Dans ce contexte, un anticorps conjugué a reçu en janvier dernier une AMM Européenne conditionnelle dans le traitement des patients adultes souffrant un cancer du sein HER2 positif non résécable ou métastatique ayant reçu préalablement au moins deux lignes de traitement anti-HER2.
Charge cytotoxique élevée et « effet Bystander » contribuent à sa puissance d’action
Cet anticorps conjugué appelé « trastuzumab déruxtécan
» est composé de trois éléments :
- Un « linker » ou agent de liaison, stable dans la circulation générale et clivé au niveau de la cellule tumorale par les cathepsines
- Un inhibiteur de topoisomérase-1, dérivé de l’exatécan (chimiothérapie cytotoxique), qui est libéré dans la cellule tumorale après clivage du « linker »
En plus de l’action ciblée du trastuzumab et de l’exatécan, cet anticorps conjugué a une action antitumorale supplémentaire appelée « effet bystander ». Cet effet est rendu possible grâce à la perméabilité cellulaire de l’exatécan, qui peut ainsi agir sur les cellules tumorales adjacentes (aux cellules HER2+) indépendamment de leur statut HER2.
C’est l’essai pivot multicentrique, international, de phase
II, DESTINY-Breast01 qui a permis d’obtenir cette AMM
conditionnelle.
Dans cet essai clinique, 253 patientes atteintes d’un cancer
du sein HER2+, non résécable et/ou métastatique, ayant reçu au
moins deux traitements anti-HER2 ont été incluses. Le critère de
jugement principal était le taux de réponse objective confirmée,
évalué par un comité d’experts indépendants. Au total, 184
patientes (âge médian 55 ans) lourdement pré-traitées ont reçu du
trastuzumab déruxtécan à raison de 5,4 mg/kg toutes les 3 semaines.
Pour ces patientes, le taux de réponse objective confirmée était de
61,4 % avec 6,5 % de réponses complètes, et un taux de contrôle de
la maladie (réponse ou stabilité) de 97,3 %.
Le Dr Véronique Diéras oncologue au Centre Eugène-Marquis (Rennes) a commenté ces résultats: « Dans ce contexte, le taux de réponse objective dans cet essai s’avère très élevé, supérieur à ceux observés jusque-là avec les traitements de 3ème ligne et au-delà, et les résultats sur le long terme, qu’il s’agisse de la durée de réponse, de la survie sans progression et des premières données de survie globale, témoignent d’une activité durable de cette nouvelle molécule. Nous attendons maintenant avec impatience les résultats de l’essai de phase III. »
La plupart des effets indésirables constatés lors de cet essai de phase II étaient de grade inférieur à 3. La survenue d’une pneumopathie interstitielle (PI) est néanmoins à surveiller et un arrêt définitif du traitement est recommandé en cas de survenue d’une PI de grade supérieur ou égal à 2.
De nombreux essais cliniques en cours
Les données prometteuses de DESTINY-Breast01 ont conduit à la mise en place de l’essai de phase III DESTINY-Breast02 qui vise à confirmer l’efficacité et la tolérance du trastuzumab déruxtécan versus l’association lapatinib/capécitabine ou trastuzumab/capécitabine en traitement de 3ème ligne chez des patientes atteintes d’un cancer du sein HER2+. A noter que cet anticorps conjugué est également développé dans d’autres indications comme le cancer gastrique, le cancer colorectal et le cancer bronchique.L’AMM Européenne conditionnelle met fin à l’autorisation temporaire d’utilisation délivrée en France depuis juin 2020 dans cette indication. Ce médicament doit être prescrit par un médecin compétent en oncologie et administré sous surveillance médicale spécialisée. La dose recommandée est de 5,4 mg/kg (IV) toutes les trois semaines jusqu’à la progression de la maladie ou la survenue d’une toxicité inacceptable.
Dr Dounia Hamdi