
Valproate : des règles qui tardent à être pleinement appliquées
L’ANSM vient en effet de rendre publics les résultats d’une évaluation conduite par Sanofi Aventis France auprès de pharmacies d’officine sur l’application des règles de délivrance du valproate. Les nouvelles conditions de prescription et de délivrance (CPD) imposent en cas de prescription de valproate à une jeune fille ou une femme en âge de procréer la présentation d’un formulaire d’accord de soin et celle d’une ordonnance d’un spécialiste datant de moins d’un an. L’enquête menée entre avril et juillet 2017 auprès de 249 pharmacies (sur 1837 sollicitées) met en évidence un respect minoritaire des CPD, qui n’est constaté que dans 47 % des délivrances. Le taux de conformité est le plus faible chez les enfants (28 % pour les prescriptions concernant des filles de moins de 12 ans). Les règles sont mieux suivies en cas d’initiation du traitement (54 %) que lors du renouvellement (47 %). Il apparaît également que les préconisations sont mieux appliquées pour les spécialités indiquées dans l’épilepsie que pour celles concernant les troubles bipolaires. Des différences marquées s’observent par ailleurs en fonction des régions, avec un taux de respect bien plus faible en Ile de France (39 %) que dans le Sud-Ouest (59 %). On notera encore que le défaut de conformité des CPD n’a que trop rarement incité le pharmacien à contacter le médecin prescripteur (25 % des cas), tandis que « Dans la majorité des cas, ils ont tout de même dispensé le traitement (98 %) » refusant notamment le risque d’une rupture brutale de traitement.Aussi, bien qu’une amélioration soit constatée depuis 2016 (l’enquête précédente révélait un taux de conformité ne dépassant pas 31 %), ces résultats sont décevants, d’autant plus que « la part des initiations et des renouvellements de prescription dans les délivrances de valproate chez les filles et femmes en âge de procréer est restée stable, de même que la part des spécialités indiquées dans l’épilepsie et les troubles bipolaires ainsi que celle des différents types de prescripteurs ».
Entre onze et quatorze médicaments prescrits aux femmes enceintes en France
La trop lente évolution des pratiques témoigne probablement d’un état d’esprit spécifique aux professionnels de santé français concernant la médicamentation pendant la grossesse. A cet égard, une étude publiée dans la revue Pharmacoepidemiology and drug safety, conduite par des chercheurs français, sur la base de données concernant 28 000 femmes enceintes entre 2011 et 2014 révèle que les Françaises sont pendant leur grossesse de fortes consommatrices de médicaments. Le nombre de spécialités prescrites (qui incluent l’homéopathie et les compléments alimentaires, dont l’acide folique) varie en effet entre 11 et 14, contre une moyenne de huit aux Pays Bas, deux à sept en Allemagne et pas plus de trois aux Etats-Unis et en Europe du Nord. Les chercheurs notent par ailleurs que le « nombre de prescriptions n’a pas diminué entre 2011 et 2014 » et remarquent à propos du valproate que plusieurs milliers de femmes y ont été exposées durant leur grossesse pendant la période de l’étude. Cette situation préoccupante, d’autant que les données sur les risques tératogènes des médicaments sont loin d’être exhaustives, doit inviter à une prise de conscience des professionnels de santé, tandis qu’une meilleure information des patientes est indispensable. « Je pense que nous, médecins, avons un rôle important de suivi des femmes enceintes et donc des déclarations de tout événement lié à une prise médicamenteuse pendant la grossesse. Et puis il y a une grosse mesure d’information et de communication envers les médecins et envers les femmes, pour qu’elles soient au courant avant la grossesse » insiste sur France TV info, le docteur François Lacoin (Collège de la médecine générale, responsable du pôle médicaments).L’enquête de l’ANSM : http://ansm.sante.fr/content/download/111303/1410275/version/1/file/Enquete-Valproate-Synthese-ANSM.pdf
Aurélie Haroche