Les SDF meurent-ils plus en réanimation et à l’hôpital que les lecteurs du JIM ?
La vie avec la rue comme seul domicile est un grave problème de
santé dans le monde entier. Selon l'OCDE, le nombre déclaré de SDF
représente moins de 1 % de la population, mais a augmenté ces
dernières années au Danemark, en Angleterre, en France, en Irlande,
en Italie, aux Pays-Bas et en Nouvelle-Zélande. Ces patients sans
abri sont vulnérables à plusieurs problèmes de santé tels que la
maladie mentale, la toxicomanie, les traumatismes, les maladies
cardiovasculaires et les maladies infectieuses. L'itinérance
entraîne des coûts de soins de santé importants pour le système de
santé publique parce qu'il est difficile d'assurer un suivi
régulier de ces patients, ce qui entraîne des visites fréquentes
aux Urgences. De plus, les SDF se présentent fréquemment dans les
hôpitaux pour une pathologie négligée et avancée nécessitant une
prise en charge en soins intensifs et en réanimation.
Il est un lieu commun de dire que les modes de vies et les
déterminants sociaux influent sur notre santé, mais jusqu’à quel
point ? Vu sous l’angle d’un service de réanimation coréen (1),
existe-il des différences de trajectoire de santé entre des SDF et
des patients comme les abonnés au JIM qui ont, en général, un
domicile fixe ?
Certes, aurions-nous tendance à répondre. Pas si simple
!
Patients plus jeunes, plus souvent aux Urgences, mais avec un
même taux de mortalité hospitalière
L’analyse rétrospective des dossiers médicaux des SDF (n = 56)
et avec domicile fixe (ADF) (n = 112) admis dans le service de
réanimation du Centre médical de Séoul Boramae entre janvier 2012
et décembre 2017, montre – et ce n’est pas une surprise – que les
SDF étaient plus jeunes, comprenaient plus d'hommes et présentaient
des taux de réadmission et d'admission aux urgences beaucoup plus
élevés. Bien que les taux de mortalité à l'hôpital et en service de
réanimation étaient semblables dans les deux groupes (est-ce
uniquement en raison de leur plus jeune âge ?), les patients SDF
étaient beaucoup moins susceptibles d'avoir une famille ou une
personne de confiance et décédaient généralement après une
réanimation cardiorespiratoire. L’analyse multivariée ajustée a
montré que l'itinérance n'était pas un prédicteur indépendant de la
mortalité en service de réanimation ou à l'hôpital. Par ailleurs,
la durée du séjour en service de réanimation était comparable d'un
groupe à l'autre.
En outre, les patients SDF sont bien pris en charge sans différence
en termes de qualité du soutien des défaillances d’organes et de
coût total des soins de santé, bien qu'ils aient tendance à rester
plus longtemps en service de réanimation et que leur fin de vie
soit de mauvaise qualité (en Corée).
Qu’en est-il en France ?
Ces résultats rejoignent ceux d’une étude française publiée en 2015
(2) qui conclut ainsi : « Les patients sans domicile gravement
malades bénéficient du même niveau de soins et ont globalement le
même pronostic que les patients hébergés, mais leur séjour est plus
long. La plupart des patients précaires vivant dans la rue ont un
taux de mortalité plus élevé ».