SAOS : plus d’un homme sur deux et plus d’une femme sur quatre ?

La prévalence du syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) ne cesse de croître à l’échelon mondial, plus particulièrement dans les pays à haut revenu. Le fardeau socio-économique qui en résulte suit une évolution parallèle et ce sont les formes modérées ou sévères de ce syndrome qui pèsent le plus lourd dans les dépenses de santé, du fait même de la prise en charge thérapeutique qui passe souvent par la CPAP, mais aussi en raison des facteurs de risque cardiovasculaire qui lui sont souvent associés et de leurs conséquences pronostiques. A l’échelon de la population générale d’un pays donné, les données épidémiologiques sont loin d’avoir la précision souhaitée si l’on veut procéder à des évaluations et à des projections socio-économiques.

C’est ce qui fait tout l’intérêt d’une étude réalisée en Belgique qui a porté initialement sur 2 205 sujets représentatifs de la population de ce pays. Dans tous les cas, un bilan exhaustif a inclus le maximum de variables cliniques, sociodémographiques et cardiovasculaires. Par ailleurs, un enregistrement polysomnographique a été effectué chez 1 809 participants (82 % ; âge moyen 58 ± 5,9 ans ; 52,3 % de femmes).

La prévalence du SAOS léger a été estimée à 41,0 % chez les hommes et 26,6 % chez les femmes. Pour ce qui est des formes modérées, les chiffres correspondants ont été respectivement de 11,8 % et 4,4 %, tandis qu’ils étaient de 6,5 % et 1,2 % pour les formes sévères. Le sexe masculin, un indice de masse corporelle élevé et un ronflement chronique étaient trois facteurs indépendants associés au SAOS, à la différence de la somnolence diurne ou de la fatigabilité.

Comparativement aux sujets témoins de la cohorte, le SAOS même dans ses formes les plus légères a été plus ou moins étroitement associé aux variables ou aux facteurs suivants, les odds ratios (OR) correspondants étant ajustés (ORa) selon l’âge et le sexe : (1) diabète : ORa = 2,40 (intervalle de confiance à 95 %, IC 95 % ; 1,52-3,80) ; (2) hypertension : ORa = 1,76 (1,42-2,19) ; (3) hypertrophie ventriculaire gauche : ORa = 1,36 (1,03-1,79) ; (4) plaques artérielles détectées par échographie : ORa = 1,19 (0,94-1,52) ; (5) augmentation des taux plasmatiques d’interleukine-6 : ORa = 1,37 (1,10-172). Ces associations se sont avérées plus prononcées dans les formes modérées ou sévères du SAOS.

Une prévalence sous-estimée ou…surestimée

Cette étude strictement transversale donne une idée de la prévalence du SAOS au sein d’une cohorte représentative de la population générale en Belgique. La recherche a été systématique chez des sujets d’âge moyen, indépendamment de tout signe d’appel. Dans ces conditions, les formes jugées légères concerneraient près d’un homme sur deux et plus d’une femme sur quatre : des chiffres très élevés qui dépassent les résultats obtenus chez des patients en règle symptomatiques et, qui, malgré cette nuance, méritent d’être confirmés sur une échelle encore plus grande en encadrant les critères diagnostiques.

Le phénotype classique est en revanche celui qui est couramment rencontré : un homme plutôt bien portant et par-dessus le marché, ronfleur. Le profil de risque cardiovasculaire même dans les formes légères asymptomatiques est préoccupant, les facteurs de risque étant bel et bien présents et menaçants, assortis d’une inflammation systémique probable : autant d’éléments qui forgent une véritable épée de Damoclès à l’échelon individuel et participent au fardeau socio-économique à l’échelon collectif.

Dr Philippe Tellier

Référence
Bauters FA et coll. Phenotype and RiskBurden of SleepApnea: A Population-BasedCohortStudy. Hypertension. 2019 ;c74(4):1052-1062. doi: 10.1161/HYPERTENSIONAHA.119.13452.

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