On pourra bientôt se faire imprimer le genou

Brest, le samedi 17 février 2018 - Les prothèses sont un domaine où les inventeurs, médecins, artisans et ingénieurs appliquent tout leur savoir pour rendre à un membre sa fonction, redonner à un visage une apparence socialement acceptable et soulager considérablement les patients. Les techniques ont bénéficié des "épidémies" massives de mutilations au gré des guerres qui ont agité l’histoire du monde. Rappelons au hasard deux grands noms de l’amputation sur le champ de bataille : Ambroise Paré, qui a considérablement perfectionné les prothèses de membre, et Dominique-Jean Larrey, qui a suivi Napoléon dans toute l’Europe (il pouvait amputer un membre en moins d’une minute !). Enfin, chacun sait que la première guerre mondiale, a nettement fait progresser les prothèses maxillo-faciales.
Aujourd’hui, ce ne sont heureusement pas les balles et les obus qui stimulent le secteur mais plutôt le vieillissement et la prise de poids de la population : 80 000 prothèses de genou ont été posées en 2016. Les prothèses bénéficient maintenant de l’apport des nouvelles technologies, à commencer par l’impression 3D. Cette technique qui se développe surtout depuis les années 2010 envahit de nombreux domaines (de l’architecture aux sports en passant par l’aéronautique). Elle est également de plus en plus utilisée dans la rechercher médicale. Pour ce qui est des prothèses, elle permet une précision extrême, et une adaptation sur-mesure parfaite à l’anatomie de chacun. Le CHRU de Brest a récemment présenté l’initiative FollowKnee, un vaste projet à tiroir qui pourrait révolutionner les prothèses de genou.

L’association de plusieurs technologies

Première étape : un scanner permet une reconstruction 3D du genou du patient. A partir de ces images, la création de la prothèse, en métal et céramique, est ensuite réalisée en impression 3D. Elle sera dotée de capteurs permettant, après la pose dans le corps du patient, de transmettre certaines informations directement en bluetooth (par exemple, sur un smartphone). La prothèse pourrait ainsi détecter rapidement une éventuelle infection (par la température, ou le pH), ou encore recueillir des informations sur son fonctionnement (en termes de pression, de force, de mouvement). Bref, le service après-vente est assuré.

FollowKnee promet également d’aider les chirurgiens au moment de l’intervention par une technique de réalité augmentée. La prothèse imprimée en 3D, connectée, posée en réalité augmentée, est donc le nouveau couteau suisse technologique qui pourrait bientôt arriver dans les services de chirurgie orthopédique. Un premier essai sur 220 patients devrait être réalisé d’ici 3 ans, et l’ensemble du projet devrait s'achever dans 5 ans. Tout cela fait rêver, et nous donne un petit aperçu de la chirurgie des prochaines décennies… Certes, mais combien ça coûte ?

Au bout du compte, moins cher qu’une prothèse classique ?

Passons des genoux à la tête. C’est précisément à la question du coût des prothèses que va tenter de répondre une étude médico-économique menée par l’hôpital de la Croix Rousse à Lyon. Il est aujourd’hui possible de proposer des prothèses imprimées en 3D pour combler des lacunes dans le massif facial, causées par exemple par l’envahissement d’une tumeur maligne. Ces prothèses sur mesure sont aujourd’hui bien plus chères que les autogreffes classiques. Mais elles présentent également des avantages qui pourraient leur conférer in fine un avantage économique.

L’adéquation inégalable de ces prothèses avec l’anatomie des patients permet en effet de diminuer significativement les complications post-opératoires. Ces prothèses ne sont pour l’instant pas remboursées. L’enjeu est justement ici d’évaluer le bien-fondé économique du choix de l’impression 3D. L’étude devrait porter sur 50 patients recrutés dans une dizaine de centres.

Revenons-en au genou pour finir. Les initiateurs du projet FollowKnee affirment que l’impression 3D, en se libérant de la nécessité de réaliser plusieurs prothèses en amont de l’intervention pour trouver la bonne taille, permettra de réduire substantiellement les coûts. Le projet de recherche en lui-même, issu d’un partenariat impliquant entre autres le Commissariat à l’Energie Atomique de Grenoble, la société SLS (spécialisée dans les prothèses dentaires), ou encore l’institut de recherche technologique de Rennes, devrait couter 24 millions d’euros.

Dr William Hayward

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article