Qui est Agnès Buzyn, nouvelle ministre de la Santé

Paris, le mercredi 17 mai 2017 – Sans nouvel atermoiement, la composition du premier gouvernement d’Emmanuel Macron a bien été dévoilée ce mercredi à 15h. Dans cette liste sans grandes surprises par rapport aux pressentiments de la presse, le nom du ministre de la Santé est un des rares à susciter l’étonnement. Alors que beaucoup attendaient Olivier Véran, c’est le professeur Agnès Buzyn qui a été nommée pour prendre la tête de l’Avenue de Ségur.

Femme d’influence

En devenant présidente de la Haute autorité de santé (HAS) en mars 2016, Agnès Buzyn avait promis de se restreindre à un seul mandat. Elle n’aura pas menti. Sans doute, certains suggéreront que sa féminité n’est pas étrangère à sa nomination comme ministre, à l’heure où Emmanuel Macron a fait du respect de la parité un de ses principes. Mais Agnès Buzyn est habituée à ce type de commentaires qui ont émaillé son parcours. De tels persifflages avaient ainsi accompagné sa nomination comme présidente du conseil d’administration de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) en 2008. « Certains de mes collègues m’ont dit que j’avais été nommée parce que j’avais été la belle-fille de Simone Veil », se souvenait-elle dans les colonnes de Libération en mars 2016. Même chanson trois ans plus tard, quand elle devient la présidente de l’Institut national du cancer (INCA) : « Mon prédécesseur, Dominique Maraninchi, a été nommé très rapidement à l’Agence du médicament (en raison du scandale Mediator, ndrl) et on cherchait pour le remplacer une femme. Voilà, c’est ainsi, il faut s’y faire » avait-elle elle-même analysé. Enfin, en 2016 quand elle succède à Jean-Luc Harrousseau, à la tête de la HAS, c’est au lendemain de l’adoption d’une disposition dans la loi de Santé, visant à renforcer la parité au sein de l’institution !

Médecin avant tout

Bénéficiaire de la parité, Agnès Buzyn a principalement réussi cette belle carrière grâce à ses « compétences » comme l’avait reconnu et salué le docteur Jean Leonetti (député LR) au moment de son audition devant les députés en marge de sa nomination à la tête de la HAS. Le praticien, qui s’affiche comme proche des sensibilités de gauche, avait alors conquis quasiment la totalité de l’auditoire par sa détermination et son franc parler. Cette femme de 55 ans n’avait pourtant pas pour première ambition les postes institutionnels. La médecine est sa première passion. C’est son père, rescapé du camp de concentration d’Auschwitz, qui la lui a insufflée : ce chirurgien orthopédiste l’invitait parfois à assister à ses interventions quand il n’avait pas le temps de l’emmener au cinéma ! Pourtant, à l’heure de choisir sa spécialité Agnès Buzyn préfère à la chirurgie une spécialité marquée par un contact plus étroit avec les patients. « En hématologie, il peut arriver qu’on suive les patients pendant des années. Il y a un acte technique mais aussi un accompagnement humain » remarquait l’année dernière celle qui continuait d’assurer jusqu’à aujourd’hui (le pourra-t-elle encore demain ?) une consultation à l’hôpital Saint Antoine.

La santé publique au cœur

Le travail qu’elle a accompli à la tête de l’INCA (poste qu’elle a beaucoup apprécié et qu’elle a même refusé de quitter quand on lui a offert de devenir Directrice générale de la Santé) est sans doute à l’origine des missions qu’Emmanuel Macron et Edouard Philippe lui confient aujourd’hui. Très attachée au service public, accordant une place centrale aux questions concernant la santé publique (ce qui fait écho à la volonté du nouveau président de lancer la révolution de la prévention), cette bosseuse pourrait séduire les professionnels de santé par sa connaissance du monde médical et par son refus de partis pris idéologiques (ses déclarations concernant son refus d’effectuer une chasse aux sorcières contre les experts ayant pu travailler avec l’industrie pharmaceutique avaient d’ailleurs été épinglées). Son aversion marquée pour les dépassements d’honoraires et son manque de nuance concernant l’efficacité des programmes de dépistage systématique (quand elle était présidente de l’INCA) pourraient susciter à l’inverse quelques réserves. Mais avant que ces dernières ne s’expriment, il n’est pas inutile face à l’ampleur de la tâche à accomplir, de lui souhaiter bonne chance !

