Le samedi 21 mars 2020 - « Si la peste donnait des
pensions, elle trouverait encore des flatteurs et des
serviteurs ». C’est sur cette citation du poète perse Saadi que
les auteurs du « Dictionnaire des girouettes* » débutaient
leur ouvrage en 1815. L’objectif du livre était de recenser les
noms de ceux « qui ont bien mérité de la société des
girouettes », c’est-à-dire tous ceux qui, en ces temps troublés
de double restauration, n’avaient pas hésité à embrasser coup sur
coup tous les courants politiques même les plus opposés.
Deux siècles plus tard, nos hommes politiques, nos
intellectuels (et même nos médecins !) ont toujours la même
capacité à se contredire du jour au lendemain avec une mauvaise foi
confondante. En ces temps d’épidémie où les évènements se
bousculent et où la situation évolue d’heure en heure, cette
capacité à dire tout et son contraire avec toujours la même
conviction et parfois la même arrogance est particulièrement
mobilisée.
Le JIM vous offre aujourd’hui bien modestement une ébauche de
dictionnaire des girouettes du coronavirus.
Jean-Michel Blanquer
« Il n’y aura pas de fermeture généralisée des écoles en France
comme on a pu le voir dans d’autres pays d’Europe » (12 mars au
matin).
« Les écoles resteront fermés au moins jusqu’aux vacances de
printemps » (13 mars au matin).
On pardonnera ici le ministre qui a été trompé par la
girouette en chef.
Agnès Buzyn
« Le risque d’importation du virus depuis Wuhan est
pratiquement nul (…) le risque de propagation est très faible »
(24 janvier).
« Quand j’ai quitté le ministère, je savais que la vague du
tsunami était devant nous » (17 mars).
Un cas particulièrement intéressant, puisque la girouette
reconnait elle-même qu’elle ne disait pas la vérité lors de sa
première déclaration…sauf si elle ment lors de la seconde
!
Eric Coquerel (député LFI)
« Ce n’est pas plus problématique d’aller voter que d’aller
travailler » (10 mars).
« Je ne comprends définitivement pas que les élections
municipales ne soient pas reportées » (14 mars).
Un député insoumis n’a qu’une seule règle : toujours critiquer
le gouvernement, quoi qu’il en coûte.
Pr Philippe Juvin
« Il ne faut pas céder à cette « corona panique », marteler que,
probablement dans plus de 99 % des cas, on guérit de la maladie (…)
Annuler les élections serait incompréhensible » (8 mars).
« On voit la vague arriver (…) il n’y a pas dix solutions,
il n’y en a qu’une, il faut confiner la population » (16
mars).
Philippe Juvin n’est pas que médecin, il est aussi homme
politique, d’où sa maitrise du changement de pied.
Sibeth Ndiaye (porte-parole du gouvernement)
« L’Italie a pris des mesures qui n’ont pas permis
d’enrayer l’épidémie » (12 mars).
« Les rumeurs de confinement total sont des fakes news » (16
mars, quelques heures avant que la girouette en chef ne décrète le
confinement innominé).
« C’est assez probable que nous soyons obligés de prolonger
le confinement » (20 mars).
Pas très étonnant de la part d’une personne qui avait dit
assumer mentir pour protéger la girouette en chef.
Emmanuel M. et son épouse
« N’en déplaise à certains, le virus ne connait pas ces
limites administratives » (27 février, à propos de la fermeture
des frontières).
« Les frontières de l’espace Schengen seront fermés pendant
trente jours » (16 mars).
Entre temps, le virus a perdu son passeport.
« La vie continue, il n’y a aucune raison de modifier nos
habitudes de sortie » (13 mars, après s’être rendu au théâtre
avec son épouse)
Le Parisien du 15 mars : « La Première dame s’est promenée sur
les quais de Seine avec ses gardes du corps, stupéfaite d’y croiser
autant de monde » (girouette instantanée !).
« Quand je vois que des gens continuent à aller au parc,
c’est qu’ils n’ont pas compris les messages (…) les Français
prennent ça à la légère » (19 mars).
Que voulez-vous Monsieur le Président, nous sommes des gaulois
réfractaires !
Edouard P.
« Beaucoup d’idées qui paraissent simples sont en réalité
simplistes et inefficaces » (27 février, à propos de la
fermeture des frontières).
« Il peut y avoir du sens à faire des contrôles sanitaires aux
frontières » (17 mars).
« La simplicité est la sophistication suprême » disait
Léonard de Vinci
Donald Trump
« Nous contrôlons totalement la situation. Tout est sous
contrôle » (22 janvier).
« Beaucoup de gens pensent que le virus disparaitra avec le
retour de la chaleur en avril » (10 février).
« Le coronavirus est la nouvelle invention des démocrates »
(28 février).
« Je savais que c’était une pandémie bien avant qu’on parle
de pandémie (17 mars).
Un dictionnaire des girouettes ne pouvait pas se passer d’un
menteur de la trempe du Président Trump.
Ce petit exercice n’avait évidemment pas pour but d’accabler
nos dirigeants et scientifiques (que ferions nous sans eux), ni de
souligner leur mauvaise foi (il nous arrive aussi d’en faire
preuve) mais seulement de sourire un peu en ces temps
difficiles.
A la vitesse à laquelle vont les évènements, un second tome
n’est pas à exclure.
*Le Dictionnaire des girouettes a été publié par des
auteurs anonymes en 1815 (plusieurs éditions, avant et après les
deux Restaurations).
Merci de ce florilège distrayant et réconfortant. Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis dit-on, que de turbo-intelligences adaptative donc. Heureusement que, dans un beau mouvement de compassion déontologique sans doute, vous avez épargnés les médecins-médias, il y en a toute une troupe qui court les plateaux, bêlant les poncifs de l'heure, et il y en a 24 chaque jour, que de changements, quel répertoire.
La vérité m’oblige cependant à noter que en mon for intérieur, j'ai aussi mille fois vacillé, tant comprendre ce qui se déroule est difficile et délicat, puisque nous sommes tributaires de l'information-communication qui nous nourrit.
Dr Gilles Bouquerel
Et l'inénarrable Salomon
Le 07 avril 2020
Vous avez oublié (ou épargné?) dans votre florilège l'inénarrable Salomon, très bon pour égrener lugubrement le décompte des morts et des blessés, voire des déserteurs, mais qui ne devrait pas sortir de ce rôle (sutor, ne supra crepidam).
Ce praticien, qui a déjà à son palmarès d'avoir conseillé Marisol Touraine quand elle a bradé notre stock de masques, a eu le mérite d'être cohérent avec lui-même en proclamant avec aplomb que les masques (auxquels il semble que l'on puisse imputer la sous-mortalité observée à Hong-Kong ou à Taiwan) étaient inutiles, voire dangereux, avant de perdre sa cohérence en nous annonçant qu'ils seraient nécessaires dès qu'ils seraient disponibles, voire obligatoires sous peine de verbalisations.
Il me paraîtrait normal que Marisol, et son staff composé de MM. Griveaux, Attal et Salomon, soient auditionnés par une cour de justice indépendante dans un proche (?) avenir.
Les déclarations contradictoires (du jour au lendemain) prêterait à rire dans d'autres circonstances, n'en retenons que l'hommage à nos héros.