
Malgré les très grands progrès accomplis dans la prise en
charge thérapeutique des syndromes coronariens aigus (SCA), des
arythmies ventriculaires complexes (tachycardie ou fibrillation
ventriculaire [TV ou FV] soutenues) surviennent chez 5 à 11 %
des patients traités pour infarctus du myocarde avec sus-décalage
du segment ST (IDM ST+).
Si l’on admet que les arythmies ventriculaires complexes
obèrent le pronostic hospitalier des IDM ST+, les données
concernant l’impact de ces troubles du rythme sur le pronostic à
long terme est beaucoup plus discuté. C’est cette incertitude qui a
poussé Podolecki et coll. à tenter d’évaluer la signification
clinique des TV/FV soutenues en fonction du moment de leur survenue
chez des patients hospitalisés pour IDM ST+.
L’analyse a porté sur 4 363 patients consécutifs victimes d’un
IDM ST+ pris en charge de manière invasive entre 2004 et 2014. Les
patients ont été divisés en 2 groupes : groupe arythmies
ventriculaires complexes (n = 476 patients soit 10,91 %) ; groupe
sans arythmies ventriculaires complexes (groupe contrôle : n= 3 887
patients soit 89,09 %). Le suivi moyen est de 69,6 mois (0 à 139,8
mois).
Les FV/TV avant ou tardivement après la reperfusion obèrent le pronostic à long terme
Les arythmies ventriculaires complexes sont le plus souvent
apparues avant la reperfusion (n = 163 soit 34,24 %) tandis que les
arythmies ventriculaires induites par la reperfusion ou survenues
précocement ou tardivement après la reperfusion ont été
diagnostiquées respectivement chez 103 (21,64 %), 103 (21,64
%) et 107 (22,48 %) patients.
Ces TV et FV étaient toutes deux annonciatrices d’un pronostic
hospitalier plus défavorable.
Par rapport au groupe contrôle, la survenue tardive du trouble
du rythme s’est trouvée associée à la plus haute augmentation du
risque de décès (multiplié par > 5 fois) tandis que les
arythmies ventriculaires induites par la reperfusion étaient
associées au plus faible accroissement du risque de décès
(multiplié par < 3 fois).
Au contraire, la mortalité à long terme n’a augmenté
significativement, par rapport au groupe contrôle, que chez les
sujets qui avaient présenté des arythmies ventriculaires complexes
soit avant soit tardivement après la reperfusion (respectivement :
36,81 % et 43,93 % vs 22,58 % ; p < 0,001).
Si l’on excepte les états de choc cardiogénique présents dès
l’admission du patient, l’apparition d’arythmies ventriculaires
complexes soit avant (hazard ratio 2,76) soit tardivement après la
reperfusion (hazard ratio 3,39) s’est avérée être le facteur
prédictif indépendant le plus puissant de la survenue d’un
décès.
Ainsi, un patient sur dix hospitalisés pour IDM ST + traité
invasivement présente des épisodes de FV ou TV soutenue. L’impact
clinique de ces arythmies ventriculaires complexes dépend fortement
du moment de leur survenue.
Dr Robert Haïat