Troubles anxieux généralisés, Kava pas terrible

Alors que les troubles anxieux (notamment le « trouble anxieux généralisé », generalised anxiety disorder) représentent l’un des problèmes principaux dans le domaine des affections psychiatriques, une équipe d’Australie rappelle que les traitements actuels demeurent d’une efficacité modérée, parfois insuffisante pour conduire à des rémissions. Il semble en effet qu’un tiers des sujets concernés ne répondent pas au traitement (pharmacologique) de première intention, et que la moitié des patients ne répondent pas non plus au traitement de seconde intention. De toute évidence, estiment les psychiatres australiens, il est nécessaire de développer d’autres options thérapeutiques contre ces troubles fréquents, invalidants, et pouvant résister aux médicaments classiques.

Parmi ces pistes de traitements alternatifs, notons la possibilité de « faire du neuf avec du vieux », c’est-à-dire de recourir à des traitements traditionnels dans certaines cultures pour enrichir la pharmacopée mondiale du futur. Dans cette perspective, un « bon candidat » a priori semble être le Kava (Piper methysticum)[1], une plante médicinale consommée (avec des usages « culturels et récréatifs ») dans certaines îles du Pacifique (Fidji, Samoa, Vanuatu...) et, plus récemment, dans des « bars à Kava » (populaires parfois aux États-Unis) où cette plante est censée avoir une vertu « calmante. »

Moins bien que le placebo

Les auteurs ont réalisé une étude contrôlée (extrait de racine de Kava versus placebo, sous forme de comprimés, et normalisé à 120 mg de kavalactones deux fois par jour) chez 171 participants avec trouble anxieux généralisé. À l’exception d’un « fléchissement de la mémoire » (Kava = 36 versus placebo = 23 ; p = 0,044) et de tremblements (Kava = 36 versus placebo = 23 ; p = 0,024) plus souvent constatés dans le groupe Kava, et de certaines anomalies des tests hépatiques significativement plus fréquentes dans le groupe Kava, sans lésion hépatique induite, la bonne tolérance du kava a été vérifiée. Mais au terme de la phase contrôlée, seulement 17,4 % des patients du groupe Kava sont considérés comme améliorés (selon l’échelle d’anxiété d’Hamilton), comparativement à 23,8 % de ceux du groupe placebo (p = 0,46).

En d’autres termes, même si d’autres travaux présentent le kava comme un possible produit anxiolytique à court terme, pour traiter une anxiété plutôt réactionnelle, cette étude récente ne plaide pas pour le proposer comme un nouveau traitement efficace du trouble d’anxiété généralisé.

[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Kava

Dr Alain Cohen

Référence
Sarris J et coll.: Kava for generalised anxiety disorder: A 16-week double-blind, randomised, placebo-controlled study. Aust N Z J Psychiatry 2020; 54(2): 288–297.

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Vos réactions (3)

  • Traitement de l'anxiété par des voies nouvelles

    Le 27 juin 2020

    Et le traitement de cette forme d'anxiété (ou d'autres) par le cannabis médical (ou celui que pas mal de (mes) patients commencent à se procurer sur internet): y a-t-il des études? C'est une association de ma part, je pourrais chercher dans la littérature... Mais cet article m'y fait penser...

    Dr. M. Robert, psychiatre

  • Induite l'addiction

    Le 07 juillet 2020

    Est-ce bien raisonnable de mettre ces patients sur le chemin de la dépendance alors que la psychothérapie bien conduite par un praticien qualifié règle très souvent la question.

    GLV

  • Ne perdons pas notre temps

    Le 07 juillet 2020

    Le TAG se manifeste de façon chronique et peut être à ce titre considéré comme un trait de caractère. Il s'agit souvent de personne dont l'un des parents a le même trouble. Seules les psychothérapies suffisamment longues (analytiques ou TCC de longue durée) ont un effet. Ne perdons pas notre temps à essayer des médicaments qui dans ce cas ne sont pas indiqués ou ont des effets secondaires plus gênants que profitables.

    Dr Alain Braconnier

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