Aurélie Haroche

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Vos réactions (3)

  • La santé publique au cœur des préoccupations d'Agnès Buzyn: quelques rappels

    Le 18 mai 2017

    Peu sensible aux difficultés de la médecine libérale et comme le dit le JIM, tout au contraire Agnès Buzin est : « très attachée au service public ».

    En ceci, elle a pris la leçon chez son ex-belle-mère S. Veil, celle qui a obligé, avec la force de ses décrets au temps de son ministère chez Chirac en 1974, certaines cliniques alsaciennes à participer au service public PSPH contre leur gré déclenchant une grève de trois mois.

    Agnès Buzyn comme le dit le JIM : « Son aversion marquée pour les dépassements d’honoraires et son manque de nuance concernant l’efficacité des programmes de dépistage systématique (quand elle était présidente de l’INCA) pourraient susciter à l’inverse quelques réserves. »

    Entre 2009 à 2011, après avoir été nommée membre du conseil d’administration puis vice-présidente de l’INCA, Agnès Buzyn a pourtant continué à participer aux conseils d'administration des laboratoires Novartis et Bristol-Myers Squibb.

    « Ses déclarations concernant son refus d’effectuer une chasse aux sorcières contre les experts ayant pu travailler avec l’industrie pharmaceutique avaient d’ailleurs été épinglées », au moment même en 2014 où B Debré et P. Even présentaient leur Guide des 4000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux où la liste des experts achetés par les firmes figure en toutes lettres.

    Au moins, les choses sont claires, avec Agnès Buzyn concernant les firmes pharmaceutiques, elle qui a dit : « L’industrie pharmaceutique joue son rôle, et je n’ai jamais crié avec les loups sur cette industrie. Il faut expliquer que vouloir des experts sans aucun lien avec l’industrie pharmaceutique pose la question de la compétence des experts. »

    Tels furent les propos tenus par le professeur Agnès Buzyn, alors présidente de l’Institut national du cancer (INCA) et qui venait d’être nommée à la tête de la Haute Autorité de santé (HAS) en 2016.

    Agnès Buzyn expliquait en 2013 que l’obligation de déclarer tout lien d’intérêt instaurée en 2011 par la loi Bertrand serait devenue trop « handicapante » pour certains chercheurs. Adoptée à la suite du scandale du Médiator cette loi visant à prévenir les conflits d’intérêts et à renforcer l’indépendance de l’expertise sanitaire publique rend obligatoire pour les professionnels de santé et décideurs publics la déclaration publique de leurs liens d’intérêt avec l’industrie pharmaceutique.

    Pour Irène Frachon, le médecin à l'origine de la révélation du scandale du Médiator, le médecin estime que « La solution n’est pas de passer outre ces liens d’intérêt. L’affaire du Médiator le démontre de façon tragique : des experts indiscutablement “compétents” sont restés solidaires d’un industriel lourdement criminel. »

    Dr Jean Doremieux

  • Content !

    Le 18 mai 2017

    On avait demandé récemment : qui mettre comme ministre de la santé ? J'avais répondu un chef de service hospitalier, car il connait les problèmes du personnel et également des libéraux qu'il a comme correspondants.

    Dr Richard Guidez

  • De qui se moque-t-on ?

    Le 30 mai 2017

    IRSN, INCA, HAS. Mais cette "dame" déclare n'avoir aucune ambition pour les postes institutionnels! De qui se moque-t-elle?

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