
Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est un
dysfonctionnement endocrinien et métabolique très fréquent. Il
toucherait en effet, selon les critères de Rotterdam, 15 % de la
population féminine. Le SOPK est associé au surpoids, l’obésité, la
résistance à l’insuline. Les femmes enceintes lorsqu’elles
parviennent à passer l’obstacle d’une dysovulation sont exposées à
divers risques : perte fœtale, diabète gestationnel, accouchement
prématuré, prééclampsie. La metformine a été proposée d’une part
pour le traitement de la dysovulation (sujet débattu) mais aussi
pour, dans certains pays, prendre en charge le diabète
gestationnel.
On manque d’études importantes sur l’évolution du profil des
androgènes au cours de la grossesse des patientes atteintes de
SOPK. La metformine en dehors de la grossesse diminue modérément
les androgènes circulants. Qu’en est-il chez la femme enceinte dans
ce contexte ?
Étude multicentrique sur des femmes norvégiennes
Pour répondre à cette question, nous disposons de l’analyse
d’une étude multicentrique contre placebo avec un groupe contrôle
sans SOPK, effectuée sur une population de femmes
norvégiennes.
L’objectif de cette étude était donc d’évaluer l’effet
potentiel de la metformine sur l’évolution du niveau des androgènes
chez la femme enceinte avec SOPK. Les participantes sont 270 femmes
avec syndrome des ovaires polykystiques et 119 contrôles. Les 270
patientes avec SOPK ont été randomisées pour recevoir 2 g par jour
de metformine) ou un placebo du premier trimestre jusqu’à la fin de
la grossesse.
Les androgènes mesurés sont la Delta 4 androstènedione, la
testostérone, la SHBG (sex hormon binding globulin qui
augmente au cours de la grossesse) ce qui permet de calculer
l’index de testostérone libre. Les dosages sont effectués à 4
reprises durant la grossesse. Un certain nombre de pathologies ont
été éliminées et notamment les patientes ayant une glycémie à jeun
> 126 mg par décilitre au moment de l’inclusion. En raison de la
prise de metformine, les patientes ont une supplémentation encore
plus systématique en acide folique et en vitamine B12. En raison
des troubles digestifs possibles avec la metformine les
investigateurs ont été très attentifs à l’observance qui a été
considérée comme bonne.
Les dosages hormonaux ont fait appel initialement à la
technique Elisa puis à la spectrométrie de masse à l’occasion d’une
ré-analyse afin d’éviter toute critique méthodologique.
Un effet à peu près nul
Les femmes avec SOPK ont des taux plus élevés de Delta 4
Androstènedione, de testostérone libre, et une diminution relative
de SHBG à tous les points de mesure par rapport au groupe contrôle
sans SOPK. Sur l’ensemble de la cohorte la metformine n’a pas
d’effet significatif sur le taux de ces différents paramètres. En
analyse de sous-groupes on remarque une diminution très modérée de
la Delta 4 chez les femmes sans obésité ce qui n’est pas la
majorité des SOPK. La metformine a aussi réduit la Delta 4,
testostérone chez les mères de fœtus male.
Les auteurs concluent que la metformine n’a pas d’effet sur
l’évolution des androgènes au cours de la grossesse dans ce cadre
précis hormis chez les femmes non obèses ou porteuses d’un fœtus
male. Dans l’article on ne note pas d’explication très claire de ce
différentiel. Rappelons que la metformine peut être utilisée dans
certains pays dans le traitement du diabète gestationnel qui est
une des complications de la grossesse au cours du SOPK et que la
metformine a été tentée comme traitement de la dysovulation (sujet
toujours débattu) au cours de ce syndrome.
On peut considérer que l’effet au travers de cette étude est
neutre/très modérément favorable dans deux sous-groupes sur le
profil androgénique dans ce contexte précis.
Quelques considérations physiopathologiques
Théoriquement, le fœtus est protégé de l’hyperandrogénie
maternelle par l’aromatase placentaire. Toutefois au cours des
SOPK, il peut survenir une modification du métabolisme placentaire
des androgènes. Le placenta du SOPK montre des modifications
structurelles et moléculaires avec une modification de la
programmation de la stéroïdogenèse au niveau du placenta avec
l’hypothèse d’un risque d’imprégnation androgénique d’un fœtus
femelle. Chez l’animal ce phénomène semble avoir une incidence sur
la susceptibilité au SOPK de manière intergénérationnelle et
transgénérationnelle.
Une première question : quelle est la valeur de cette étude en
dehors de la population norvégienne ?
Une seconde question : quel est l’influence de la metformine
sur le taux des androgènes dans la circulation fœtale ?
Dr Edgard Kaloustian