
Le concept de plaque vulnérable n’est pas nouveau, il commence
même à dater, mais les progrès de l’imagerie ont conduit à une
nouvelle approche à la fois plus clinique et plus pragmatique, en
sachant que le sujet reste ardu à déchiffrer et que beaucoup reste
à écrire ou à dire. Les définitions en sont multiples, mais le
point de départ est une constatation épidémiologique simple : la
plupart des infarctus du myocarde (IDM) surviennent sur des
sténoses coronaires non pas serrées, mais modérées (rarement >70
%), une fois soustraite la part qui revient à la thrombose
développée sur les lésions athéromateuses. D’où l’idée de repérer
la ou les plaques vulnérables (ou instables) pour prévenir
l’évènement aigu.
Une première définition strictement histologique
La première définition est histologique : une chape fibreuse
mince, une charge lipidique élevée, des lésions endothéliales avec
adhésion plaquettaire, une inflammation active et un rétrécissement
important de la lumière artérielle (>90 %). Autant de critères
majeurs qui orientent vers l’hypothèse d’une plaque vulnérable et
sont à l’origine d’une recherche clinique visant à la définir de
manière plus pragmatique et c’est là qu’intervient l’imagerie, et
d’abord la coronarographie couplée à l’échographie
endovasculaire.
Dans l’étude PROSPECT qui a inclus plus de 700 patients
victimes d’un syndrome coronaire aigu (SCA), la plaque rompue ou au
bord de la rupture – et non pas vulnérable stricto sensu –peut être
caractérisée par trois variables anatomiques indépendantes
prédictives du risque de récidive d’évènements cardiovasculaires
:
(1) la charge athéromateuse globale du réseau coronaire
;
(2) la chape fibreuse mince définie par l’histologie virtuelle
;
(3) la réduction du diamètre artériel, avec une surface
résiduelle < 4 mm2.
La spectroscopie infrarouge peut être couplée à l’échographie
pour repérer les plaques « chaudes » qui sont vulnérables,
mais toutes ces approches supposent de réaliser un examen invasif
complexe, non dénué de risques.
La vision apportée par le coroscanner
L’utilisation du coroscanner depuis 2007 dans des études de
cohorte prospectives (dans lesquelles ont été également inclus des
patients atteints d’un SCA ou d’un angor stable) a permis de
définir d’autres variables anatomiques associées au pronostic
cardiovasculaire :
(1) remodelage positif important ;
(2) atténuation de la plaque estimée faible (< 30 unités
Hounsfield) ;
(3) présence de nodules calcifiés ou spotty
calcifications ;
(4) images en « ronds de serviette ».
Mais il s’agit le plus souvent de plaques rompues et non pas
stricto sensu vulnérables, ceci dans toutes les études qui ont
suivi. En fait, le concept de base est erroné : il faut raisonner
en tenant compte du nombre de plaques vulnérables par patient et,
non pas, se focaliser sur une plaque. La charge athéromateuse
globale doit être prise en compte. D’autre part, toutes les plaques
à risque, ulcérées ou rompues ne vont pas se compliquer, loin s’en
faut.
Les évènements cardiovasculaires majeurs pris en compte dans
les études prospectives ne sont pas que des IDM, ce qui donne
encore un coup au concept. Enfin, les plaques initialement
détectées peuvent s’être remaniées au fil du temps, de sorte que la
liaison causale entre les évènements et la lésion initiale est loin
d’être évidente. In fine, ne pas se focaliser sur une plaque
d’apparence vulnérable au sein du réseau coronaire global, quelle
que soit la technique d’imagerie utilisée pour la visualiser.
L’absence de telles plaques a une valeur pronostique négative
majeure, mais leur présence une valeur prédictive positive faible
quant au pronostic cardiovasculaire ultérieur.
Dr Philippe Tellier