Covid-19 liée à des variants après vaccination, deux observations
L’émergence de variants, en particulier ceux renfermant des
mutations d’échappement immunitaire, telles E484K/Q, constitue un
réel problème dans le contrôle de la pandémie de Covid-19 à un
échelon national autant que mondial. Les variants préoccupants, les
VOC (variants of concern) sont de plus en plus traqués au
moyen de la PCR de criblage et du séquençage génomique, car ils
mettent en jeu l’avenir de la vaccination puisqu’il faudra tenir
compte de leur existence et de leur diffusion au sein de la
population sous l’effet de la pression immunitaire.
Rareté des infections chez les vaccinés
Pour l’instant, les cas d’infections par un de ces variants
survenant chez des sujets déjà vaccinés sont peu documentés, même
si une statistique étatsunienne fait état d’échecs vaccinaux
exceptionnels dont l’incidence serait de l’ordre de moins de un
pour 100 000 sans préjuger de leur cause. Ainsi, entre le
1er mai et le 1er
juin 2021, les CDC (centers for disease control and
prevention) ont répertorié 3 000 infections chez plus de
135 millions d’Américains vaccinés avec deux doses, conduisant à 2
200 hospitalisations et à 447 décès. Rien de surprenant, aucun
vaccin n’étant efficace à cent pour cent, à l’instar de toutes les
stratégies thérapeutiques utilisées en médecine, qu’elles soient
préventives ou curatives.
Une publication récente du New England Journal of Medicine
mérite à cet égard d’être rapportée car elle décrit deux cas
d’infections par le SARS-CoV-2 observés chez des femmes au sein
d’une cohorte de 417 participants, alors que la protection
vaccinale était censée être complète, plus de deux semaines
(respectivement 19 et 36 jours) après administration de la deuxième
dose du vaccin BNT162b2 (Pfizer-BioNTech) ou mRNA-1273 (Moderna).
Le diagnostic a été suspecté devant des symptômes évocateurs
quoique légers et confirmé par PCR sur prélèvement nasopharyngé
révélant une charge virale élevée dans un cas. Les taux d’anticorps
plasmatiques après la première dose témoignaient pourtant d’une
réponse immunitaire robuste.
Deux variants « of concern » identifiés dans deux
observations
La PCR de criblage et le séquençage génomique complet ont
révélé la présence de deux variants préoccupants, tous deux
porteurs de trois mutations T95I, del142-144 et D614G partagées et
associées à une mutation E484K dans un seul cas. Des variants
n’appartenant à aucun clade connu, issus peut-être d’une
recombinaison génétique entre les souches B.1.1.7 dit variant
britannique ou Alpha et B.1.526 plutôt isolé aux États-Unis, ce qui
plaiderait en faveur d’une évolution par convergence.
Les variants préoccupants peuvent être à l’origine d’un
échappement vaccinal, la preuve en est : le phénomène est marginal
à l’heure actuelle aux États-Unis, mais rien ne prouve qu’il ne
prendra pas de l’ampleur sous l’effet de la pression immunitaire
surtout si la circulation du virus, pour une raison ou pour autre,
reprenait à un rythme indésirable.
L’exemple du variant Delta au Royaume-Uni est particulièrement
édifiant. Ce sont les gènes codant pour la protéine S qui sont à
l’origine des mutations les plus inquiétantes car c’est par ce
biais que le virus peut s’amarrer plus facilement aux sites
membranaires de l’hôte ce qui lui permet d’augmenter sa
contagiosité, voire sa virulence. Cependant, le reste du génome
viral peut aussi jouer un rôle.
Quoi qu’il en soit, ces deux observations privilégiées soulignent
la problématique des variants émergents et incitent à la vigilance
chez les sujets vaccinés : la survenue d’une réinfection
symptomatique qui reste exceptionnelle doit faire rechercher un
variant en s’aidant d’une PCR de criblage, complétée par un
séquençage complet du génome viral. Ces techniques restent par
ailleurs d’actualité pour suivre à la trace les variants émergents
au sein de la population générale. La course engagée entre
l’immunisation de masse à haute vitesse et la sélection naturelle
des variants les plus aptes à se perpétuer ne peut être gagnée
qu’au prix d’une stratégie globale qui ne laisse aucun répit à la
circulation du virus.
Mutations sélectionnées, in vitro, en présence des anticorps induits par les vaccins.
Le 19 juin 2021
Puisque la pression de sélection imposée par les anticorps a conduit in vitro à l'émergence des nouveaux variants du SARS-CovV-2 (1) et que le SRAS-CoV-2 peut persister dans l'intestin après l'infection virale (2, 3), il aurait été prudent de ne pas vacciner systématiquement les personnes ayant eu une PCR ou une sérologie positive, mais proposer cette vaccination uniquement aux personnes aux antécédents d'infection SARS-COV-2 qui n'ont plus de réponses de lymphocytes T spécifiques au SARS-CoV-2 (4) ; ces tests sont déjà disponibles (5, 6).
1. Wang, Z., Schmidt, F., Weisblum, Y. et al. mRNA vaccine-elicited antibodies to SARS-CoV-2 and circulating variants. Nature 592, 616–622 (2021). https://doi.org/10.1038/s41586-021-03324-6
3. Guo, M. et al. Potential intestinal infection and faecal–oral transmission of SARS-CoV-2. Nat Rev Gastroenterol Hepatol (2021). https://doi.org/10.1038/s41575-021-00416-6
5. Ogbe, A., Kronsteiner, B., Skelly, D.T. et al. T cell assays differentiate clinical and subclinical SARS-CoV-2 infections from cross-reactive antiviral responses. Nat Commun 12, 2055 (2021). https://doi.org/10.1038/s41467-021-21856-3
6. Mouton, W. et al. A novel whole-blood stimulation assay to detect and quantify memory T-cells in COVID-19 patients. MedRxiv. doi: https://doi.org/10.1101/2021.03.11.21253202