Thomas Pasquet à bord de l’ISS : objectif santé

Paris, le jeudi 17 novembre 2016 – Ce soir peu après 21 heures, Thomas Pesquet sera le dixième français à voyager dans l’espace. Il s’apprête en effet à rejoindre la station spatiale internationale (ISS) pour une mission d’une durée de six mois. A bord, l’ingénieur et pilote de ligne ne chômera pas. Les astronautes doivent en effet se consacrer huit heures par jour à la réalisation de différentes expériences scientifiques. Au programme de Thomas Pesquet, de nombreux travaux dédiés notamment à la santé.

Sédentarité, stress et absence de gravité

La recherche médicale espère beaucoup de l’observation des conséquences des voyages dans l’espace sur la physiologie humaine. Les conditions d’un vol habité équivalent en effet à un "vieillissement accéléré" et les spécialistes souhaitent notamment déterminer si les dispositifs mis en place pour atténuer les dommages inévitables sur les astronautes sont d’une part efficaces et d’autre par s’ils le sont pourraient être utilisés par la population générale. C’est l’effet combiné de l’absence de gravité (qui restreint les efforts nécessaires), de la sédentarité mais aussi du stress (en ce qui concerne notamment la santé cardiovasculaire) qui a sur le corps des astronautes des conséquences déjà constatées, mais qui doivent encore être étudiées. « Cette mission spatiale est un modèle extrême et pur de sédentarité », explique  Pierre Boutuyrie chercheur à l’INSERM dans les colonnes de 20 minutes. « Cela nous aide également à comprendre ce qui se passe quand on est immobilisé pendant des semaines ou des mois, par exemple lors d’une hospitalisation », insiste-t-il.

Réflexe, motricité, santé osseuse : l’ensemble des fonctions du corps concerné

Pour répondre à cette question et à bien d’autres, Thomas Pesquet sera habillé d’une "veste intelligente" dotée de multiples micro capteurs. Ces derniers permettront entre autres grâce à un scanner miniature au sol d’évaluer l’évolution des os de l’astronaute français qui a été par ailleurs l’objet de nombreux examens avant de s’embarquer. « On va pouvoir suivre la perte de l’os et sa récupération puisqu’on continuera à prendre des mesures jusqu’à un an après son retour », indique Laurence Vico. Autre dispositif technique embarqué à bord : le Manipulandum. Il s’agit « d’un instrument qui permet de mesurer en trois dimensions la force et le couple appliqués par l’index et le pouce » précise le Centre national d’évaluations spatiales (CNES). L’objectif est ici de s’intéresser à  « des méthodes thérapeutiques pour les personnes atteintes de troubles de la motricité ». Quand il n’utilisera pas le Manipulandum, Thomas Pesquet arborera peut-être le casque de réalité virtuelle Perspectives. En jeu ici, l’étude des réflexes. Dans le cadre de l’expérience Grasp, il aura pour objectif de déterminer : « l'influence de la perception et de l'orientation en micropesanteur, mais aussi de la plasticité du cerveau ». De multiples autres travaux seront réalisés : le programme Cartilage s’intéresse aux effets de la microapesanteur sur le cartilage du genou, quand l’étude Straight-ahead in microgravity concerne les modifications des fonctions sensorielles des astronautes. La mission sera également l’occasion de tester de nouveaux équipements d’échographie. Ces travaux peuvent avoir pour objectif soit une amélioration de la santé générale, soit une meilleure connaissance des répercussions des voyages dans l’espace sur l’état physique et psychique des astronautes, qui est essentielle à l’heure où certains envisagent des missions plus longues, jusque sur Mars.

Que faire en cas d’urgence ?

Mais au-delà de ces expériences physiques qui intéressent l’avenir, au sein de l’ISS, la santé peut parfois être une urgence. En dépit d’une très stricte préparation (qui passe notamment par des semaines d’alitement pour préparer le corps, mais également un entraînement physique) et un dépistage minutieux de tout trouble de santé, le pire n’est jamais sûr et une urgence médicale n’est pas impossible à bord. Pour ce faire, les astronautes sont formés aux gestes de premier secours. Par ailleurs, un membre de l’équipage au moins doit pouvoir réaliser des actes plus complexes : injection en intraveineuse, intubation, voire pose d’une sonde urinaire. Un rapatriement en quelques heures via une capsule Soyouz est en outre possible, ce qui n’a cependant encore jamais été nécessaire.

S’envoyer en l’air sans gravité

Enfin, on le sait, les répercussions psychologiques de voyages aussi longs sont nombreuses. En la matière aussi, la préparation est rigoureuse (afin entre autres d’apprendre à gérer les conflits). A bord, une attention soutenue est apportée au moral des astronautes (des casques de réalité virtuelles peuvent notamment permettre de ne pas se sentir totalement isolé de la nature). Mais, si la solitude était trop lourde à porter, certains pourraient être tentés de rêver à quelques rapprochements physiques. Cité par le journaliste du Monde Pierre Barthélémy sur son blog Passeur de Sciences, un ouvrage collectif publié en 2010 aux Etats-Unis évoquant la possibilité d’une colonisation de Mars avait fait remarquer que s’envoyer en l’air sans gravité pourrait poser quelques difficultés techniques. Mais bien au-delà, tenter de se reproduire pourrait être une gageure en raison des possibles conséquences de l’exposition aux rayons cosmiques et de l’absence de gravité sur la formation de l’embryon et du fœtus. Mais si elles se produisaient à bord de l’ISS, ce genre d’expériences se ferait en dehors du programme établi.

Aurélie Haroche

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