La télémédecine et Women on Web améliorent l’accès à l’IVG

Un quart environ de la population mondiale vit dans des pays où les lois contre l’interruption volontaire de grossesse (IVG) sont très restrictives. Et, chaque année dans le monde, 43 000 femmes environ décèdent suite à l’impossibilité d’accès légal à l’IVG. 

Dans certains de ces pays, l’accès à internet et la télémédecine offrent désormais une alternative aux pratiques dangereuses, instrumentales ou toxiques, responsables de nombreuses complications, voire de décès. Un collectif international a en effet lancé, il y a quelques années, un site en ligne, Women on Web (WoW) (1), pour soutenir les femmes désireuses d’interrompre leur grossesse. Le service est accessible jusqu’à 10 semaines d’aménorrhée (SA). La femme fournit en ligne les informations médicales et, si les critères sont réunis, un médecin lui délivre une prescription de mifepristone et de misoprostol, qui lui est envoyée par l’intermédiaire d’une organisation partenaire. La patiente est informée en temps réel sur la façon de prendre les médicaments et une aide en ligne est assurée pendant et après la prise, pour la guider en cas d’effets indésirables. Quatre semaines après l’IVG, les femmes sont invitées à faire part de leur expérience, en ligne ou par email.

Non loin de nous, la République d’Irlande et l’Irlande du Nord sont parmi les pays du monde où l’IVG est le plus gravement réprimée. Bien que l’Irlande du Nord fasse partie du Royaume Uni, sa législation n’a pas intégré la loi de 1967 sur l’IVG, qui s’impose à l’Angleterre, à l’Ecosse et au Pays de Galles. L’IVG y demeure illégale, et la peine encourue peut aller jusqu’à l’emprisonnement à vie. Les irlandaises qui souhaitent une IVG se trouvent maintenant  face à 3 options. Pour les plus fortunées, il est possible de se rendre à l’étranger. Celles qui n’en ont pas les moyens ne voient parfois pas d’autres alternatives que les méthodes qui peuvent nous paraître « ancestrales ». Mais, depuis quelques années, la télémédecine permet aux femmes ne souhaitant pas, ou ne pouvant pas se rendre à l’étranger, de bénéficier d’une IVG médicamenteuse à domicile.

Une équipe internationale vient de publier un bilan de cette pratique auprès de 1 000 irlandaises qui ont eu recours à l’IVG à l’aide du site de télémédecine WoW, entre janvier 2010 et décembre 2012.

Au moment de la demande d’IVG, 78 % des femmes étaient à moins de 7 SA et 22 % entre 7 et 9 SA. L’IVG se passe normalement, sans nécessité de recours à une intervention chirurgicale, dans 94,7 % des cas. Selon les auteurs, ces données sont conformes aux résultats obtenus après une IVG médicamenteuse en pratique hospitalière ou de ville. Une transfusion sanguine a été nécessaire pour 7 patientes et une antibiothérapie pour 26 patientes. Aucun décès n’est rapporté. Au total, 9,3 % des femmes ont présenté l’un des symptômes pour lesquels il leur avait été conseillé de prendre un avis médical et 95 % d’entre elles ont suivi ce conseil.

Aucune de celles qui ne l’ont pas fait n’ont eu de complication. 

Les résultats de cette étude montrent que l’IVG « hors-la-loi » peut avoir lieu sans recours à des méthodes dangereuses. Certains contextes locaux sont toutefois tellement hostiles à l’IVG qu’il est illusoire d’imaginer que cette expérience puisse être généralisée. Puisse-t-elle être diffusée le plus possible pour que les femmes qui souhaitent une IVG puisse y accéder sans mettre leur vie en danger, en attendant que les législations se modifient.

Dr Roseline Péluchon

Références
(1) https://www.womenonweb.org/en/i-need-an-abortion
Aiken ARA et coll.: Self reported outcomes and adverse events after medical abortion through online telemedicine: population based study in the Republic of Ireland and Northern Ireland. BMJ 2017 ; 357: j2011.

Copyright © http://www.jim.fr

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Vos réactions (1)

  • Women on the waves

    Le 26 mai 2017

    Women on Web a un pendant: Women on the waves. Cette association affrète un navire qui s'installe à proximité d'un port d'un de ces pays qui pourchassent les femmes qui recourent à l'IVG (parfois même à ceux qui interdisent aussi la contraception).
    A soutenir, impérativement:

    https://www.womenonwaves.org/fr/donate

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