
L’immunosuppression thérapeutique a été proposée il y a de nombreuses années de la prise en charge de la sclérose en plaques (SEP). L’azathioprine, le cyclophophamide et le méthotrexate ont été employés avant que la méthodologie des essais thérapeutiques dans la SEP ait été finalisée et l’efficacité de ces « anciens » immunosuppresseurs dans le traitement des différentes formes cliniques de SEP est restée mal précisée. La mitoxantrone, substance plus récente, a démontré l’intérêt d’une stratégie plus agressive mais a aussi rappelé l’importance d’une surveillance stricte et du respect des indications en raison d’une toxicité significative. Les praticiens restaient donc en attente d’une nouvelle molécule à effet plus marqué que celui des immunomodulateurs, pouvant être administrée par voie orale et avec une toxicité acceptable.
La cladribine pourrait être cette molécule. Il s’agit d’un immunosuppresseur qui agit préférentiellement et rapidement sur les lymphocytes CD4+ et CD8+ et plus transitoirement sur les lymphocytes B CD19+. Elle possède d’autres propriétés intéressantes sur les monocytes et cytokines pro inflammatoires. Les résultats de l’étude CLARITY étaient donc attendus par tous les « SEPologues ». Cette étude de phase III a évalué l’efficacité de la cladribine à 2 dosages (3,5 mg/kg, 5,25 mg/kg) versus placebo pendant 96 semaines. Au total, 1 326 patients avec une SEP rémittente et un handicap léger à modéré (EDSS <5) ont été inclus dans cet essai multicentrique, international, double aveugle contre placebo. Le produit ou le placebo ont été administrés par voie orale les 4-5 premiers jours des semaines 1, 5, 9, 13, et les 2 premiers jours de la semaine 48, 52. La cladribine a entrainé une diminution de 54-57 % du taux annuel de poussées (0,14 et 0,15, vs. 0,33 ; P<0,001). Cette différence était encore plus significative pour les anomalies IRM avec une diminution de 85-87 % des lésions prenant le gadolinium, et de 73-77 % des nouvelles lésions T2.
Cette efficacité était attendue mais la question majeure était celle de la tolérance. La lymphopénie a été évidement plus fréquente dans le groupe sous cladribine (21,6 %, 31,5 %, et 1,8 % respectivement dans le groupe 3,5-mg, 5,25-mg et placebo). Plus inquiétant, il a été noté une augmentation du risque d’infection à virus varicelle zona (8 patients et 12 patients atteints de zona dans les groupes cladribine et 3 varicelles, une dans chaque groupe de traitement) et de cancers divers (10 cancers et tumeurs diverses). Un patient est décédé d’une réactivation d’une tuberculose.
Cette étude démontre l’efficacité de la cladribine sur les différents critères d’évaluation et rappelle que ces molécules exposent à un risque très faible mais non nul de complications sévères imposant un suivi rapproché de ces patients pour mettre en œuvre précocement des mesures correctives.
Dr Christian Geny