,02 (IC : 0,89- 1,10) pour les
nécroses myocardiques, à 1,16 (IC : 0,80- 1,17) pour les
thrombo-embolies d’origine veineuse et à 1,00 (IC : 0,86- 1,17)
pour les paralysies faciales. Des analyses complémentaires,
incluant des comparaisons avec des sujets non vaccinés fournissent
des résultats similaires, à l’exception des
myocardites/péricardites, de survenue en règle précoce dans les 5 à
7 jours suivant la vaccination, pour lesquelles le RR est
significatif à 1,39 (CI : 1,05- 1,81).
Pas d’incidence accrue dans les 21 premiers jours sauf pour l’anaphylaxie et les myocardites/péricardites
Ainsi, au terme de cette surveillance intérimaire de plus de
11 800 000 doses de vaccins à ARNm, effectuée dans des populations
variées entre Décembre 2020 et Juin 2021, il a été impossible de
mettre en évidence une association significative entre vaccination
et incidence de 23 pathologies particulières, de survenue précoce
dans les 21 jours suivant l’acte vaccinal, et en comparaison avec
celles survenues plus tardivement, entre le
22e et le 42e jour
post vaccination. Point à noter, cette surveillance a été
hebdomadaire et a concerné des populations diverses,
géographiquement distinctes. La seule exception a été la
possibilité de cluster de myocardites/péricardites, affectant les
individus les plus jeunes, de survenue précoce, dans la première
semaine et souvent après la seconde administration de vaccin. Quant
à l’anaphylaxie post vaccin ARNm contre la COVID-19 elle a surtout
concerné des femmes et a paru plus fréquente que celle observée
après vaccination anti grippale.
Dr Pierre Margent