Etude suspendue par l’ANSM : les voies de la pharmacologie sont impénétrables

Paris, le vendredi 20 septembre 2019 - L’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) annonce l’interdiction immédiate d’un essai clinique illégal conduit par le Fonds Josefa, une association fondée par les professeurs Fourtillan* et Joyeux. 

L’étude, mise en œuvre dans les locaux d’une abbaye (!), consistait à administrer, par voix transdermique, à des patients atteints des maladies de Parkinson, d’Alzheimer ou de pathologies mentales, de la 6-méthoxy-harmalan et de la Valentonine, une hormone qui aurait été identifiée par le Pr Fourtillan, dérivée de la mélatonine et présentée par ce dernier comme la « véritable » hormone du sommeil.

Même si elle a été l’objet d’une courte communication à l’Académie de pharmacie en 2015, la Valentonine n’a jamais été présentée dans une publication médicale internationale à comité de lecture.
 
Le Fonds Josefa (dont le nom rend hommage à la religieuse Maria Josefa Menéndez)  explique sur son site le protocole de ces travaux : « le rôle des patchs mixtes est de renforcer une sécrétion physiologique des deux hormones, la Valentonine et le 6-Méthoxy-Harmalan, insuffisante. Ils doivent donc être appliqués en même temps que la sécrétion pinéale nocturne des deux hormones, qui dure 8 heures; c’est à dire entre 22h et 6h du matin, au moins ».

Valentonine : une découverte mystique

Plus qu’une découverte scientifique, la Valentonine est présentée par le professeur Fourtillan comme une révélation divine « dévoilée » « un beau jour du mois d’avril 1994 ». Le Pr Fourtillan estime par ailleurs que lorsque la communauté scientifique internationale voudra bien reconnaître cette avancé majeure elle sera dans l’obligation de « reconnaître l’Œuvre  de Dieu [qui] en nous expliquant très précisément cette partie charnière du mystère de la Vie (…) vient nous préciser non seulement comment fonctionne notre organisme, mais aussi, et surtout, comment prévenir et guérir les dysfonctionnements du système Veille-Sommeil à l’origine des si nombreuses et fréquentes affections neurologiques ».

L’inspecteur de l’ANSM à l’origine des mesures imposées contre l’étude illicite, le Dr Bernard Celli, est loin d’être sensible à cet argumentaire mystique. Pour lui, il s’agit « d’une atteinte grave au code de la santé publique et au code pénal (…). On est aux confins du charlatanisme » tranche-t-il.

Autre élément qui suggère le lien entre cette affaire et une dérive de type sectaire, le Pr Philippe Damier du CHU de Lyon rapporte que les patients devaient faire un don au Fonds Josefa pour pouvoir participer à cet essai, devaient promettre de ne rien dire à leur neurologue habituel et enfin arrêter leurs traitements.

Sur son site, le fonds Josefa promettait « au cours du quatrième trimestre 2019, avec les laboratoires pharmaceutiques que nous aurons choisis pour partenaires, nous demanderons une Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU), puis une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), afin de mettre très rapidement ces traitements à la disposition des malades ».

Peu de chance que cette prière soit exaucée.

*ancien professeur de pharmacologie à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de l’Université de Poitiers

F.H.

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Vos réactions (9)

  • Prière

    Le 20 septembre 2019

    A la base, le motif de l'étude n'est pas stupide et rien n'interdit à un médecin d'être mystique. Toutefois, de nos jours, le travail de recherche est interdit sauf si l'on suit les voies officielles de la divine ANSM; il serait quand même bon de recueillir au passage le ressenti des participants. Imaginez qu'ils se sentent mieux... Les voies du Seigneur sont impénétrables.

    Dr Bernard Albouy

  • Essai Joyeux & Co

    Le 20 septembre 2019

    Tout à fait d'accord avec le titre et le fond : il y a là un scandale répréhensible.

    Dr Xavier Marchandise


  • D'autres études à haut risque de biais

    Le 21 septembre 2019

    Bien sûr que l'ANSM joue ici pleinement son rôle.
    En revanche on aimerait qu'elle le joue tout autant sur d'autres études, lorsqu'on sait que près de la moitié des essais dans le cancer sont à haut risque de biais, selon BMJ https://www.bmj.com/content/366/bmj.l5221

    Dans d'autres domaines, comme pour l'étude européenne mypebs sur un dépistage individuel du cancer du sein, la méthodologie et le design sont tout aussi défaillants, et l'étude néanmoins lancée. Lire : https://cancer-rose.fr/my-pebs/2019/02/25/presentation-simplifiee-du-probleme-que-pose-la-methodologie-de-mypebs/

    Dr Céline Bour

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