Deux académiciens fustigent la complicité de la HAS avec les « Lyme doctors »

Paris, le mercredi 1er août 2018 – La Haute Autorité de Santé a dévoilé, il y a quelques semaines, ses recommandations sur la maladie de Lyme et a reconnu l’existence d’un « syndrome persistant polymorphe après une possible piqûre de tique ». Depuis, les coups pleuvent sur l’institution. L’Académie de médecine a ainsi fustigé une HAS « voulant contenter tout le monde », avant qu’un front uni de sociétés savantes, emmenées par la SPILF (Société de pathologie infectieuse de langue française), ne réclame la réécriture du document de la HAS… Rappelons en effet, s’il en était besoin, que l’existence d’une maladie de Lyme chronique, différente de la forme tertiaire, est largement controversée et contredite par de très nombreux scientifiques.

Dans une tribune virulente publiée par le magazine L’Express, le professeur Marc Gentilini* et le professeur François Bricaire** remettent le couteau dans la plaie.

Les « Lyme doctors » : des charlatans !

Les deux académiciens s’attaquent en premier lieu à ceux que l’on a surnommé, outre-Atlantique, les Lyme doctors, qualifiés de « médecins égotiques » et accusés de prétendre « détenir la vérité au mépris de tous leurs confrères ». 

Ils pointent leur prescription, faites d’antibiothérapies prolongées « au risque de lourds effets indésirables », ou d’associations médicamenteuses « aberrantes » (antibiotiques, antifongiques,  antiparasitaires, immunomodulateurs) « relevant du charlatanisme ». 

Pour eux, « les quelques améliorations signalées lors de ces cures au long cours, sont le plus souvent éphémères ou relèvent d'un effet placebo ou bien encore... du temps qui passe ! ».

Ils plaignent également les patients « trompés par leurs gourous mystificateurs (…) abusés, exploités, regroupés dans le cadre d'associations dites de défense des malades, sans réelle représentation », que l’on inciterait « à invectiver et menacer les médecins qui mettraient en doute le diagnostic affirmé par un Lyme doctor ».

La voix de la science est devenue inaudible

Plus généralement, les auteurs de ce texte s’alarment que « devant l'abondance de fausses nouvelles, diffusées sur des réseaux sociaux » (…) la voix de la science, de la clinique, du bon sens, soit devenue inaudible ». Ils constatent que la « contestation de la science, doublée du fantasme de complotisme, devient la règle. Le retour à l'empirisme, difficile à conjurer, doit être dénoncé d'autant plus ardemment que, derrière d’inadmissibles pressions sur les pouvoirs publics, avec menace de judiciarisation, rode l'argent compensateur exigé de l’État pour un "préjudice" fantasmatique" ». 

En outre, ils estiment que « les accusations violentes à l'encontre du corps médical, en général, et des infectiologies en particulier, qui ne seraient composés que « d'incompétents incapables d'écoute », relèvent de la diffamation et des tribunaux ».

Quand la HAS se fait complice

Les deux signataires pointent enfin l’attitude des pouvoirs publics qui ont décidé d’adopter, par la voix de la HAS, une position « politiquement correcte (…) hautement préjudiciable aux malades ».

Ils accusent même la HAS, de se rendre « complice de groupuscules dangereux en quête de faire-valoir pour les uns, d'argent sale pour les autres ou les deux à la fois. Aucune entité, fut-elle la haute Autorité de Santé (HAS), ne peut se dérober à une prise de position claire et sans ambiguïté ou visant par facilité ou complaisance à vouloir plaire à tout le monde, pour finalement ne satisfaire personne. Entendre et comprendre la plainte des patients ne peut aboutir à des plans nationaux inadaptés, qui relèveraient d'un opportunisme politique au détriment d'une réponse scientifique et serait une insulte à tous les acteurs, chercheurs ou décideurs responsables ».

* Président honoraire de l'Académie nationale de médecine
** Membre de l'Académie nationale de médecine

Frédéric Haroche

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Vos réactions (16)

  • Maladie de Lyme

    Le 01 août 2018

    Entièrement d'accord avec cet article démontrant encore et encore que l'HAS n'est pas infaillible ni toute puissante.

    Dr Pascal Pozzi

  • HAS ET LYME

    Le 01 août 2018

    YES, ENFIN DU BON SENS DONT ON MANQUE CRUELLEMENT EN FRANCE DANS BEAUCOUP TROP DE DOMAINES.
    BRAVO A CES DEUX ACADEMICIENS QUI SONT DE VRAIS SAGES.

    Dr Max Gibert

  • Salutaire

    Le 01 août 2018

    La tribune des Pr François Bricaire et Marc Gentilini est salutaire.
    La France avec la position de la HAS fait figure d’exception au plan international. Ce n'est pas glorieux.
    Au Canada, les mises en garde très récemment rappelées sont claires : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1115627/maladie-de-lyme-attention-aux-cliniques-alternatives-previent-la-sante-publique?

    Jean-Paul Krivine

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