
Paris, le jeudi 30 juillet 2015 - Noël dernier, après quelques heures seulement de grève, les urgentistes obtenaient la satisfaction d’un grand nombre de leurs revendications et principalement celle d’une diminution de leur temps de travail, le ministre de la santé s'évitant ainsi d'être pris en étau entre une grève des urgences et celle des médecins libéraux.
La circulaire de la direction générale de l’organisation des soins (DGOS) publiée au Journal officiel le 20 juillet dernier indique ainsi que le temps de travail posté des médecins urgentistes est limité à 39 heures par semaine (et qu’au-delà, les heures doivent être rémunérées comme « supplémentaires »). Mais cette réforme est vue d'un mauvais œil par les autres praticiens hospitaliers et un vent de révolte se lève dans les hôpitaux français.
Mandarins et syndicats à l’unisson
Le Pr Stanislas Chaussade, spécialiste en oncologie digestive et président de la commission médicale (CME) du groupement Cochin, Broca et Hôtel Dieu, au sein de l'AP-HP dénonce dans un mail adressé à la direction de l'AP-HP (auquel l’AFP a eu accès) : « une ségrégation entre les praticiens hospitaliers pour des raisons syndicales et politiques », les autres praticiens hospitaliers continuant à travailler « 48 heures par semaine ». Il souligne aussi les incohérences budgétaires d’une telle reforme.
À l'AP-HP, la note s'élèverait à « plus de 3 millions d'euros », or, dans le même temps « plus de 4 millions d'euros d'économies » sont prévues sur le personnel en 2015. « S'il manque des effectifs aux urgences, il faut les mettre, mais pas en déshabillant les autres services (...) sans concertation. Dans ces conditions je refuse d'appliquer le plan d'efficience sur les effectifs médicaux au sein de mon groupement hospitalier en 2015 ».
Un avis proche de celui de la Fédération Hospitalière de France (FHF) qui dans son dernier communiqué a pointé du doigt : « un surcoût que personne ne peut nier et qui pose une nouvelle fois la question de la cohérence de la politique gouvernementale qui, d’un côté demande des efforts très rudes aux hôpitaux et, de l’autre, multiplie les annonces qui alourdissent les dépenses et rendent plus difficiles encore la gestion des équipes hospitalières ».
Enfin, le syndicat SNPHAR (Syndicat National Des Praticiens Hospitaliers Anesthésistes- Réanimateurs) a appelé la semaine dernière le gouvernement « à appliquer des mesures similaires aux autres spécialités dont le travail est lui aussi fortement contraint par des organisations de travail rigides comme les blocs opératoires mais aussi tous les autres plateaux techniques, afin de ne pas créer de dissension au sein de la communauté médicale », concluait-il.
Cette fronde succède à la mauvaise humeur de la conférence des présidents de CME, qui, la semaine dernière, avait « réitéré son opposition aux dispositions retenues, dont les mesures catégorielles génèrent une fracture au sein des communautés médicales ». Les médecins hospitaliers, autres qu'urgentistes, attendent (sceptiques) les conclusions, attendues pour septembre, d'une mission sur l'attractivité de l'hôpital public qui devrait notamment aborder la question de la réduction du temps de travail.
Frédéric Haroche