
Ils ne décollèrent pas. Depuis que, le 25 septembre dernier,
le gouvernement a annoncé vouloir mettre en œuvre une promesse de
campagne d’Emmanuel Macron et créer une quatrième année d’internat
de médecine générale en zone sous-dense, les internes multiplient
manifestations et grèves. L’exécutif a beau assurer que les futurs
médecins ne seraient qu’incités à se rendre dans un désert médical
lors de cette année professionnalisante et non pas obligés, les
internes dénoncent une politique déguisée de coercition et
d’exploitation.
Durant le week-end de la Toussaint, les internes ont ainsi
mené une grève dure particulièrement suivie et les principaux
syndicats appellent à une nouvelle grève le 18 novembre prochain.
Une mobilisation qui n’a pas empêché que la réforme, insérée dans
le projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS),
soit adoptée par l’Assemblée Nationale en première lecture, il est
vrai grâce à la procédure particulière du 49.3.
Infirmiers et pharmaciens favorables à cette réforme de l’internat de médecine générale
Pour le gouvernement, cette nouvelle année d’internat pour les
futurs généralistes, outre qu’elle permet de mettre la médecine
générale au même niveau que les autres spécialités, constitue un
outil contre la désertification médicale. L’argument ne semble pas
avoir convaincu les lecteurs du JIM.

Sondage réalisé sur JIM.fr du 18 octobre au
7 novembre 2022
Selon un sondage réalisé sur notre site du 18 octobre au 4
novembre, 55 % des professionnels de santé (lecteurs du JIM) sont
défavorables à la création d’une quatrième année d’internat à
accomplir en zone sous-dense. Parmi les 42 % de nos lecteurs qui
voient d’un bon-œil le projet du gouvernement, ils sont 24 % à
préférer laisser la liberté aux internes de choisir leur lieu de
stage, quand 18 % sont prêts à opter pour la coercition, en
imposant le lieu d’exercice.
L’analyse détaillée de notre sondage montre une véritable
fracture entre les infirmiers et pharmaciens d’un coté et les
médecins de l’autre. Les premiers, qui subissent des limites à leur
droit l’installation depuis plusieurs années, sont plutôt
enthousiastes à l’idée de voir des médecins en herbe se rendre dans
nos « déserts » médicaux: 59 % des infirmiers et 54 % des
pharmaciens sont favorables à l’article 23 du PLFSS. Ils sont même
27 % parmi les infirmiers et les officiaux à vouloir imposer aux
internes le choix de leur lieu de stage.
Position totalement opposée chez les médecins où l’on reste
visiblement attachée à la liberté d’installation : 58 % d’entre eux
sont opposés à la création de cette quatrième année
d’internat.
Une fracture générationnelle chez les lecteurs du JIM
On entend souvent que le débat sur cette quatrième année
d’internat est le reflet d’une fracture générationnelle, entre des
médecins seniors nostalgiques d’une dévotion totale du praticien à
sa profession et des jeunes soignants qui souhaitent pouvoir
concilier vie professionnelle et vie personnelle. Les prises de
position récentes en faveur de la réforme de la part de l’Académie
de médecine (où la moyenne d’âge demeure élevée) et de la
conférence des doyens ont renforcé cette impression.
Un conflit des anciens et des modernes qui semble se dessiner
également chez nos lecteurs. Le rejet du projet gouvernemental est
ainsi majoritaire à la fois chez les médecins de moins de 50 ans
(54 %) et ceux âgés de 50 à 69 ans (69 %). En revanche, 55 % de nos
lecteurs médecins de plus de 70 ans sont favorables à la création
d’une quatrième année d’internat de médecine générale en zone
sous-dense.
Mais peut être que ces derniers, pour la plupart à la
retraite, réfléchissent désormais plus en tant que patients que
comme praticiens !
Grégoire Griffard