
Une revue de la littérature concluait récemment que le déclin cognitif commence après 60 ans. Or rien n’est moins sûr… Plus de 7 000 personnes, âgées de 45 à 70 ans, se sont prêtées à une étude pour évaluer l’évolution de leurs performances cognitives au fil du temps. En 10 ans de suivi, elles ont été soumises à trois reprises à des batteries de tests évaluant leurs capacités cognitives.
Le résultat n’est pas très réconfortant : les performances diminuent au fil du temps, ce qui n’est pas une surprise, mais cela dans toutes les catégories d’âges, y compris dans le groupe âgé de 45 à 49 ans au démarrage de l’étude. Tous les domaines de la cognition sont touchés, sauf le vocabulaire. Sans surprise, la dégradation des fonctions cognitives est plus rapide chez les personnes les plus âgées. Pour exemple, au cours des 10 ans de suivi, le déclin des facultés de raisonnement va de – 3,6 % chez les hommes de 45-49 ans, à – 9,6 % chez ceux de 65-70 ans. Pour les femmes, il va de – 3,6 % chez les 45-49 ans à – 7,4 % chez les 65-70 ans. Pour ces dernières toutefois, les auteurs nuancent le résultat. La comparaison de l’influence de l’âge sur le déclin cognitif selon que l’étude est menée de façon longitudinale ou transversale montre que cette dernière surestime les conséquences de l’âge en y mêlant d’autres facteurs importants comme le niveau d’éducation, un peu plus inégal selon les tranches d’âge dans le groupe des femmes.
De récents travaux suggéraient que la démence sénile était le résultat d’un long processus, débuté 20 à 30 ans auparavant, mais jusqu’à présent aucun biomarqueur ni profil cognitif ne permet de prédire son apparition. Il semble toutefois que le mode de vie et les facteurs de risque cardiovasculaire ont un rôle non négligeable et les auteurs évoquent l’émergence d’un consensus selon lequel « ce qui est bon pour notre cœur est bon aussi pour notre tête ».
Les travaux futurs auront donc à identifier les déterminants du déclin cognitif. Dans cette optique il sera particulièrement intéressant de repérer et d’étudier de plus près, dans chaque tranche d’âge, les sujets dont le déclin cognitif est supérieur à celui de la moyenne du groupe. Cela permettra peut-être de définir le moment idéal pour d’éventuelles interventions visant à modifier la trajectoire du déclin.
Sans oublier (et sans pessimisme excessif) que cette étude n’incluait que des sujets de plus de 45 ans, ce qui laisse persister un doute sur le véritable « timing » du début du déclin…
Dr Roseline Péluchon