
Paris, le mercredi 8 mars 2023 – Les syndicats médicaux regrettent le manque de réactivité du gouvernement face aux actes de violences commis contre des professionnels de santé.
C’est une vidéo qui risque de ternir quelque peu l’image du mouvement contre la réforme des retraites, par ailleurs majoritairement soutenu par la population. Ce mardi, en marge de la manifestation parisienne contre le projet du gouvernement, un médecin de l’association SOS Médecins en intervention a vu sa voiture violemment attaquée à coups de marteaux et de poteaux par des « black-blocks ».
Selon le témoignage de la victime, relayé par le Dr Serge Smadja, secrétaire général de SOS Médecins France, ce n’est que lorsqu’il a brandit un panneau « SOS Médecins » que la furie des assaillants s’est calmé. « Il a dit qu’il était médecin et il leur a demandé d’arrêter, certains casseurs ont dit « laissez-le, laissez-le » et ils se sont calmés » explique le Dr Smadja. Mais selon ce dernier, difficile de croire que les agresseurs aient pu se méprendre sur le caractère médical du véhicule, qui affichait un caducée et une mention « urgences médicales ». L’agression a été immédiatement dénoncée par le ministre de la Santé François Braun. « Dégrader la voiture d’un médecin en intervention, c’est inadmissible et je ne peux pas l’accepter » a déclaré le ministre sur Twitter.
Les infirmières libérales particulièrement exposées aux violences
Les cas médiatisés de violences contre des professionnels de santé semblent se multiplier ces dernières semaines. Le 18 février dernier, ce sont deux médecins, deux infirmiers et un agent de sécurité qui ont été blessés par un même individu aux urgences de l’hôpital Ambroise-Paré à Boulogne-Billancourt.
Une médiatisation qui ne signifie pas forcément une réelle augmentation des actes violents contre les professionnels de santé. S’il est impossible de disposer de chiffres précis sur la question (tous les actes de violences ne font pas l’objet d’un signalement ou d’une plainte), les dernières données de l’Ordre des médecins et de l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) semblent même indiquer une baisse du nombre d’agressions dont sont victimes les professionnels de santé. Il n’empêche que les violences physiques ou verbales contre les soignants sont un phénomène d’ampleur : selon un sondage Odoxa mené l’an dernier, 37 % des professionnels de santé hospitaliers disaient subir régulièrement des violences physiques au cours de leur travail.
Dernièrement, plusieurs syndicats de soignants se font fait l’écho de ce climat de violence, que certains lient à la dégradation générale de notre système de santé et une à sorte d’intolérance à la frustration qui semble gagner notre société. Ce mardi, le syndicat Convergence infirmières appelle les autorités à « tout mettre en œuvre » pour lutter contre « les violences à l’encontre des infirmières libéraux qui se multiplient ». « Les infirmières et les infirmiers libéraux sont particulièrement exposés car ils interviennent seuls, dans le huis clos du domicile, au contact direct de certains patients parfois atteints de troubles cognitifs et/ou psychiatriques ; il faut ajouter à cela que plus de 80 % de la profession est féminine, ce qui accroit les situations de vulnérabilité, les violences sexuelles et sexistes sont d’ailleurs également trop répandues » s’alarme le syndicat.
Une concertation mais peu d’actions concrètes
Dans un communiqué paru ce jeudi, le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs (SNPHARE) lie également ces faits d’agression contre des professionnels de santé à la détérioration du système de santé, fait le « constat d’une société plus violente » et demande une politique de « prévention du risque ». Selon une logique qui nous échappe quelque peu, le SNPHARE estime qu’une des solutions pour lutter contre ces violences est…d’augmenter la rémunération des PH pour les astreintes et le travail de nuit.
Face à ces actes de violences, la réponse du gouvernement semble timorée. Seule mesure concrète prise ces derniers mois, l’ouverture, en janvier dernier, aux médecins libéraux de la plateforme de signalement des actes de violence jusque-là réservée aux hospitaliers. Pour le reste, la ministre des professionnels de santé Agnès Firmin Le Bodo a lancé le 16 février dernier une « concertation sur la sécurité des soignants » qui devrait durer jusqu’en mai et aboutir à de nouvelles mesures d’ici cet été.
« Nous attendons avec impatience que ces mesures soient mises en place » commente un brin agacé Convergence Infirmières.
Nicolas Barbet