
Arbovirose la plus répandue, la dengue est présente en zone
intertropicale dans plus de 100 pays. Elle connait une progression
exponentielle du nombre de cas et une extension géographique
inexorable. En 2013, on estimait que 40 à 50 % de la population
mondiale vivait en zone à risque (présence du vecteur Aedes). Avec
annuellement 390 millions d’infections, 96 millions de formes
symptomatiques dont 500 000 hospitalisations et 20 000 décès, elle
représente un coût économique et social majeur et constitue une
menace croissante pour la santé et la sécurité transfusionnelle. Le
virus possède 4 sérotypes DENV-1 à 4. L’infection immunise contre
le sérotype responsable (mais pas contre les autres) d’où la
possibilité d’une nouvelle infection par un sérotype
différent.
Pour rappel, la dengue « classique » se caractérise après 2 à
7 jours d’incubation par l’apparition d’une forte fièvre souvent
accompagnée de maux de tête, de nausées, de vomissements, de
douleurs articulaires et musculaires et d’une éruption cutanée
ressemblant à celle de la rougeole. Au bout de 3 à 4 jours, une
brève rémission est observée. Puis les symptômes s’intensifient et
des hémorragies conjonctivales, des saignements de nez ou des
ecchymoses peuvent survenir avant de régresser rapidement au bout
d’une semaine. La dengue classique, bien que fort invalidante,
n’est pas considérée comme une maladie sévère comme l’est la dengue
hémorragique qui représente environ 1% des cas de dengue dans le
monde.
La Réunion compte 850 000 habitants et connait des périodes
d’épidémies parfois massives (en 1977-1978) et de transmission
sporadique (2005-2015). Dernièrement, une modification de
l’épidémiologie est intervenue : la transmission s’est poursuivie
pour la 1ère fois pendant l’hiver austral 2017-18, ce qui a
conduit à une explosion épidémique. Ainsi, 97 cas ont été confirmés
en 2017 contre 6 667 à sérotype 2 en 2018 (et 25 000 cas
cliniquement évocateurs), 148 hospitalisations (dont 24 cas sévères
et 6 décès).
Quelle va être l’évolution de la dengue en 2019 et peut-on
anticiper une 2ème vague épidémique ? La
population reste peu immunisée et les facteurs climatiques (hiver
2018 anormalement chaud) sont propices à la transmission.
Santé Publique France a sollicité l’Unité de Modélisation
Mathématique des Maladies Infectieuses de l’Institut Pasteur.
Différents modèles ont été testé, considérant les températures, les
précipitations, le taux de détection, l’intervalle
intergénérationnel et l’immunité dans la population. Tous prédisent
que la seconde vague sera plus importante que la première.
Dr Muriel Macé