
Paris, le mardi 18 mars 2008 – L’une des principales conclusions d’une enquête initiée par la Fédération des Maladies Orphelines quant aux améliorations apportées grâce au Plan maladies Rares semble résonner avec un certain fatalisme : « La vie quotidienne des malades n’a pas changé ». Cette difficulté des pouvoirs publics à réellement transformer la vie de nos concitoyens les plus vulnérables apparaît également dans une enquête réalisée par BVA pour l’Association française contre les Myopathies (AFM). Mené auprès de 461 personnes atteintes de maladies neuromusculaires, ce sondage révèle que la moitié de ces patients n’a pas le sentiment que depuis février 2005, date de l’adoption de la loi sur le handicap, leurs démarches administratives ont été simplifiées. L’AFM note par ailleurs que : « Les personnes interrogées ont le sentiment que rien n’a changé concernant le lieu unique d’information ou la possibilité de se référer à une personne unique pouvant répondre à toutes leurs questions ». Pourtant, les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) créées par la loi avaient pour mission « d’offrir un accès unique à l’ensemble des droits et prestations concernant les personnes handicapées et faciliter toutes les démarches liées aux situations de handicap », comme le rappelle le Médiateur de la République dans son rapport annuel, rendu public au mois de février.
« Laborieux »
Si ces MDPH faillissent aujourd’hui à remplir cette mission, c’est qu’elles présentent de très nombreux dysfonctionnements. Déjà en juillet dernier, la commission des affaires sociales du Sénat remarquait que bien que « toutes les MDPH étaient installées au 1er janvier 2006 dans les délais prévus par la loi », leur « démarrage » aura été un peu « laborieux » et qu’elles ne parvenaient pas toujours à répondre à leur mission première d’accueil. « Trop souvent, les visiteurs sont confrontés à des agents d’accueil incapables de les renseigner et les équipes pluridisciplinaires sont débordées » soulignait l’auteur du rapport, le sénateur UMP des Pyrénées Orientales, Paul Blanc. A l’occasion de la présentation des résultats de l’enquête BVA, le 11 février, Laurence Tiennot-Herment, présidente de l’AFM déplorait pour sa part le fait que « les dossiers soient traités différemment d’un département à un autre ou que des situations d’urgence restent sans réponse alors que la loi prévoit des procédures spécifiques ».
Personne ne veut travailler dans les MDPH
Le Médiateur de la République propose un bilan plus détaillé encore des dysfonctionnements des MDPH grâce à la désignation en juillet 2006 « dans chaque département d’un délégué correspondant de la MDPH ». Les difficultés mises en évidence par ces observateurs sont très nombreuses. Elles sont d’abord fonctionnelles et concernent notamment « la question des transfert des (…) personnels des ex Cotorep et des ex-CDES vers les MDPH et les Groupements d’intérêt publics (GIP) mis en place pour assurer leur gestion ». De façon concrète, il apparaît que dans de nombreux départements « on a assisté à des refus caractérisés de collaboration et de mutation ». Le cas d’un département important où 49 personnes travaillant dans l’ex Cotorep devaient être mises à disposition de la MDPH et où 30 fonctionnaires ont refusé cette mutation est cité en guise d’exemple édifiant et qui laisse deviner les pénuries de personnels au sein des nouvelles structures ! D’ailleurs, le Médiateur relève que : « La mise en place (…) de personnes référentes reste incomplète et parfois inexistante » !
Quel tribunal choisir ?
Dans son rapport, l’équipe de Jean Paul Delevoye pointe par ailleurs du doigt les défauts d’information émanant des MDPH en cas de litige. « Les voies de recours mentionnées sur les notifications de décision émanant des commissions départementales des MDPH ne sont pas suffisamment explicites quant à la juridiction à saisir au regard de la nature du litige ». Il revient donc à la personne handicapée de déterminer si son cas relève des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), des tribunaux du contentieux de l’incapacité (TCI) ou du tribunal administratif. Il pourra difficilement compter sur les personnels des MDPH pour l’éclairer : le Médiateur de la République avouant avoir été « frappé de constater la méconnaissance fréquente des différences entre les compétences exercées » par ces différentes juridictions !
Retard et manque de dialogue entre les différentes administrations
La non simplification apportée aux démarches administratives peut se lire de façon concrète dans l’accès à l’éducation. Un manque de dialogue entre les MDPH et l’Education nationale est ainsi dénoncé par le Médiateur qui remarque entre autres que les parents peuvent parfois se retrouver avec une « décision favorable » des MDPH concernant « l’attribution de matériel pédagogique » et un « vide budgétaire » signifié en guise de refus par l’inspection académique. On observera enfin que l’une des raisons majeures expliquant que ces structures ne parviennent pas à améliorer la vie pratique quotidienne des handicapés, tient à leurs difficultés à « rattraper le retard accumulé ».
Difficultés financières
Au-delà du laborieux fonctionnement de la MDPH et de la complexité générale de la loi sur le handicap, tant l’AFM que le Médiateur de la République reviennent sur les difficultés financières des personnes handicapées, elles aussi, apparemment, non résolues par la loi. L’enquête de BVA indique « qu’une personne sur deux a le sentiment que ses ressources financières se sont détériorées depuis deux ans ». L’équipe de Jean Paul Delevoye semble pour sa part regretter que « la possibilité de cumuler emploi et bénéfice de l’AAH » soit « limitée aux personnes handicapées » à plus de 80 %. « Cette situation est d’autant plus défavorable [pour les personnes handicapées entre 50 et 79 %] que la suppression de l’AAH provoque aussi la disparition de droits connexes » signale le médiateur.
A.H.