Algues vertes : écologistes et chef de l’Etat voient rouge

Paris, le vendredi 8 juillet 2011 – Souhaitez-vous vraiment qu’il fasse beau sur les plages cet été ? La question apparemment incongrue semblera peut-être plus parlante à ceux qui se promènent depuis quelques jours déjà sur certains bords de mer français notamment en Bretagne et qui ont découvert de longues traînées d’algues vertes. L’année dernière, l’Ulva, n’avait pas autant verdi les rivages en raison d’une météo plutôt saumâtre. Cet été, les conditions favorisant sa prolifération semblent mieux réunies. La sur-activité de la plate forme de traitement de Lantic (Côtes d’Armor) en témoigne : la semaine dernière, saturée, elle a dû momentanément fermer ses portes. Il est vrai qu’en Finistère et en Côtes d’Armor, 25 000 mètres cubes d’algues ont été ramassées depuis le début de l’année soit près du double du volume récolté l’année dernière à la même époque.

Des algues qui se comportent comme des porcs !

Si les plages bretonnes sont particulièrement exposées à cette marée verte, l’agriculture porcine intensive de la région en est sans doute la première explication. U. armoricana et U rotundata sont en effet très friandes de nitrates. Or, les déjections porcines en contiennent de si importantes teneurs que leur élimination est rendue difficile. Aussi, acheminés vers la mer par la pluie, les nitrates favorisent la prolifération des algues verdâtres. Si le soleil et la chaleur sont de la partie, l’ulva peut alors donner une nouvelle couleur au littoral.

Hydrogène sulfuré

Le trouble n’est cependant pas qu’esthétique. La toxicité de l’ulva a déjà fait des victimes : un ouvrier (et un cheval) sont morts, probablement asphyxiés par l’algue, pendant l’été 2009. L’hydrogène sulfuré libéré par les algues est l’une des principales causes de leur dangerosité. Il ne s’agit cependant pas de l’unique substance inquiétante dégagée par les algues en putréfaction. L’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) qui a publié hier un rapport sur ces troubles fêtes a identifié une trentaine de gaz émanant d’elles dont de l’ammoniaque ou du formaldéhyde.

Intégrisme vert

Aussi, l’ANSES a émis différentes recommandations. Elle rappelle la nécessité de « ramasser dès que possible les algues vertes échouées sur les plages ». Dans l’idéal, l’ulva ne devrait pas demeurer plus de 24 heures sur un littoral après son apparition. Ces chantiers de ramassage doivent par ailleurs répondre à des conditions de sécurité strictes. Les zones concernées seront balisées et le nettoyage par des voies mécaniques doit être privilégié insiste l’ANSES qui souhaite que soient protégés travailleurs et grand public. Mais outre ces recommandations ponctuelles, l’ANSES estime que la première des mesures à mettre en œuvre est de limiter la « prolifération des algues vertes » en réduisant « les apports en nitrate dans les bassins versants ». Une adresse directe aux techniques agricoles qui ne manque pas de susciter des commentaires. Les agriculteurs ainsi épinglés peuvent cependant compter sur le chef de l’Etat. En visite sur la presqu’île de Crozon dans le Finistère hier le chef de l’Etat a en effet lancé : « Sur cette affaire d'algues vertes, il serait absurde de désigner des coupables, de montrer du doigt les agriculteurs qui font d'énormes progrès en la matière (…). Il y aura toujours les intégristes qui vont protester et on n'entend qu'eux. Plus c'est excessif, plus on leur donne la parole » a-t-il estimé. Il a ensuite défendu la méthode de la méthanisation qui consiste à valoriser les déchets organiques pour limiter la dispersion des nitrates. Une solution peu prometteuse selon l’association Eau et Rivières de Bretagne qui assure : « En laissant croire que la méthanisation du lisier, qui ne supprime pas l'azote, permettrait d'éradiquer les marées vertes, le président de la République abuse l'opinion et rend un bien mauvais service à la protection du littoral ».

Aurélie Haroche

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