Mépolizumab dans la polypose nasale et l’heure de la chirurgie s’éloigne…

La rhinosinusite chronique avec polypose nasale se caractérise par une inflammation éosinophilique locale chronique, mais aussi par une inflammation dite de type 2. Cette dernière consiste en une réponse physiologique du système immunitaire aux nombreuses agressions de l’environnement, mais dans certains cas, la réponse est excessive au point d’aboutir à une surproduction de cytokines, notamment les interleukines IL-4, IL-13 et IL-5, et par ce biais de déclencher une cascade de réactions inflammatoires délétères. Les symptômes de la rhinosinusite chronique avec polypose nasale peuvent avoir un retentissement sévère sur la plupart des dimensions de la qualité de vie et l’odorat. Ils peuvent même résister au traitement médical y compris une corticothérapie locale voire systémique qui tend à aggraver les lésions in situ. Les cas les plus sévères peuvent imposer un geste chirurgical qui va consister en l’ablation des polypes et de la muqueuse nasale pathologique, au prix de complications diverses, telles des hémorragies, des lésions de l’orbite ou encore des fuites de liquide céphalorachidien. Ces gestes invasifs ne mettent pas à l’abri des récidives postopératoires et quand il faut réopérer, le risque de lésions définitives de la muqueuse nasale et d’anosmie séquellaire augmente de manière substantielle. Certains facteurs prédisposent à cette évolution péjorative, qu’il s’agisse de l’importance de l’éosinophilie nasale (voire systémique), des comorbidités allergiques et de l’élévation des taux sériques d’IL-5.

Le mépolizumab est un anticorps monoclonal humanisé qui se lie à l’IL-5 et l’inactive, permettant ainsi de réduire la prolifération des éosinophiles. Ce médicament a fait la preuve de son efficacité dans le traitement de la rhinosinusite chronique avec polypose nasale. L’essai de phase III, intitulé SYNAPSE, mené à double insu contre placebo, a ainsi démontré que chez les patients atteints d’une forme récidivante et sévère de cette affection, mais aussi déjà opérés (au moins une fois), le mépolizumab améliorait les symptômes et diminuait le nombre des reprises chirurgicales comme l’illustre une analyse post-hoc plus détaillée de ses principaux résultats.

Cette étude contrôlée a inclus 407 patients, dont 201 dans le groupe placebo et 206 dans le groupe traité. Tous les participants étaient éligibles à une reprise chirurgicale du fait de l’échec des traitements médicaux, mais aussi d’une première intervention nasale. Le médicament a été administré par voie sous-cutanée à raison de 100 mg toutes les 4 semaines pendant 52 semaines.

Un risque réduit d’être sur la liste d’attente et d’être réopéré

Le délai avant l’inscription sur une liste d'attente pour une chirurgie et le délai avant la première réintervention effective (tous deux jusqu'à la semaine 52 de l’essai) ont été évalués en tant que critères de jugement principaux. Dans une analyse post hoc, a été également pris en compte le délai avant une réintervention effective, quel que soit le temps écoulé depuis la première chirurgie (plus ou moins de trois ans) avant la sélection pour être inclus dans l’étude.

Le mépolizumab par rapport au placebo a réduit le risque d'être inscrit sur la liste d’attente (semaine 52, estimation de la probabilité selon Kaplan-Meier [intervalle de confiance à 95 %] : 13,9 % [9,8 %, 19,5 %] vs. 28,5 % [22,7 %, 35,4 %]). Le mépolizumab par rapport au placebo a également réduit le risque de réintervention effective indépendamment de l’éosinophilie sanguine basale et du temps (<3 vs ≥3 ans) écoulé depuis la dernière intervention avant l’inclusion dans l'étude, les hazard ratios correspondants étant respectivement de 0,28 [IC 95 %= 0,09-0,84] et 0,50 [IC 95 % =0,26, 0,98].

Cette analyse fouillée des résultats de l’essai SYNAPSE illustre l’efficacité du mépolizumab dans le traitement de la rhinosinusite chronique avec polypose nasale sévère, récidivante et réfractaire au traitement médical. En l’occurrence, les participants avaient tous bénéficié d’une première intervention qui avait été un échec, ce qui met en exergue l’intérêt potentiel de cette biothérapie dans les formes les plus sévères de la maladie.

Dr Philippe Tellier

Référence
Fokkens WJ et coll. : Mepolizumab for chronic rhinosinusitis with nasal polyps (SYNAPSE): In-depth sinus surgery analysis. Allergy. 2023 ;78(3):812-821. doi: 10.1111/all.15434.

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