Le virus West Nile est apparu en Toscane en 1998 et s’est à nouveau manifesté en 2008 dans les régions de Vénétie et d'Emilie-Romagne sous forme d’infections équines et humaines (atteinte neuro-invasive). La surveillance entomologique et vétérinaire a permis de révéler une circulation virale étendue dans tout le Nord-Est de l'Italie. En 2009, 16 cas d’infections neuro-invasives à West Nile (WNND) ont été rapportés grâce à une enquête étiologique systématique dans ces types d’atteinte, les cas possibles étant analysés par sérologie (IgG + IgM), et par RT-PCR dans le plasma et le LCR.
Les échantillons positifs en RT-PCR ont été inoculés sur lignée cellulaire. Ainsi, en août 2009, une souche a pu être isolée du plasma d'un donneur de sang asymptomatique de la région de Rovigo. Elle a été entièrement séquencée grâce à 21 couples d'amorces recouvrant toute le génome, pour être comparée à 19 autres souches de multiples origines, accessibles dans les banques de données. Elle s’est avérée très proche de deux souches italiennes isolées de pies en 2008, les trois étant phylogénétiquement reliées à la souche équine de 1998. Elles sont en revanche plus éloignées des souches russe, roumaine, ou du clade israélo/nord-américain. Ces données confirment celles du séquençage partiel de souches vétérinaires italiennes : la souche responsable des épidémies récentes proviendrait de celle de 1998, le virus ayant continué à circuler en Italie à bas bruit ou ayant été réintroduit par des oiseaux migrateurs après avoir évolué ailleurs.
La rapide dissémination virale au cours de ces deux dernières
années pourrait être liée à la sélection positive d'amino-acides
améliorant la capacité de transmission et la virulence du virus.
L'isolat de 2009 montre par rapport aux souches de 1998 une
mutation T249P située dans le domaine hélicase de la protéine non
structurale NS3. Cette mutation est connue pour conférer une
stabilité accrue de la protéine à des températures élevées, et donc
une réplication plus efficace chez l'hôte aviaire. Il en
résulterait une virémie plus élevée chez les oiseaux, et donc une
infection accrue des moustiques vecteurs. Cette mutation a émergé
en 3 occasions indépendantes (Egypte 1955, Roumanie 1996 et parmi
le clade israélo/nord-américain) et a à chaque fois été associée à
des épidémies humaines.
Ce mécanisme pourrait expliquer la résurgence du virus en Italie…et
faire craindre une extension transalpine ?
Dr Muriel Macé