Variole du singe : un peu d’optimisme concernant la vaccination et la dynamique épidémique

Paris, le lundi 22 août 2022 – A la fin du mois de juillet, la préoccupation suscitée par l’épidémie de variole du singe approchait la cote d’alerte en France.

Le nombre de cas connaissait une augmentation inquiétante, tandis que la campagne de vaccination, ciblant les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes et multipartenaires semblait connaître des débuts rappelant ceux de la campagne vaccinale contre la Covid.

Les critiques se multipliaient de la part des spécialistes des maladies infectieuses déplorant une nouvelle fois le manque d’anticipation et redoutant une aggravation rapide de la situation.

L’administration intradermique autorisée en Europe

Pourtant aujourd’hui, les nouvelles encourageantes se multiplient en Europe et en France. D’abord, le 19 août, suivant la Food and Drug Administration (FDA), l’Agence européenne du médicament a autorisé que le vaccin Imvanex contre la variole du singe soit administré en intradermique et non plus seulement en sous cutané.

Cette technique, qui ne diminue pas la protection conférée par le vaccin (mais qui augmente le risque d’effets secondaires cutanés) doit permettre d’augmenter le nombre de doses disponibles.

En effet, « Les autorités nationales peuvent décider, à titre de mesure temporaire, d'utiliser l'Imvanex en injection intradermique à une dose plus faible pour protéger les personnes à risque pendant l'épidémie actuelle de variole du singe, tant que l'approvisionnement en vaccin reste limité », explique l’Agence européenne du médicament.

Les autorités sanitaires françaises devraient très rapidement actualiser leurs recommandations pour tenir compte de ce feu vert européen.

Des pharmaciens officinaux impliqués et efficaces

Parallèlement à cette évolution des techniques d’administration du vaccin, l’expérimentation de la vaccination en officine qui s’est déroulée la semaine dernière dans cinq pharmacies semble avoir été concluante.

En « moyenne, ces pharmacies ont vacciné trente personnes par jour », a précisé le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, Philippe Besset à l’occasion d’une réunion de suivi jeudi soir entre les représentants des pharmaciens et les Agences régionales de santé (ARS) concernées.

Pharmaciens et patients ont été très satisfaits, notamment les seconds qui ont apprécié de pouvoir bénéficier d’une vaccination précoce, alors que les premiers créneaux disponibles dans les centres leur imposaient d’attendre septembre. Les professionnels ont pour leur part uniquement remarqué que la charge de travail supplémentaire était plus importante que prévue.

Différentes pistes pour accroître rapidement le nombre de personnes vaccinées

Envisager une extension rapide suppose cependant de relever certains défis et notamment celui du circuit de distribution.

En effet, « les stocks de vaccin doivent être conservés à − 80 °C, seules les pharmacies centrales des hôpitaux peuvent aujourd’hui livrer les officines » décrypte Philippe Besset.

Par ailleurs, les autorités s’orientent également vers d’autres pistes pour faire progresser rapidement le nombre de personnes vaccinées : des opérations flashs c’est-à-dire une vaccination offerte sans rendez-vous pendant un ou deux jours et la distribution de vaccins lors d’évènements festifs.

Des autorités toujours prisonnières de la peur d’en faire trop ?

Quelles que soient les options choisies, certains observateurs considèrent que l’accélération est indispensable.

Interrogée par l’Express, la directrice de recherches émérite à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), l'épidémiologiste et biostatisticienne Dominique Costagliola regrette : « Si vous faites le calcul en vous fondant sur la cible populationnelle identifiée par la Haute autorité de santé, qui est de 250 000 personnes à risque, et si on se fonde sur un rythme de 10 000 vaccinations par semaine, il faudrait 25 semaines pour que tout le monde soit vacciné une première fois. C'est trop lent. Cela veut dire que l'on y arriverait seulement à la fin de l'année ; évidemment, cela ne suffit pas. Il faudrait pouvoir être trois à quatre fois plus rapide pour arriver à vacciner toute la population cible d'ici à la fin de l'été. A l'heure actuelle, je pense que la campagne de vaccination n'est pas assez vigoureuse... (…) On a l'impression que la plus grande crainte des pouvoirs publics est d'en faire trop. Après l'épisode de la grippe H1N1, il leur a été reproché d'en avoir trop fait. Mais il me semble que ce que le Covid a montré, par rapport aux masques notamment, c'est qu'il faut justement en faire trop. Car si la situation épidémique devient vraiment grave, ces stocks et cette stratégie sont nécessaires ».

Un nombre de cas en diminution en Grande-Bretagne

Cependant, les autorités, bien que probablement vaccinées contre la peur d’en faire trop, pourraient être rassérénées par des données épidémiologiques qui aujourd’hui ne sont pas aussi alarmantes que certaines projections statistiques.

Lors de la réunion de jeudi, certains participants ont confié au Monde avoir eu le sentiment que « les autorités sanitaires [étaient] plus rassurées que début août ».

De fait, en Grande-Bretagne, l’UK Health Security Agency a noté dans son dernier rapport hebdomadaire observé une diminution du nombre de nouveaux cas « ce qui suggère que la propagation de l’épidémie pourrait être en train de diminuer ».

Bien sûr, cette observation doit être confirmée, notamment parce que le recensement des cas est très loin d’être exhaustif et que les vacances peuvent freiner la collecte des données. Néanmoins, il n’est pas impossible, si la campagne vaccinale se déploie rapidement dans les prochaines semaines, de prendre finalement assez d’avance sur le virus. Pour une fois.

Léa Crébat

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