Paris, le samedi 3 décembre 2022 - C’est l’épilogue d’une aventure
peu glorieuse que le principal mis en cause lui-même avait qualifié
à l’audience de « connerie ». Le 22 janvier 2022, le
site d’investigation Mediapart révélait qu’un professeur chirurgien
orthopédiste de l’AP-HP avait mis en vente sur un site de NFT
(jetons non fongibles) la photographie d’une radio d’une femme
blessée lors des attentats du 13 novembre 2015.
Le cliché présentait un avant-bras transpercé par une balle de
kalachnikov, accompagné d'un commentaire indiquant que « cette
jeune patiente » avait « perdu son petit ami dans cette
attaque » rendant ainsi possible l’identification de la malade
en cause. Le cliché, estimé à 2776 dollars et déposé sur la
plateforme Opensea, n'a pas été vendu. Il s'est retrouvé sur un
autre site, Showtime, créé par le fils du professeur de médecine
avant d'en être retiré en janvier dernier.
Après la révélation de l’affaire par Médiapart, Martin Hirsch,
directeur général de l'AP-HP avait fustigé un « acte scandaleux
d'une gravité exceptionnelle » justifiant l’engagement de
poursuites pénales. Le chirurgien, officiant à l'hôpital européen
Georges-Pompidou à Paris, était poursuivi pour violation du secret
médical, mais aussi pour détournement de la finalité d'un
traitement de données à caractère personnel et divulgation illégale
volontaire et nuisible de données à caractère
personnel.
Atteinte au secret médical
Si le secret médical constitue l’une des pierres angulaires du
code de déontologie médicale, sa violation est également
susceptible d’engager des poursuites pénales sur le fondement de
l’article 226-13 du Code Pénal. En vertu de ce texte « la
révélation d'une information à caractère secret par une personne
qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en
raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un
an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ».
En l’espèce, le tribunal a aisément reconnu l’existence d’une
violation du secret médical, y compris dans cette hypothèse où le
nom de la patiente n’a pas été expressément divulgué. La
condamnation du praticien à ce titre doit inciter les médecins et
professionnels de santé à une certaine prudence sur la divulgation
de photographies ou d’informations à caractère médicale sur les
réseaux sociaux.
En effet, il n’est pas rare que certains comptes narrent
certaines mésaventures médicales de patients (ou divulguent des
photographies de radios ou d’autres examens médicaux). Y compris en
l’absence d’éléments clairs permettant d’identifier le ou la
patiente, les professionnels doivent s’abstenir de toute diffusion
sur les réseaux sociaux (y compris des réseaux privés) au risque
d’être poursuivis pour violation du secret.
Pas de condamnation au titre de la violation des données
personnelles
Condamné par le Tribunal, le praticien devra verser 5 000
euros à la plaignante mais n'a pas de peine d'interdiction
d'exercer, même temporaire, contrairement aux réquisitions du
parquet. La présidente du tribunal de Paris a justifié ce jugement
plus modéré que les réquisitions par le fait que ce praticien
renommé « ne mérite pas d'être condamné à une mort sociale
».
Le Tribunal n’a pas retenu également la condamnation du
médecin pour détournement de données à caractère personnel,
estimant que l’infraction n’était pas suffisamment caractérisée. Un
jugement qualifié de « politiquement correct » par l’avocate
de la plaignante Me Elodie Abraham. « On a un chirurgien, bien
sous tout rapport, et ça ne dérange personne qu'il y ait une
violation aussi flagrante du secret médical. Ce n'est pas un très
bon message pour les médecins » a estimé notamment Me Abraham à
l’AFP.
J'aurais même réclamé une thérapie génique familiale puisque le fils est atteint de la même pathologie (car c'en est une).
Dr P Castaing
Mort sociale
Le 03 décembre 2022
Difficile de nier que le "contexte Bataclan" a surmédiatisé les choses, qu'il y a eu une continuité étonnante père-fils, que l'opportunisme vaguement élitiste est sans limite. L'argumentaire initial du PU-PH, sociologico-pédagogique, et son désir branchouille de sensibiliser aux... plateformes de NFT me laisse perplexe. Esprit "start-up" ? Start-down ici. Une fois passés jugement et articles du code pénal, il y aura le bouche à oreille, les réseaux : on peut imaginer une poursuite ou fin d'exercice pénible. Prévisible donc à assumer, qui joue peut perdre.
Dr JP Bonnet - PH
Misère médicale
Le 10 décembre 2022
La détérioration des salaires à l'AP-HP et l'augmentation du coût de la vie sont telles que les patrons doivent recourir à de tels expédients pour nourrir leur famille. Et bientôt pointer aux restos du cœur.