
Paris, le vendredi 21 juin 2019 - La semaine dernière, le
ministre de la Santé, Agnès Buzyn s’est exprimée sans détour au
sujet des risques associés aux régimes excluant tout aliment
d’origine animale chez l’enfant. « Le véganisme expose
effectivement à certaines carences notamment chez les enfants. Je
le dis, les enfants ont besoin de protéines pour grandir, mais ils
ont aussi besoin de protéines aussi essentielles [sic], celles que
l’on ne trouve pas dans les végétaux. Et donc attention au
véganisme. Il peut y avoir des fiches techniques qui expliquent les
régimes équilibrés mais ces fiches, elles sont faites pour les
adultes. Pour les enfants je commence à avoir des alertes sur des
situations de carence grave chez l’enfant » a insisté le
ministre sur C News.
Bien-être animal
Cette prise de position a été qualifiée de « courageuse
» à l’instar d’autres déclarations du ministre concernant la santé
de l’enfant par le Professeur Patrick Tounian (chef du service de
nutrition et gastroentérologie pédiatriques à l’Hôpital Trousseau)
à l’occasion d’une conférence (en partenariat avec le Centre
national interprofessionnel de l’économie laitière) dédiée aux
comportements alimentaires particuliers chez l’enfant et
l’adolescent, organisée en marge du congrès de la Société française
de pédiatrie qu’il préside. Le spécialiste a témoigné observer dans
sa consultation la progression chez les enfants et les adolescents
d’une forte préoccupation concernant l’écologie et plus encore le
bien-être animal qui les oriente vers des régimes végétariens et
végétaliens.
Régime végétalien : totalement inadapté chez les nourrissons
Chez les nourrissons, les régimes végétaliens exposent à des
carences graves et potentiellement mortelles, ce qui suppose une
contre-indication totale (dans les cas où les familles ne
parviennent pas à être raisonnées des signalements pour
maltraitance sont inévitables et sont même parfois réalisés
automatiquement par certains services). Les familles doivent être
alertées des risques majeurs auxquels les nourrissons sont ainsi
exposés. A cet égard, le professeur Tounian a évoqué des cas
particulièrement évocateurs : ainsi la supplémentation des mères
végétaliennes allaitantes en vitamine B12 ne permet nullement de
garantir que les enfants reçoivent des apports suffisants, la
transmission des vitamines apportées par les compléments n’étant
pas assurée.
Accompagnement
Chez les enfants plus âgés et plus encore les adolescents, la
poursuite d’un régime végétalien paraît devoir être déconseillée.
Cependant, l’affrontement est contre-productif et comme l’a rappelé
le professeur Tounian, le rôle du médecin, même s’il peut
personnellement désapprouver certains comportements, est
d’accompagner les patients afin de limiter le plus possible les
complications et non d’émettre un jugement. C’est dans cette
optique que la Société française de pédiatrie doit présenter très
prochainement des recommandations sur la prise en charge des
enfants et adolescents suivant un régime excluant les produits
d’origine animale.
Quasiment impossible de satisfaire ses besoins en calcium sans consommer de produits laitiers
La supplémentation en fer (après dosage de la ferritine)
s’impose ainsi que celle en calcium, vitamine D, vitamine B12 et
DHA (par des micros algues).
Concernant le fer, on ne retrouve pas dans les études menées
chez les adultes de taux de fer très différents entre les
consommateurs de régimes carnés et ceux excluant les produits
animaux. Cependant, cette situation s’explique possiblement,
observe le professeur Tounian, par le fait que les végétaliens qui
parviennent à faire perdurer ce régime présentent une meilleure
absorption du fer, ce qui leur permet d’éviter de ressentir les
effets d’une carence en fer, qui ne manque pas de s’installer
rapidement chez les autres. De fait, même si de nombreux végétaux
contiennent du fer, l’absorption de ce dernier diffère
considérablement en fonction de la source et est bien plus élevée
avec la viande.
Concernant le calcium, les spécialistes insistent sur le fait
que même si certains légumes (tels les brocolis) présentent un
calcium mieux absorbé que celui des produits laitiers, ils sont
loin de faire partie des mets privilégiés par les adolescents et
les adolescents. Ainsi, semble-t-il totalement utopique d’espérer
assurer ses besoins en calcium si on ne mange pas de produits
laitiers ; confirmant la nécessité d’une supplémentation, notamment
chez les adolescents (les adultes végétaliens ont comme l’ont mis
en évidence différents travaux un risque fracturaire augmenté).
S’agissant de la vitamine B12, la complémentation apparaît
également « indispensable », compte tenu de sa quasi absence
en dehors du monde animal.
Une alimentation des enfants et adolescents de moins en moins variée
Aurélie Haroche