Echappement vaccinal après une double dose de BNT162b2 : qui sont les infortunés ?

Alors que la quatrième vague de l’épidémie de Covid-19 prend forme et gagne en puissance dans la plupart des pays du monde, il apparaît clairement que la vaccination de masse est une des armes les plus efficaces pour sortir du cauchemar et mettre un holà à la valse des mutants. L’efficacité des vaccins disponibles est > 70 % pour la plupart d’entre eux face au risque d’infection par le SARS-CoV-2, toutes formes symptomatiques confondues. La prévention des formes graves ou létales semble être assurée à plus de 85 % par tous les vaccins agrées en Amérique du nord et dans l’Union européenne. Cependant, les vaccins à ARNm font mieux que les autres avec une efficacité globale proche de 95 %, dans les essais randomisés comme dans le monde réel et le variant Delta ne semble pas plus faire exception que ses prédécesseurs.

Un échappement vaccinal actuellement rare

Cependant, une minorité de sujets – de 4 à 6 % pour ce qui est des formes symptomatiques plus ou moins sévères, selon les statistiques de divers pays- vaccinés va développer une infection par le SARS-CoV-2. Pour parler d’échappement vaccinal stricto sensu, il faut que l’infection survienne au moins deux semaines après l’administration de la deuxième dose d’un vaccin à ARNm. Rien de surprenant, puisqu’il n’a jamais été clamé que l’efficacité vaccinale était de 100 %. Plusieurs questions légitimes se posent néanmoins : qui sont ces infortunés, victimes d’un échappement vaccinal ? Quel est leur profil démographique et clinique ? Quel est le pronostic de la Covid-19 dans ce cas précis, notamment quand une hospitalisation est nécessaire ?

Une étude de cohorte rétrospective sur 153 des 397 hospitalisations (pour 5,4 millions de vaccinations)

Une étude de cohorte rétrospective multicentrique réalisée en Israël apporte des éléments de réponse. Dix-sept établissements hospitaliers y ont participé. Pour mémoire, la campagne de vaccination massive a débuté dans ce pays le 19/12/2020 et au 20/05/2021, plus de 5,4 millions d’Israéliens avaient reçu les deux doses du vaccin, ce qui représentait une couverture vaccinale de 55 % pour l’ensemble de la population et de 88 % pour les plus de 50 ans. Selon le Ministère de la santé du pays, le nombre de patients hospitalisés pour Covid-19 biologiquement prouvé en dépit d’une vaccination complète s’est élevé au total à 397, dont 234 formes sévères et 90 décès : des chiffres qui donnent une idée de leur extrême rareté (moins de 10-4).

Au total, l’analyse des données de l’étude rétrospective précédemment évoquée a porté sur 152 patients (âge médian 71,1 ans ; extrêmes 22-98), le plus souvent de sexe masculin (70 %). Tous ont tous été atteints d’une forme symptomatique de Covid-19 nécessitant une hospitalisation, plus de sept jours après l’administration de la deuxième dose du vaccin BNT162b2 (Pfizer/BioNTech), le seul utilisé dans ce pays. Cette cohorte représente de fait près de la moitié des patients hospitalisés en Israël pour une infection dans les suites d’une vaccination complète.

Un pronostic médiocre qui est le même de celui des non vaccinés

Le pronostic s’est avéré médiocre chez 38 patients et la mortalité a été estimée à 22 % (34/152). Des comorbidités volontiers associées ont été retrouvées chez la plupart des intéressés : hypertension artérielle (71 %), diabète (48 %), insuffisance cardiaque (27 %), insuffisance respiratoire chronique (24 %), maladies respiratoires chroniques (24 %), démence (19 %) ou encore cancers (24 %). L’absence de toute comorbidité n’a concerné que six participants (3,5 %).

Près d’une fois sur deux (n=60, 40 %), il existait un déficit immunitaire évident soit intrinsèque soit iatrogène. Une charge virale élevée à l’état basal a été associée à un pronostic défavorable, mais deux autres facteurs de risque potentiels méritent d’être mentionnés, même si le seuil de signification statistique n’est pas atteint compte tenu de la faiblesse de l’effectif : le fait de recevoir un traitement comportant un anticorps monoclonal du type anti-CD20 (rituximab) souvent utilisé dans certains lymphomes, d’une part, des taux plasmatiques d’anticorps IgG anti-spike, d’autre part.

Les infections sévères par le SARS-CoV-2 qui surviennent plus de sept jours après une vaccination complète, celles qui nécessitent une hospitalisation, ne concernent qu’une infime minorité des sujets vaccinés. Elles sont favorisées par les comorbidités et les déficits immunitaires, tout en exposant à une lourde morbi-mortalité qui est celle des non-vaccinés : cette population vulnérable mérite d’être mieux caractérisés par d’autres études comparables pour renforcer leur protection soit par le maintien de la distanciation physique, du port du masque ou encore d’autres stratégies vaccinales plus protectrices, aussi bien actives que passives.

Dr Philippe Tellier

Référence
Tal Brosh-Nissimov et coll. BNT162b2 vaccine breakthrough: clinical characteristics of 152 fully-vaccinated hospitalized COVID-19 patients in Israel. Clin Microbiol Infect. 2021 (7 Juillet) : publication avancée en ligne. doi: 10.1016/j.cmi.2021.06.036.

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Vos réactions (3)

  • COVID chez les vaccinés

    Le 26 juillet 2021

    Tiens c'est bizarre, on nous avait dit que le vaccin évitait les formes graves...
    C'est une étude déjà dépassée puisque ne tenant pas compte du variant Delta qui brouille les cartes. Il n'y a qu'à voir les statistiques en Grande Bretagne.
    Rigolo quand même de voir que l'efficacité des vaccins est évaluée entre 30 et 99 % selon les études... Vous dites 95% dans le monde réel ? Vous êtes sérieux ? Et comment vous pouvez affirmer que la vaccination de masse est seule capable de "mettre un Hola à la valse des mutants" ? Ça semble plutôt être le contraire, et c'est très bien comme ça car plus il y a de mutants et moins ils sont pathogènes. Ils augmentent simplement le nombre de "cas", comme vous le savez puisque c'est dit quotidiennement à la télé.

    Dr Franck Boutault

  • Efficacité du vaccin

    Le 26 juillet 2021

    Vous nous indiquez que l’efficacité des vaccins disponibles est > 70 % pour la plupart d’entre eux face au risque d’infection par le SARS-CoV-2, toutes formes symptomatiques confondues. Or de nouveaux chiffres publiés par le ministère israélien de la Santé affirment que le vaccin contre le coronavirus n'est efficace qu'à 39% pour prévenir la transmission du coronavirus, (mais à plus de 91 % pour prévenir des cas graves.).

    Isidor Neuhof (pharmacien)

  • Parce qu'immunodéprimés, parce que co morbidités

    Le 14 août 2021

    Il est visiblement jugé presque normal qu'il y ait un échappement vaccinal pour des personnes ayant été vaccinées alors qu'immunodéprimées ou atteintes de comorbidités mais n'était-ce pas l'argument de vente desdits "vaccins" qui devaient sauver la race humaine et les personnes fragiles en particulier ?

    Quelle est donc la logique dite vaccinale si l'on tempère ainsi ? Autant soigner des personnes saines et n'instruire que des personnes instruites... et voilà le tour est joué on a 100% de réussite !

    Hélène d'Agostino (IDE)

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