L'intelligence artificielle (épisode 2) : une aide au diagnostic précoce des pathologies interstitielles diffuses respiratoires

Il y a quelques semaines il était question ici de l’apport de l'intelligence artificielle (IA) dans l'en-quête étiologique des épanchements pleuraux. Nous rapportons aujourd’hui les résultats d’une équipe japonaise sur l’utilisation de l’IA dans le diagnostic des pathologies interstitielles diffuses (PID) respiratoires. Cette fois c’est l'analyse en profondeur (deep learning) de simples clichés thoraciques qui était la base du travail.

Celui-ci s’est fait en 2 temps. Une première analyse a porté sur les 506 clichés de sujets sans pathologie interstitielle et 1 à 3 documents provenant de 263 malades atteints de PID d’origine diverse. Cette première base de données a été utilisée pour bâtir l’algorithme puis tester les résultats (921 documents utilisés pour la phase préliminaire d'entraînement et 238 documents pour tester l'algorithme). Dans cette cohorte il y avait donc 34 % de sujets malades atteints de PID, ce qui est plus élevé que la proportion attendue dans la population générale. Une deuxième base a été ensuite constituée comprenant 1 280 documents radiologiques.

Dans cette cohorte la proportion de PID était plus faible (29 %) et comparée de plus à des sujets atteints d’une maladie respiratoire différente (47 %). Pour tous les malades atteints de PID, la pathologie a été confirmée dans un deuxième temps par l'imagerie tomodensitométrique thoracique. L'IA s’est élaborée à partir d'un réseau neuronal convolutif.

L'analyse a été conduite selon les étapes suivantes: tester la capacité de détection de l'algorithme;  puis comparer les résultats de l’IA à ceux obtenus par l’analyse humaine des médecins selon une grille de lecture préétablie; enfin mesurer les performances de l'intelligence artificielle en utilisant les courbes ROC qui permettent le calcul de l'aire sous la courbe (ASC) à partir des valeurs de sensibilité et spécificité. Plus la valeur de l’ASC est proche de 1, plus la valeur diagnostique du test est grande.

Des résultats encourageants…


Dans la première cohorte une valeur de 0,979 était obtenue, ce qui correspondait avec un seuil de détection fixé à 0,267 à une spécificité de 100 % c’est-à-dire aucun faux positif… La comparaison des résultats de l’IA n’était statistiquement pas inférieure aux résultats de l’analyse humaine. En ce qui concerne l’étude de la deuxième cohorte, plus fidèle à la réalité puisque l’analyse portait sur une moindre proportion de malades avec PID, sur des sujets avec une pathologie respiratoire différente et sur des sujets normaux, l’ASC atteint une valeur un peu plus basse de 0,910.

En conclusion les auteurs confirment les résultats de l'IA encourageants dans le diagnostic des PID, avec des résultats non inférieurs à ceux obtenus par l'analyse médicale. Il importe de noter que seule la radiographie pulmonaire face/profil était prise en compte, outil directement utilisable en première intention. C’est important car une intervention diagnostique, simple, précoce et rentable permet d’accélérer le diagnostic définitif de la pathologie: on a calculé qu'il fallait actuellement plus de 2 ans après l'apparition des premiers symptômes de PID pour confirmer le diagnostic.

Pour l'instant les algorithmes de l’IA sont établis à partir de cohortes ne reflétant pas obligatoirement la « vraie vie » dans la mesure où les données sont entrées dans le système d’une façon pas forcé-ment aléatoire. Les possibilités d’exporter le savoir-faire présenté ne sont pas encore précisées, mais il est bon de noter que les auteurs proposent de valider l'algorithme obtenu par un travail étude multicentrique, ouvrant donc la possibilité de généraliser cette méthode.


Dr Bertrand Herer

Référence
Nishikiori H et coll. : Deep learning algorithm to detect fibrosing interstitial lung disease on chest radiographs. Eur Respir J. 2022 Oct 6:2102269. doi: 10.1183/13993003.02269-2021. Epub ahead of print. PMID: 36202411.

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