Le Conseil d’Etat saisi de la question du suicide assisté

Paris, le vendredi 24 septembre 2021 – Une association promouvant le droit au suicide assisté a saisi le Conseil d’État d’une requête contestant la constitutionnalité des dispositions législatives interdisant le recours au suicide assisté.

Face à l’inertie des politiques, le suicide assisté sera-t-il autorisé par la justice ? C’est ce qu’espère l’association suisse Dignitas, qui accompagne les personnes souhaitant recourir au suicide assisté en Suisse et qui milite pour sa légalisation partout en Europe. Six mois après qu’une proposition de loi visant à légaliser l’euthanasie ait été tuée dans l’œuf au Parlement par des stratégies d’obstruction parlementaire, l’association a décidé de saisir de la question le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative française. La voie judiciaire choisie par Dignitas s’est déjà révélée payante dans plusieurs pays. Saisie par l’association, la Cour fédérale allemande a consacré le droit à mourir dans la dignité en février 2020, suivie par la Cour constitutionnelle autrichienne en décembre suivant.

Le Conseil Constitutionnel pourrait se prononcer au printemps 2022

Dans le détail, les militants pour le « droit à mourir dans la dignité » ont saisi le Conseil d’État d’une requête visant à abroger le décret qui interdit aux médecins d’administrer à leurs patients du pentobarbital de sodium, un puissant barbiturique utilisé à l’étranger pour les suicides assistés, les euthanasies…et les exécutions capitales. Cette requête est surtout accompagnée d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui conteste la conformité à la Constitution des dispositions du Code de la Santé Publique interdisant le recours au suicide assisté.

Conformément à la législation en vigueur, le Conseil d’État a désormais trois mois pour se prononcer sur la pertinence, le sérieux et le caractère nouveau de cette QPC. S’il juge ces trois critères réunis, le juge administratif transférera alors la QPC au Conseil Constitutionnel, seule juridiction habilitée en France à juger de la constitutionnalité de la loi. Le Conseil aurait alors lui aussi trois mois pour se prononcer. Son éventuelle décision tomberait donc au début du printemps 2022, en pleine élection présidentielle.

La CEDH en dernier recours

Pour Maitre Patrice Spinosi, auteur de la QPC, la législation française sur la fin de vie est contraire au principe de sauvegarde de la dignité humaine et de fraternité qui ont été reconnus comme faisant partie intégrante de la Constitution par le Conseil Constitutionnel. « Nous ne demandons pas au Conseil Constitutionnel de définir ces exceptions (à l’interdiction de l’euthanasie), mais d’imposer au législateur de les choisir » rappelle l’avocat qui est déjà à l’origine de plusieurs QPC couronnés de succès.

À ce jour, les neufs sages du Conseil n’ont jamais eu à se prononcer sur la question du droit à mourir dans la dignité.

En cas d’échec devant le Conseil d’État ou le Conseil Constitutionnel, l’association Dignitas et son avocat envisagent de poursuivre la France devant la Cour Européenne des droits de l’Homme (CEDH).

La jurisprudence de la Cour de Strasbourg sur la question est ambiguë. Dans deux arrêts de 2002 et de 2011, elle avait reconnu que tout individu disposait d’un droit à choisir sa mort, tout en affirmant que les États n’avaient pas l’obligation d’autoriser le suicide assisté.

Nicolas Barbet

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