
Après les Ehpad, les cliniques privées dans le collimateur
Pour Orpea et Korian, le mal est déjà fait
Nicolas Barbet
Nicolas Barbet
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Les groupes privés (Orpea, Clinea, Korian, et autres) gèrent leurs petites entreprises exactement comme l'Etat gère l'hôpital public, avec une parcimonie avaricieuse, qui remplace tout projet technique, à ceci près qu'ils dégagent des bénéfices destinés aux actionnaires.
Leur business model est basé sur un endettement colossal proportionnel à leur croyance que nul ne viendra les concurrencer sur leur segment, segment pour ainsi dire garanti négativement par l'État (ça, je fais pas, allez y).
Ils se situent ainsi paradoxalement au sein même de l'État technico-administratif, et ce n'est pas pour rien que la DG de Korian a été haut fonctionnaire. On est à mille lieux de la plus petite concurrence ou du plus petit marché.
Tout cet édifice manque de la moindre idée, but ou conception politique guidant un projet technique (que fait on, comment, avec qui, avec quelles ressources et quel budget) puisqu'il est le fruit d'un désengagement politique majeur, à défaut remplacé par une mainmise bureaucratique et administrative, laquelle devient alors le seul but sensé.
Le seul remède rationnel ne peut venir que du bord politique, par la pensée d'un édifice du système de santé entrainant le chantier de sa réalisation et de sa gouvernance.
Dr Gilles Bouquerel
On entend parler de maltraitance institutionnelle des EPHAD. Bien, mais d'abord il existe dans chaque institution une maltraitance liée au système que ce soit l'école, l'armée, l'usine...
De plus il me semble utile de distinguer les différents facteurs de maltraitance : nature, intensité, auteur ou encore expression, ressenti en un mot le contexte.
Pour avoir une petite expérience en milieu de long et moyen séjour dont ma femme était médecin chef pendant plus de 30 ans (à mi-temps pour 2 étages pendant 10 ans), j'en retiens que s'il existe une fausse maltraitance évoquée par des délirants, déments, des egos démesurés (et j'ai en mémoire le cas rarissime d'un pervers), il faut reconnaître qu'elle existe, à des degrés très divers et par des auteurs divers souvent en cascade et responsabilité partagée, (personnel, autres patients, visiteurs ou parfois le patient lui-même). Mettons aussi de coté la maltraitance subie par le personnel qui ne justifie, évidemment par la vengeance.
Il vient à l'esprit la violence physique mais celle psychologique ou morale bien qu'invisible peut être intense. Le langage impoli,infantilisant, condescendant, méprisant ou insultant. Que dire du silence, de l'isolement parfois inconscient (des sourds par exemple)?
Les auteurs le sont par faute mais aussi par erreur, insuffisance, ignorance (par exemple des codes culturels, moraux ou encore religieux), fatigue, maladresse, distraction et encore paresse et facilité (délicate décision de contrainte par lien).
La plainte des patients est aussi à interpréter sans oublier ceux qui ne se plaignent pas par peur, démence, résignation, acceptation comme rédemptrice (un cas), je n'imagine pas qu'il faille envisager le masochisme !
Ceux qui ignorent les codes : le tripoteur de sonnette, celui qui n'a pas compris que le repas commandé à 11h30 est pour le lendemain, que l'air à 35° ne rafraîchit pas une chambre à 25°, qu'on ne peut pas le doucher sans raison deux fois par jour comme chez lui, que le port de couche n'est pas un sévice...
Ceux qui n'admettent pas leur handicap ou en font un argument pour exiger des services supplémentaires non pertinents.
Ceux qui expriment mal leur plainte ou à la mauvaise personne.
Les plaintes légitimes des familles sont, hélas, trop souvent excessives mais dans la majorité des cas une discussion éclairée remet les choses à leur juste niveau.
Dr Robert Chevalot
Pour finir, il est difficile de faire une enquête en cas de signes physiques si le plaignant n'es pas sain d'esprit quand le personnel évoque une chute, du fait aussi de la rareté des témoins.
Quant à la maltraitance dans les EHPAD de luxe çà me laisse perplexe: exigence des clients, stupidité des dirigeants qui tuent la poule aux oeufs d'or ou dénigrement entre concurrents...?