
Transporter un malade de réanimation pour une procédure diagnostique ou thérapeutique peut s’avérer délicat. Les événements indésirables survenant pendant ces trajets intra-hospitaliers sont fréquents et peuvent avoir des conséquences graves. Les risques doivent donc pouvoir être estimés a priori, avant la prescription.
Une étude observationnelle s’est donné pour objectif le recueil prospectif des événements indésirables survenus au cours de transports intra-hospitaliers chez les patients de soins intensifs et de déterminer leurs facteurs de risque.
Cette enquête a eu pour cadre une unité de soins intensifs de 38
lits et s’est déroulée entre mai 2009 et mars 2010. Tous les
transports consécutifs, effectués pour la réalisation d’un scanner
chez des patients sous ventilation invasive, ont été
examinés.
Sur les 262 transports observés (concernant 184 patients), 120
(45,8 %) ont été associés à des évènements indésirables. Ces
problèmes ont été classés en évènements liés aux patients, graves
ou non. Les complications majeures représentent ainsi 44 épisodes
soit 16,8 % de l’ensemble des transports réalisés et consistent en
extubations, désaturations significatives, retrait accidentel du
cathéter central, instabilité hémodynamique et/ou nécessité
d’augmentation des doses de vasopresseurs. Les évènements en
rapport avec le malade mais plus bénins concernent 53 transports
(20,2 %) et sont représentés par les agitations, retraits de sondes
gastriques ou urinaires, vomissements, problèmes de voies d’abord
artérielle ou veineuse ou déconnection des circuits de ventilation.
Les autres incidents, les plus nombreux (n=86, soit 32,8 %),
concernent des problèmes d’équipement (ventilateur, pompes à
perfusion et moniteur).
En analyse multivariée, les facteurs de risque de survenue d’un problème au cours d’un transport sont un remplissage effectué juste avant le transport (500 ml de solutés colloïdes ou cristalloïdes) avec un odds ratio (OR) de 6,5 (p<0,021), la ventilation avec pression expiratoire positive supérieure à 6 cm d’eau (OR de 2,28, p<0,03) et une sédation avant le transport (OR 1,85, p<0,021). A noter que la sévérité de l’indice de gravité ou la répétition d’un transport intra-hospitalier ne sont pas des facteurs de risques de survenue d’évènements indésirables.
Les conséquences de ces évènements restent toutefois limitées :
il n’a pas été relevé d’augmentation statistique significative de
la durée de ventilation assistée ou de séjour en soins intensifs
dans le groupe de patients ayant subi un incident au cours d’un
transport intra-hospitalier.
Cette étude confirme que transporter un malade instable, muni de
multiples perfusions, capteurs et assistances n’est jamais simple.
Et même si les résultats de cette étude montrent finalement
l’absence de conséquences graves de ces évènements, il convient de
considérer ces « voyages » comme à haut risque.
Dr Béatrice Jourdain